Déconseillé aux moins de 16 ans, le citytrip ? La capitale hongroise, ses splendeurs, son Danube, sa désinvolture ou ses sources d’eau tiède figurent parmi les arguments qui peuvent faire changer d’avis n’importe quelle famille un tantinet curieuse…

Ses étés brûlants font de Budapest une ville à visiter sous un soleil plus discret. Le printemps qui, l’air de rien, approche à grands pas, est idéal : les lumières du fleuve, des parcs, des ponts, des places et des longues avenues s’invitent sur les moindres détails d’une cité resplendissante, tandis que la tiédeur des bains thermaux fait forcément un bien fou quand les (très) courtes journées d’hiver lâchent un peu de lest. Proposer la destination dans un numéro  » spécial enfants  » n’a rien d’une lubie : si beaucoup de voyageurs restent convaincus que le citytrip est avant tout une affaire d’adultes, Budapest fait partie de ces villes qui ont tellement de choses à montrer qu’on ne peut en interdire l’accès à quiconque. On ne dit pas qu’il faut s’y précipiter avec un nouveau-né. Mais la culture et l’histoire, poumons de la capitale hongroise, ont largement de quoi titiller la curiosité de ceux qui, dès 7 ou 8 ans, n’ont pas forcément envie de passer tout un week-end avec Mickey. On l’a testé, et on en est sortis indemnes…

LES PONTS DE L’UNION

Surnommée la  » perle du Danube « , Budapest s’étend de part et d’autre de son fleuve mythique. Celui-ci n’est pas seulement l’un des plus beaux éléments du décor, il est aussi l’un des personnages clés de son histoire. Jadis, en effet, il marquait la frontière entre les villes de Buda et de Pest, qui fusionnèrent en 1873 en évitant de tergiverser longtemps sur leur nom de baptême. L’union s’est déroulée sans pépin, sous les yeux approbateurs d’un beau Danube bleu qui en avait vu d’autres : les Huns d’Attila, les Mongols, les Ottomans ou encore les Habsbourg autrichiens avaient notamment jeté leur dévolu sur cette vaste cité qui, parfois dans la douleur mais toujours avec fierté, a connu un essor quasi incessant. Cette leçon vaut bien un coup d’oeil sur les neuf ponts qui, aujourd’hui, permettent à la colline de Buda et à la plaine de Pest de rester enlacées jour et nuit. Parmi ceux-ci, le pont des Chaînes, le pont de la Liberté ou encore le pont de l’Indépendance, dont les noms en disent long, constituent les points de repère les plus importants du fleuve. Un passage s’impose sur au moins l’un d’eux, non seulement pour regarder les bateaux au coucher du soleil, mais aussi pour s’offrir des panoramas sans pareil sur les clochers ou les tours de bâtiments qui, non loin, s’échappent de partout.

TRÉSORS D’ART NOUVEAU

Ces passerelles majestueuses servent un peu de phares pour le voyageur. Mais la meilleure manière d’apprivoiser le bijou hongrois, c’est surtout de bien préparer son escapade, puis de se procurer un bon plan des lieux. Avantage non négligeable : la ville possède l’un des réseaux de transports en commun les mieux fournis d’Europe, avec des bus, des trams et un métro (entièrement rénové dans les années 90) auxquels rien n’échappe. S’il faut forcément flâner ici ou là pour mieux se perdre dans ses décors et son atmosphère, découvrir ses beautés cachées et sentir son dynamisme, Budapest n’hésite pas à tendre la main aux pieds fatigués.

A l’est du Danube, Pest constitue une promenade totalement incontournable. Et plus particulièrement la célèbre avenue Andrassy, que les Budapestois vous recommanderont chaudement pour la multitude de styles architecturaux qui s’y dessinent et les nombreux emblèmes qui la jalonnent. Même un enfant reconnaîtra que ce boulevard-là, entièrement classé par l’Unesco en 2002, n’est pas comme les autres. S’y côtoient notamment : l’Académie de Musique Franz Liszt, sur la place dédiée au même pianiste hongrois ; la pâtisserie Lukacs et son charme  » début de siècle  » qui en fait l’un des salons de thé les plus plaisants de la ville ; mais aussi la Maison de la Terreur qui, au numéro 60, rappelle les années sombres du nazisme et du communisme ; ou encore le splendide Opéra de Budapest, dont les premières briques ont été posées en 1884 et qui est considéré par les amateurs comme l’un des plus beaux d’Europe. Ici ou là, apparaissent des statues, des marronniers centenaires et, en saison, des terrasses fleuries. Entre les façades Art nouveau et néo-renaissance, se glissent des restaurants, des bars lounge, des coiffeurs huppés, des grandes demeures bourgeoises et, bien entendu, des boutiques de mode. Le bon plan pour les mômes ? Le Théâtre de Marionnettes, qui propose des spectacles dans cette bonne vieille langue universelle qu’est le rire…

