Lili est l’une des dernières créations de l’élégance made in France. Ce n’est ni un parfum, ni un top model… mais une chanson enfantée par le talentueux duo Aaron et reprise dans le film Je vais bien, ne t’en fais pas. Rencontre à cours ouverts.

Il fait nuit… On pénètre dans la cour du Louvre en apercevant par les fenêtres du musée déserté des légions de statues de marbre. On les imagine moins seules en présence de Lili, irrésistible chanson rauque dont les premières phrases filent le frisson :  » Lili, take another walk out of your fake world/Please put all the drugs out of your hand…  » Lili, est le tube inattendu de 2006-2007. Un succès dû à son utilisation dans le film de Philippe Lioret Je vais bien, ne t’en fais pas avec Mélanie Laurent dans le rôle de Lili, une jeune fille à la recherche de son frère jumeau. Lili est bien davantage qu’une chanson puisqu’elle incarne aussi, dans ce long-métrage, ce disparu dont l’absence devient obsédante. Sa mélodie transgresse les frontières de l’intime, la voix de son interprète semblant provenir des tréfonds de l’amour. Cette voix attachante est celle de l’acteur-chanteur-instrumentiste Simon Buret, 26 ans, de père américain, qui constitue la moitié d’Aaron. L’autre membre de ce duo atypique est Olivier Coursier, 33 ans, multi-instrumentiste. Deux beaux bruns sympas, pétillants. Comme leur premier album éponyme (*), collection de touchantes chansons en anglais, spleen et sentimentales.

Weekend Le Vif/L’Express : Lili, est-ce un vaccin pour ou contre l’amour ?

Simon : Un peu des deux parce que dans le vaccin, on inocule le poison pour aller mieux après…

Comment Lili est-elle arrivée dans re vie ?

Simon : Exactement comme les autres chansons : dans un coin du cerveau, puis sur un bout de papier. C’est une lettre ouverte à quelqu’un, comme tous les titres de notre premier album.

D’abord sortie dans la discrétion, Lili a connu un succès massif, foudroyant, devenant no 1 sur I-Tunes pendant un mois, amenant des dizaines de milliers de visions du clip sur You Tube. A quel moment avez-vous senti que le destin de la chanson basculait ?

Simon : Elle a été mise davantage en lumière que ses s£urs parce qu’elle est reprise dans le film de Lioret devenu un succès. On ne pensait pas qu’elle aurait plus d’exposition que les autres. On aime tous ses enfants de la même manière n’est-ce pas ?

Olivier : Je me suis dit que cette chanson avait quelque chose de plus lorsque ma maman m’a appelé un soir en me disant que ce morceau était vraiment génial.

Le fameux instinct maternel !

Olivier : Je m’y suis fié et elle avait raison.

Quel sentiment vous a procuré la première écoute de Lili dans le film de Lioret ?

Simon : Une grosse claque. Le réalisateur, très culotté, a utilisé Lili comme personnage principal de son film qui parle aux tripes. Mais on n’avait aucune conscience de ce qui allait se passer… Que cela allait se terminer par un César 2007 pour Mélanie ( NDLR : Mélanie Laurent a décroché le César du meilleur espoir féminin) et un autre pour Kad ( NDLR : Kad Merad a décroché, lui, le César du meilleur second rôle masculin). Le succès du film a été d’autant plus surprenant qu’il n’y avait pas beaucoup d’argent pour la promo, il s’est beaucoup fait par le bouche-à-oreille. Cette une très belle histoire qui montre qu’il peut encore y avoir de l’espace pour les choses libres et risquées.

Combien de temps vous a-t-il fallu pour trouver Artificial Animals Riding On Neverland (des animaux artificiels qui chevauchent un pays imaginaire), qui est le nom  » complet  » d’Aaron ?

Simon : En 2004, il y a eu une exposition à Paris au Musée Maillol sur Jean-Michel Basquiat ( NDLR : foudroyant peintre new-yorkais d’origine caraïbe, mort en 1988 à l’âge de 28 ans). Olivier et moi nous sommes rendu compte qu’on était complètement bouffés par son £uvre. Je pleure devant son travail, ce n’est pas explicable… Et dans ses toiles, se balade le prénom Aaron. Avec Basquiat, on partage l’idée que d’autres réalités que celles qu’on veut nous imposer, existent. Elles tiennent du non- visible : la ville et les pensées peuvent être un terrain de jeu. On oublie notre capacité de rêve et de monde parallèle.

Pas au sens façon Madame Irma ?

Simon : Non, simplement, l’être humain a un pouvoir. Il n’est pas seulement consommateur. Ce qui nous différencie de l’animal, c’est notre capacité à accéder aux rêves. Ce que l’on nourrit en tant qu’enfants et qu’on oublie adultes, donc Aaron signifie qu’on est des Artificial Animals Riding On Neverland. Aujourd’hui, les terres les moins explorées sont celles de l’esprit et il ne faut pas avoir peur d’y plonger.

Simon et Olivier, comment qualifierez-vous votre relation ? Vous êtes cousins, frères, comparses ?

Simon : On est des amis travailleurs au vrai sens du terme… Olivier : Simon fait partie de mes amis.

Dans ce lieu très beau et aussi très marqué du Louvre, comment vous sentez-vous face à vingt siècles, ou davantage, de culture française ?

Simon : Je suis né dans le xiiie arrondissement de Paris et j’ai donc vu tous ces paysages depuis l’enfance. On a de la chance d’être là. Devant nous, cette Pyramide et Le Louvre forment le symbole de deux extrêmes qui se rejoignent. Cela nous rappelle qu’on est juste de passage et que les pierres restent. Paris appelle beaucoup à la poésie.

Recevez-vous beaucoup de lettres d’amour ?

Simon : On reçoit pas mal d’amour, en général.

Et vous parlez pas mal d’amour !

Simon : La plupart des peintures, des livres, des chansons parlent d’amour. On n’est pas grand- chose d’autre, c’est ce qui nous construit. Olivier : C’est ce qui nous permet de repousser les limites.

Qu’avez-vous fait de plus formidable par amour ?

Simon : J’ai repeint une rue par amour.

(*) CD Aaron chez Bang !.

Exclusif ! Weekend offre à 50 de ses lecteurs l’occasion de rencontrer personnellement Aaron et Saint-André, le 27 novembre, au lendemain de leur concert sold out au Cirque royal à Bruxelles. Lire notre annonce en page 83. Plus d’info aussi en surfant sur weekend.be

Propos recueillis par Philippe Cornet

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