Il y a un an, Aude Gribomont et Niels Radtke ouvraient leur select store in vivo à Bruxelles et online sur la toile. Des bêtes de mode qui créent le buzz.

Ils foulent aux pieds un tapis vraiment folklorique, un truc incongru, surtout si, de bas en haut, on porte le regard sur leurs chaussures (Elle : Carin Wester, Lui : Diemme), leur pantalon (Elle : Thvm, Lui : Silent by Damir Doma) et leur chemise (Elle : Sager Forsberg, Lui : 3.1. Phillip Lim). Ça les fait sourire en coin, l’été de leur boutique, ils le passeraient bien entre cactus et sable, dans le désert sud-américain. Un décor par petites touches, qu’ils ont planté dans les 300 mètres carrés tout blancs de leur endroit mode et pluridisciplinaire baptisé Hunting and Collecting. Aude Gribomont et Niels Radtke ou la contemporanéité sans prise de tête.

Elle, 1,71 mètre de fibres mode. Elle est née, il n’y a pas trente ans à Renaix, dans le coton, la filature et le tissage. La grosse usine de la région, c’est celle de son père, qui la tient de son grand-père. À l’ouverture de Hunting and Collecting, il est venu,  » il a touché tous les vêtements, il en reconnaissait certains et disait  » ça, ça vient de chez nous « .  » Mais avant cela, il a fallu qu’elle étudie la pub à l’Institut des hautes études des communications sociales (IHECS), à Bruxelles, débute comme rédactrice et styliste au Vif Weekend et chez Elle Belgique, parte décrocher un master en management de mode à l’Institut français de la mode à Paris. Car Aude est têtue, elle n’a pas lâché son rêve d’enfant : ouvrir une boutique, comme sa grand-mère paternelle, qui fut la première à oser imaginer un multimarque dans la capitale, Esders, c’était dans les années 50, Aude a de qui tenir.

Lui, 1,80 mètre de fibres avant-gardistes. Il est né il n’y a pas quarante ans près de Keerbergen. Ses parents,  » de vieux hippies  » allemands, musiciens folk formés aux États-Unis, avaient atterri là, dans une ferme, entre  » lacs, chevaux et papillons « . En 1992, on le retrouve à Anvers, où il étudie la sculpture aux Beaux-Arts, passe des nuits entières à se mesurer au marbre et  » à écouter le bruit de la taille « . Il part ensuite au Népal – il veut traduire en sons la structure de l’Himalaya. Arrivé à 6 500 mètres d’altitude, il regarde la montagne dans le blanc des yeux et pense tout haut :  » C’est ridicule : le son d’un objet, c’est l’objet lui-même.  » Après, il y aura du Cyberthéâtre, du multimédia, des envies scénographiques, graphiques et même vestimentaires pour les besoins d’un spectacle au Kaaitheater, un CD,  » de l’électro-folk « , et un magazine, vendu chez Colette, à Paris.

Elle et lui se sont rencontrés rue des Chartreux, il était serveur, elle prenait un thé, c’est là désormais qu’ils ont pignon sur rue, depuis le 27 février 2010.  » Cela s’est fait presque tout seul, se souvient Aude, vu qu’il n’y a qu’à Niels que j’en parlais. Un moment, je ne sais pas comment, mais on l’a fait, ensemble !  » L’idée a  » mûri « , elle n’en démordait pas : un lieu vivant avec des expositions, une plate-forme avec des vêtements de style,  » pas de déguisements  » ni  » des vestes à quatre manches « , pas du  » marketing  » non plus, mais des vraies collections,  » cool « , bien coupées, que l’on ne trouve pas ailleurs, qu’ils portent tous les jours – c’est dire s’ils connaissent le sujet. Avec, surtout, des marques indépendantes car ils mettent un point d’honneur à choisir  » des boîtes gérées par elles-mêmes, pas par des financiers qui les transforment en machines à fric sans sincérité « . Voici donc la liste de leurs coups de c£ur, non exhaustive et en exclusivité : Cosmic Wonder, Bleu de Paname, Stine Goya, Carven, Maison Michel, Soulland, Christian Wijnants, Topshop, Topman…

Dans leur select store lumineux, qu’ils ont peint eux-mêmes, avec meubles maison faits de récup et d’invention, la compilation de Belle and Sebastian passe en boucle. Elle ouvre un carton, l’été est livré. Il pianote sur son ordinateur et fignole la présentation de leur online store qui fait parler de Hunting and Collecting dans les milieux avertis, de Copenhague à Tokyo où l’on considère leur boutique comme l’une des meilleures du genre. Ils en sont fiers, ils peuvent l’être.  » On a tout fait tout seuls.  » Est-ce elle ou lui qui l’a dit ?

Carnet d’adresses en page 136.

ANNE-FRANÇOISE MOYSON

Du style, pas des déguisements.

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