Au bout de cette avenue, la Place des Héros éblouit les yeux par son élégante simplicité et l’espace dont elle dispose. Le monument du Millénaire qui s’y dresse renvoie une fois de plus à l’histoire agitée du pays, se souvenant du temps où les vaillantes tribus hongroises débarquèrent dans le bassin des Carpates. Non loin de là, le magnifique Jardin botanique côtoie un endroit qui, lui aussi, devrait faire plaisir à quelques têtes blondes : le zoo, habité par des hôtes prestigieux comme des gorilles ou des dragons de Komodo. Un moment de détente qui est évidemment le bienvenu, avant de s’en aller découvrir les autres merveilles de Pest qui, on le répète, se comptent par dizaines. Dans la rue Dohany, par exemple, se trouve ni plus ni moins que la plus grande synagogue d’Europe, au coeur d’un quartier juif où il fait bon se balader. Quant au Grand Marché couvert, blotti dans un édifice néo-gothique, il se traverse en compagnie des senteurs de piment (grande spécialité hongroise), de salami ou de miel, en s’offrant des petites dégustations de mets locaux à des tarifs quasi anecdotiques.

LES HAUTEURS DE BUDA

Avant de quitter Pest, on s’accorde un détour par les bains Széchenyi. Objectif : se prélasser. La culture thermale, héritage de la domination ottomane, est omniprésente dans toute la ville. Les touristes adorent s’y plonger, en observant d’un coin de l’oeil les joueurs d’échecs qui s’adonnent à leur passion dans l’eau tiède. Il s’agit là des plus grands bains de Budapest. Mais ce sont aussi les plus plébiscités, et la file peut être longue à l’entrée. Notre conseil : attendre d’avoir atteint l’autre rive pour aller se baigner à Buda, et plus précisément dans les bains Gellert appartenant au magnifique hôtel du même nom. L’atmosphère y est plus tamisée, le décor Art nouveau – encore lui – est splendide et les soins prodigués y sont réputés. Trouvez-nous un adulte qui ne se sent pas revigoré en sortant, et on vous rembourse le ticket. Trouvez-nous un enfant qui n’aime pas barboter avec, devant lui, un éventail de treize piscines, et on ne vous croira pas.

Après le réconfort, l’effort. Il faut impérativement monter jusqu’à la Colline du Château pour avoir une authentique vision de ce que la ville détient de plus beau. L’Eglise Mathias, également appelée Notre-Dame, son haut clocher et ses tuiles vernissées sont une première récompense. A deux pas de là, les six tours en pierre blanche du Bastion des Pêcheurs sont agencées de sorte que le visiteur a envie de se perdre parmi ses recoins. De nombreuses statues y sont disséminées, parmi lesquelles une réplique du Saint-Georges de Prague. Sous un ciel bleu, le charme du lieu est décuplé, tant les briques claires font ressortir les contours et les détails des façades. Les marchands de glace se chargent de fournir le goûter, tandis que les escaliers et les corridors, à condition de prendre le bon chemin, mènent à un panorama tout simplement somptueux. Le Danube, en contrebas, avoue sa largesse et sa légendaire sagesse. Derrière lui, c’est une carte postale grandeur nature qui se déploie, avec une vue unique sur Pest et ses bijoux. Le gigantesque Parlement – près de 300 mètres de longueur – semble à la fois proche et lointain. Difficile de le quitter des yeux. Difficile, surtout, de ne pas ressentir un furieux besoin d’aller le voir de plus près. Pour cela, il faut redescendre de Buda et, vous l’avez compris, retraverser l’un de ces ponts. Mais curieusement, les pieds ont fini de souffrir depuis longtemps et s’y rendent sans rechigner, quelle que soit la pointure des semelles…

PAR NICOLAS BALMET

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