Les totebags en coton: une bénédiction pour l’environnement ou une catastrophe écologique ?

Tote bag

Le coton. Voilà une matière que nous le portons et utilisons presque tous les jours. Que ce soit sous forme de sous-vêtements, de T-shirts, de jeans ou de totebags. Ce qui a commencé comme une alternative durable aux sacs en plastique s’est rapidement muée en quelque chose de moins sympathique. Aujourd’hui presque tout le monde a un placard rempli de sacs à bandoulière en coton dont il ne sait plus trop quoi faire. Est-ce vraiment mieux pour l’environnement ?

Les totebags en coton sont partout. Vous les recevez en cadeau, vous les achetez comme sacs à provisions ou lors de concerts comme souvenir. Bien que ces sacs constituent une alternative aux sacs en plastique jetables, ils ne sont pas non plus totalement inoffensifs pour l’environnement. « Un sac en coton doit être utilisé pas moins de 131 fois avant de devenir plus écologique qu’un sac en plastique à usage unique. C’est ce qu’a montré une étude de l’Agence britannique pour l’environnement », déclare Niki de Schryver, fondatrice de la plateforme de mode durable COSH !

Quelques chiffres

– Environ la moitié de tous les textiles sont fabriqués en coton.

– En l’espace d’un demi-siècle, la production et la consommation mondiale de coton ont plus que doublé, pour atteindre environ 25 millions de tonnes.

– Le coton est produit dans environ quatre-vingts pays. Les principaux pays producteurs de coton sont l’Inde, la Chine, les États-Unis, le Brésil et le Pakistan.

– Le coton procure un revenu à plus de 250 millions de personnes dans le monde.

– 90 % d’entre eux se trouvent dans les pays en développement.

– Le prix que les agriculteurs reçoivent pour leur coton est volatil et connaît une baisse structurelle depuis les années 1980. Par conséquent, ce que les consommateurs paient pour le coton ne reflète souvent pas le prix réel. Même lorsque le prix du coton augmente – ce qui s’est produit récemment en raison de conditions climatiques défavorables, de guerres et de boycotts – cela ne signifie pas que les agriculteurs en tirent davantage d’argent.

– On estime que le travail forcé et/ou le travail des enfants existent dans environ 25 % des 75 pays producteurs de coton. On estime qu’un vêtement sur cinq fabriqué à partir de coton peut être lié au travail forcé.

*Sources : Campagne Clean Clothes, OIT, COSH.eco et Fairtrade International.

En effet, si le coton a de nombreuses qualités – il est solide, naturel, végétal, biodégradable et agréable à porter- cette plante duveteuse a aussi un côté moins attrayant.

Substances nocives

Dans l’imaginaire collectif, un champ de coton, c’est une multitude de boules blanches se balançant au gré du vent. Cela peut sembler idyllique, mais cette mer cotonneuse indique une monoculture. Une approche qui n’est pas bonne pour la biodiversité et rend cette culture sensible aux maladies. Ce qui fait que le secteur du coton est l’un des principaux consommateurs de pesticides chimiques dans le secteur agricole, alors que seulement 2,5 % des terres agricoles sont utilisées pour le coton.

« C’est une très mauvaise nouvelle pour la qualité des sols et de l’eau des rivières, des lacs et de la mer », déclare Bruno Van Steenberghe, fondateur de la marque de linge de maison Kalani et expert en coton. Pour les agriculteurs et leurs familles, de telles substances sont aussi dangereuses. En effet, « 95% du coton est cultivé dans des endroits où les producteurs de coton n’ont reçu aucune formation, de sorte qu’ils n’utilisent souvent pas les bons produits et ne portent pas de protection », explique Bruno Van Steenberghe. Lorsque l’eau est infectée, elle peut causer de très graves problèmes de santé. Non seulement pour les agriculteurs, mais aussi pour la communauté. Et si cela semble bien lointain, les substances toxiques se retrouvent aussi dans nos vêtements et certains de nos aliments.

Le coton consomme-t-il toute notre eau ?

Les producteurs de coton sont parfois montrés du doigt en cas de pénurie d’eau puisqu’une paire de jeans moyenne nécessite 7000 litres d’eau. Pour un T-shirt, cela représente facilement 2700 litres.

La majeure partie de cette eau est nécessaire pour produire le coton. Pourtant un plant de coton n’a pas nécessairement besoin de beaucoup d’eau pour survivre, mais bien si l’on souhaite une récolte importante – et donc un rendement financier.  Si l’empreinte hydrique moyenne du coton dans le monde est de 3 644 mètres cubes par tonne, soit l’équivalent de près de 1,5 piscine olympique, elle diffère énormément entre les pays selon les conditions climatiques, l’état du sol et les techniques d’irrigation. Par exemple, le coton peut utiliser 4 000 litres d’eau par kilogramme dans une région, mais jusqu’à 22 000 litres dans une autre.

Si vous avez un sac à provisions réutilisable en plastique qui traîne, prenez-le plutôt que d’en acheter un en coton.

« Il est aussi important de faire la distinction entre l’eau de pluie, que nous appelons « eau verte », et l’eau extraite du sol, des lacs ou des cours d’eau, que l’on appelle « eau bleue » », explique Niki de Schryver de COSH ! Logiquement, les pays où la sécheresse est fréquente ont besoin de plus d’eau bleue pour leurs cultures. En cas de mauvaise gestion, le coton peut donc effectivement contribuer à une surconsommation d’eau. Mais ce n’est pas que la faute des cultivateurs, c’est aussi aux marques et aux gouvernements à prendre leurs responsabilités.

