Son corps est un avion. À 39 ans, le Belge Cédric Dumont appartient à la frange la plus radicale des sports extrêmes. Avec sa combinaison à ailes, il a réalisé le rêve d’Icare.

Envie de se faire peur ? Il suffit de taper  » Cédric Dumont  » sur Youtube ou Vimeo. S’ensuit une série de petits clips à couper le souffle. On y voit le trompe-la-mort voler littéralement à quelques mètres du sol, rasant les arbres. L’un des films en question le montre se précipitant dans le vide depuis les 4 000 mètres du sommet de L’Eiger. Signe particulier ? On le voit arriver en haut de la mythique montagne suisse quasi sans matériel, presque les mains dans les poches. C’est que tout son parcours tend vers l’abstraction.  » Je n’ai fait que suivre la logique des sports de glisse, être au plus proche des éléments, en osmose avec la nature « , souligne celui qui affiche près de 12 500 sauts toutes catégories confondues au compteur de ses performances.

Enfant, Cédric Dumont commence par le surf avant de scruter le ciel. Saut en parachute d’abord, puis très vite chute libre. Après un détour par le sky-surfing qui consiste à se jeter d’un avion les pieds attachés à une embarrassante planche de 1,50 m, il se passionne pour le base-jump. Cette discipline radicale – elle compte une dizaine d’adeptes en moins chaque année – se pratique depuis des objets fixes tels que des ponts, falaises, antennes, buildings ou tout autre support dont peut s’emparer l’adrénaline. Le but ? Se jeter dans le vide et ouvrir son parachute le plus tard possible.

Cédric Dumont pense tenir là la discipline ultime. C’est sans miser sur le hasard qui, en 1997, le met face aux images de Patrick de Gayardon, l’homme qui a réinventé le vieux rêve de la combinaison à ailes en imaginant un tissu souple prenant place entre les bras et jambes du parachutiste. Pas découragé par le destin funeste du pionnier français – celui-ci s’est tué lors d’un essai de nouveau matériel -, notre homme se met en tête de reproduire cette combinaison – elle fait ressembler celui qui l’enfile à une chauve-souris – permettant d’évoluer dans les airs à la manière d’un oiseau.  » C’est une sensation unique que de pouvoir diriger le vol avec son propre corps, cela efface tout le reste « , commente-t-il en précisant à qui s’en effraie que  » tout cela est moins dangereux que de conduire une moto « .

À l’aube de la quarantaine, l’heure de la retraite a-t-elle sonné ?  » Certainement pas, je fais partie de ces sportifs qui ont ménagé leur monture, depuis que j’ai 30 ans, j’accorde une attention extrême à ce que je mange, je pratique également l’ashtanga yoga, la méditation… Je n’ai jamais été aussi en forme qu’aujourd’hui « , s’enthousiasme Cédric Dumont en évoquant l’exemple de son ami Kelly Slater, surfeur légendaire de 39 ans qui se dirige aujourd’hui vers son 11e titre de champion du monde. N’empêche.  » Au départ, j’étais à 100 % dans le faire. En 2005, je me suis mis à étudier la psychologie du sport à l’université de New York. Désormais, je suis consultant en performance pour une dizaine de sportifs de haut niveau mais également pour chefs d’entreprise. Je leur enseigne comment dépasser leurs peurs et entrer dans la « zone », ce moment d’hyper-conscience où l’on possède l’acuité d’un animal qui chasse.  » Même s’il évoque en riant les petites amies qui finissaient toujours par préférer  » les mecs en costume  » et confie qu’il n’a pas d’enfants alors qu’il  » ne s’est jamais interdit de fonder une famille « , comment déplorer une vie remplie de rencontres et de voyages ?  » Je n’ai pas passé beaucoup d’hivers en Belgique « , concède-t-il comme pour mieux enfoncer un dernier clou dans nos vies de sédentaires. Qui regrette quoi ?

PAR MICHEL VERLINDEN

 » SENSATION UNIQUE… POUVOIR DIRIGER LE VOL AVEC SON PROPRE CORPS. « 

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