La famille n’entre presque jamais par la porte d’entrée, mais par le jardin arrière et un escalier en colimaçon qui mène au toit-terrasse. A l’intérieur, le bois chaud d’afzelia et le béton, poli, coffré ou cimenté grossièrement, donnent immédiatement le ton. © Hannelore Veelaert

Leçon de style: comment donner à sa maison des airs de villa californienne?

Rizon Parein revient tout juste d’une aventure professionnelle dans la Silicon Valley. On retrouve dans sa maison anversoise cet esprit californien, et cette lumière qui fait aussi l’attrait de ce coin d’Amérique.

Difficile d’imaginer qu’à une époque, le Munthof, ce parc anversois le long duquel le fameux restaurant Camino a installé sa terrasse depuis six ans, était un terrain de jeu pour chiens peu avenant. Un endroit où les graffitis étaient également légion. Adolescent, Rizon Parein y vidait régulièrement des pots de peinture aux côtés d’un Matthias Schoenaerts alors inconnu.

Ce dernier est devenu acteur, son acolyte est entré dans le vaste monde de la publicité en tant que graphiste. Jusqu’à ce qu’il devienne, en 2016, le cerveau de Us by Night, un festival international de créativité et de design qui, après une pause de quatre ans due à la pandémie et à un passage professionnel dans la Silicon Valley, se déroulera à nouveau à la fin du mois de septembre.

Une Glass House en pleine ville. © Hannelore Veelaert

«Il y a une dizaine d’années, un rendez-vous chez un kiné en bas de la rue m’a ramené à cet endroit», explique Rizon Parein. Les habitants du coin s’étaient opposés avec succès à un projet de lotissement. Entre-temps, une nouvelle oasis de verdure avait vu le jour avec un terrain à bâtir adjacent. «Trois jours plus tard, la séance de vente avait lieu», poursuit-il.

Animé par ses souvenirs d’enfance, le créatif s’y rend, déterminé, avec deux enveloppes en poche. L’une avec une offre volontairement trop basse, l’autre avec le budget maximum qu’il peut se permettre, histoire d’adapter sa tactique au public présent dans la salle. Mais la participation étant faible, il improvise finalement une offre se situant quelque part entre les deux. «Rétrospectivement, ce calcul n’était pas le meilleur, avoue-t-il. Mais n’est-ce pas déjà exceptionnel de pouvoir acheter un terrain dans le centre d’Anvers?»

Ambiance estivale sur la terrasse © Hannelore Veelaert

Concilier les contraintes

Six mois durant, il revient alors sur le site, réfléchissant à l’espace qu’il désire et le dessinant en tenant compte des contraintes. Car l’acte de propriété ne lui a pas été remis sans directives. Le mur de briques rouges du parc devra être intégré dans la nouvelle construction et le rez-de-chaussée devra offrir un espace à usage public, comme un café ou un restaurant.

Une étagère murale rouge d’Habitat apporte de la couleur. Dans le coin salon, la famille se pose dans un canapé en cuir d’Edra. © Hannelore Veelaert

«Je suis passionné par le design et l’architecture, explique le propriétaire. Le scénario de ma maison – comment on y entre, les matériaux, l’ambiance – était clair pour moi dès le départ. Mais cela a aussi causé des frictions avec des architectes parmi mes amis. Ils savaient mieux et moi, je restais sur mes idées. En bref, nous voulions tous avoir le dernier mot, et cela ne fonctionnait pas», rit-il.

Dans son bureau, Rizon Parein collectionne des œuvres graphiques, des livres et des céramiques de Toykyo et Case Studyo, entre autres. © Hannelore Veelaert

Finalement, Rizon Parein se tourne vers Geert Driesen, architecte et associé chez awg, le bureau d’architectes dont bOb Van Reeth, le premier Bouwmeester flamand, est cofondateur. «J’ai découvert qu’il avait aussi fait une offre sur le terrain. C’était un pari audacieux de lui parler, raconte le maître des lieux. Mais il a accepté, et a immédiatement impliqué son fils Jef dans le projet.»

Les concepteurs optent finalement pour un volume étroit en forme d’hexagone qui s’intègre dans le quartier. «Avec ses trois étages, cette mini Glass House fait office d’habitation et de bureau avec une vue incroyable sur le quartier.» Une fois en haut, il nous montre le plafond structuré de poutres en bois – «C’est un peu dans l’esprit de l’architecte américain John Lautner, non?» Les trois habitants de cette maison n’entrent presque jamais par la porte d’entrée, nous confie le graphiste. Ils préfèrent de loin passer par le jardin et l’escalier en colimaçon qui les mène à la terrasse sur le toit.

Le plafond contemporain en lambris de la cuisine et l’intérieur sans fioritures confèrent à la maison une ambiance chaleureuse de bungalow californien. © Hannelore Veelaert

L’ambiance est en tous cas savamment étudiée. Dans la cuisine, le bois d’afzelia brun-rouge, l’acier brossé et le gris du béton brut donnent immédiatement le ton. Les sols ont été polis, les murs grossièrement cimentés comme s’il s’agissait de parois extérieures. Sans fioritures, mais toujours tactiles et confortables. Un bungalow moderne de style Mid-Century, mais en plein cœur de la ville.

«Aménager une maison? Je trouve cela difficile, poursuit notre hôte. Il faut y consacrer du temps et être patient. Et si on ne veut pas tomber dans des objets génériques, chaque achat doit être pesé, évalué et calculé. J’admire les intérieurs où l’on peut lire toute l’histoire des gens qui y vivent. Du plus petit morceau de tissu à un vase sur une étagère.»

Les plantes tropicales d’intérieur, une étagère murale de chez Habitat, une tapisserie de Laend et d’innombrables œuvres graphiques, notamment de Kimou Grotesk, Braulio Amado et Frederik Lizen, mieux connu sous le nom d’En Plein Public, qui réalise des peintures murales dans tout le pays, apportent de la couleur dans le logis baigné de soleil. La lumière est si dense que de longs rideaux et des stores coulissants doivent la modérer partout.

Cette luminosité l’aide-t-il à bien vivre son retour de la Silicon Valley au plat pays? «D’un côté, c’était un peu ennuyeux là-bas, un peu comme dans The Truman Show (NDLR: un film de 1998 dans lequel Jim Carrey est piégé dans une banlieue idyllique qui s’avère être le décor d’une émission de téléréalité). Mais quand je regarde les photos, nous avions vraiment l’air différents. Détendus, en bonne santé, bronzés. Les vendredis à surfer, les week-ends au Farmer’s Market. Même si la proximité des cafés, des restaurants et de la culture en général m’a manqué, être de retour donne parfois l’impression de se réveiller avec une gueule de bois. Le boucher du coin m’a dit: «Tiens, ça fait un bail!» Cela m’a fait réaliser ce que j’ai vécu avec ma famille pendant que les choses ici ont à peine changé.»

La famille réunie dans le salon. © Hannelore Veelaert

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