La vie en Rose
Traçabilité, naturalité, régressivité. Trois maîtres-mots pour qualifier les nouveaux codes des cosmétiques de l’ère Millennials. Tournés vers le plaisir et l’expérimentation, les soins s’emballent dans des packs photogéniques aux couleurs vitaminées.
Par rapport à leurs mères, ces femmes sont plus lucides sur ce que peuvent – ou non – leur apporter ces produits, pointe Marie-Hélène Lair, directrice de la communication scientifique de Clarins. Elles savent qu’elles ne feront pas disparaître leurs rides – si c’est ce qu’elles recherchent, elles se feront un lifting. En revanche, elles attendent de la douceur, de la sensorialité, un côté » feel good » qui passe par le plaisir immédiat de la découverte. » Priorité est désormais donnée aux essentiels du soin : le nettoyage et l’hydratation, couplés à la lutte contre les fléaux du siècle, la pollution et l’épuisement chronique lié à l’hyperconnectivité.
Au premier coup d’oeil, ce panda rondouillard aux allures de sumo a tout l’air du jouet d’enfant égaré dans la salle de bains. A y regarder de près, il s’agit pourtant d’un pot de crème, un » sleeping pack » – un soin masque à laisser poser la nuit – signé Tony Moly, une marque coréenne popularisée par les réseaux sociaux avant de s’imposer chez nous. Son succès incarne parfaitement l’un des tournants majeurs pris par le secteur des cosmétiques lorsqu’il vise les jeunes adultes de la génération Y, soit près de 2,6 milliards de consommateurs en puissance. »
Aux textures ludiques – de la mousse pétillante au masque durcissant fuchsia qui se décolle, en passant par le gel aussi liquide que l’eau – répondent des emballages au design tant écologiques que photogéniques. Imposés par des marques d’abord confidentielles et souvent 100 % digitales, dont Glossier est la plus belle incarnation, ces codes percolent vers les géants du secteur. Avec My Clarins, le groupe familial français cible directement les Millennials en proposant neuf produits faciles à appréhender : les noms sont simples à comprendre, les ingrédients clairement listés sur les packs – ceux qui sont bel et bien présents, majoritairement naturels, bio et si possible végans friendly, mais également les indésirables qui ne s’y trouvent pas -, le tout saupoudré de slogans rigolos comme sur les comptes Instagram.
Séduire au premier regard
» Plus que jamais, le packaging se doit d’avoir un véritable pouvoir d’anticipation sur ce que l’on va ressentir en l’ouvrant, poursuit Marie-Hélène Lair. Dès qu’on le prend en main, tous les sens sont en action. Cela passe par la forme, la couleur, le graphisme.
La durabilité, la transparence de la composition, doivent être perceptibles immédiatement. » Une démarche adoptée aussi par Clinique dès 2016 et par Shiseido qui, en 2017, avec sa ligne Waso a entamé avec succès le défrichage du segment 18-35 ans et poursuit aujourd’hui sur sa lancée avec un trio de nettoyants à base d’agar-agar, d’extraits végétaux et d’algues marines conditionnés dans des pochettes ressemblant à des » gourdes » de compotes à boire. De la même manière que les campagnes ne mettent plus en scène des femmes scrutant leurs rides dans leur salle de bains mais des squads de copines prêtes à tout partager, les produits sortent en bande, comme les nouveaux sérums hydratants de Biotherm ou des boosters de la ligne Capture Youth de Dior, qui apportent chacun une solution à un problème ciblé symbolisé par un code couleur.
Reste que s’il en est une qui fait l’unanimité et sert de signe de ralliement à la dynastie Y et même à celle qui suit, c’est bien le rose, en particulier dans la nuance » Shim » – contraction de » she » pour elle et » him » pour lui – omniprésente en filtre ou en fond dans les feeds qui dictent l’influence.
Nuxe et Caudalie l’ont adoptée pour leur gamme jeune, Rituals en a parsemé jusqu’au coeur des textures les produits de la ligne Holi – en référence à la fête indienne qui voit voler des poudres de toutes les couleurs – destinée aux ados.
Un véritable carton qui justifie l’ajout de trois références cette saison : un masque pour les lèvres, un masque » à bulles » et un gloss. Parce qu’il n’y a que du bien à se faire du bien.
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