La mer d’Aral en est un triste exemple dont le coton peut provoquer une sécheresse. Situé à la frontière entre le Kazakhstan et l’Ouzbékistan, le lac était autrefois le quatrième plus grand lac d’eau douce du monde. Au début du XXe siècle, il s’étendait sur 450 kilomètres du sud-ouest au nord-est, avec une largeur de 290 kilomètres. Cependant, la politique agricole des années 1950 va radicalement changer la donne. Les eaux de l’Amu Darja et du Syr Darja, les deux rivières qui se jettent dans la mer d’Aral, vont être détournées et utilisées pour la culture du coton. Le résultat ? Le lac n’a plus que 25 % de sa taille initiale et la qualité du sol s’est fortement détériorée. La zone où l’eau douce était autrefois abondante s’est transformée en un désert de sel. Les poissons, autrefois abondants, ont commencé à disparaître, entraînant la perte des moyens de subsistance de la population locale.

Mais l’endroit montre aussi que ce processus peut être en partie réversible comme le montre le nord de la mer d’Aral, au Kazakhstan. Grâce à des travaux qui ont coûté quelque 70 millions de dollars, les poissons sont revenus. Le lac ne retrouvera peut-être jamais sa taille initiale, mais grâce à beaucoup d’argent et d’efforts, cette partie de la mer d’Aral n’est plus à l’agonie.

Et le coton bio ?

Moins d’un pour cent du coton cultivé dans le monde est biologique. Selon Bruno Van Steenberghe, le coton biologique est le meilleur choix d’un point de vue environnemental. Le coton biologique est cultivé sans modification génétique et sans utilisation de pesticides et d’insecticides toxiques. Celui qui veut cultiver du coton labellisé biologique ne peut utiliser que des pesticides naturels. Il existe également des limites à l’utilisation de l’eau ».

La culture biologique n’est pourtant pas une évidence pour les producteurs de coton. Le démarrage nécessite des ressources financières et les bonnes connaissances. Si les agriculteurs doivent partir de terres épuisées, les rendements peuvent également être décevants au début. Un bon soutien est donc important pour ne pas causer de perte financière pendant la conversion qui peut prendre entre trois et sept ans. Pour Bruno Van Steenberghe, il y a une marge de croissance dans le secteur du coton biologique, mais qu’une conversion à cent pour cent n’est malheureusement pas réalisable. Douze à vingt pour cent des terres agricoles où le coton peut être cultivé conviennent à l’agriculture biologique. Dans les autres endroits du monde, les conditions climatiques sont trop mauvaises ou il y a trop d’insectes ».

Fraude

Enfin beaucoup de coton traditionnel serait vendu sous l’étiquette « coton biologique ». Nous le savons, car il se vend plus de coton biologique que l’on en cultive. Cela est rendu possible parce que des marques prétendent vendre des produits en coton biologique sans être certifiées. Mais aussi parce que des faux certificats circulent. Selon Simon Ferrigno d’Ecotextile News et une équipe du New York Times cette situation dure depuis 2008, mais n’a été révélée que récemment. Pourquoi cette fraude a-t-elle lieu ? De nombreuses marques de mode souhaitent vendre du coton biologique, mais ne veulent pas payer plus cher. Ils mettent la pression sur la chaîne de production, ce qui alimente les pratiques frauduleuses.

Il n’existe pas non plus de base de données numérique générale qui recueille des informations sur toutes les formes de coton biologique certifié. Les documents certifiant le bio sont donc encore trop souvent en papier et donc très facilement falsifiables. Tout cela sans parler des contrôles trop peu nombreux. Même le Global Organic Textile Standard (GOTS), le label le plus sérieux, a découvert une fraude dans sa chaîne en 2020.

Ce scandale ne signifie pas que tous les labels doivent être négligés. Vous trouverez ci-dessous des informations sur les certificats auxquels vous pouvez faire confiance.

A quoi faire attention

Tous les experts s’accordent à dire que les certificats officiels – malgré leurs lacunes – constituent le meilleur guide. Et pour vous faciliter la tâche, recherchez le label GOTS si vous voulez du coton biologique.  Selon Bruno Van Steenberghe et Niki de Schryver, l’autre label OCS (Organic Cotton Standard) offre moins de garanties que GOTS quant au caractère durable d’un produit en coton.

Et pour votre santé ? Tant le label GOTS que les certificats REACH et Oeko-Tex garantissent que le produit final ne contient pas de résidus de pesticides ou de métaux lourds tels que le plomb ou le cadmium.

Vous recherchez un article en coton ayant un impact minimal sur l’environnement ? Alors choisissez du coton recyclé* ou du coton biologique certifié GOTS avec le label Fairtrade ». Le coton équitable ne concerne que les conditions de travail, mais n’offre aucune garantie de coton biologique précise COSH!. « Toutefois, c’est souvent le cas. Fairtrade Belgium nous a informé que 71% de tout le coton Fairtrade est également biologique. »

*Le coton recyclé est plus respectueux de l’environnement que le coton neuf. Et si nous pouvions recycler ces montagnes de sacs en coton ? Malheureusement, ce n’est pas si simple. Même si un totebag finit dans une usine de traitement, la plupart des colorants utilisés pour y imprimer des logos sont à base de PVC et donc difficiles ou impossibles à recycler. Les motifs imprimés doivent d’abord être découpés dans le tissu avant que le reste du sac puisse être recyclé. Ainsi, en moyenne, jusqu’à 15% du coton est gaspillé et le processus de recyclage est rendu plus difficile. En outre, il n’est pas possible de fabriquer des produits à partir de 100 % de coton recyclé, car la qualité n’est pas assez bonne pour cela.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content