Mon nom est Côme, lac de Côme… Sur mes rives se sont tournés de nombreux  » blockbusters  » qui ont rendu mon nom célèbre dans le monde entier. Paradisiaque, je reste toutefois l’un des endroits les plus exclusifs d’Italie, même si dolce vita rime davantage aujourd’hui avec cinéma.

Torturé de façon impitoyable, il s’en est fallu de peu pour que James Bond passe de vie à trépas. Arraché des griffes de son tortionnaire, le Chiffre, 007 reprend peu à peu goût à la vie aux côtés de la sulfureuse Mademoiselle Vesper Lynd. Dans un jardin magnifique, accolé à une loggia où pousse un ficus savamment taillé, James et Vesper partagent l’une des plus belles scènes d’amour de toute la saga Bond… Cette séquence des plus sentimentales n’est toutefois pas à la hauteur de la villa Balbianello, un des lieux de tournage de  » Casino Royale  » mais aussi l’un des sites les plus envoûtants du lac de Côme. Un endroit devenu public depuis que son dernier propriétaire, le comte Guido Monzino, légua sa villa et ses collections – à sa mort en 1988 – à la Fondation italienne pour la protection de l’environnement (FAI).

Située sur une presqu’île au milieu du lac, à deux pas du village de Lenno et face à Bellagio, cette belle demeure fut au xiiie siècle un couvent des franciscains. A la fin du xviiie siècle, Napoléon sécularisa le lieu. La propriété devint par la suite la résidence du cardinal milanais Angelo Maria Durini qui y construisit une loggia et une villa. Suivant les aléas de l’Histoire, elle appartint successivement aux familles Porro-Lambertenghi et Arconati-Visconti et après la Première Guerre mondiale – brièvement – au général américain Butler Ames. Ses héritiers la vendirent au comte Guido Monzino, issu d’une grande famille de commerçants. En préservant soigneusement le cadre authentique de la propriété, il la transforma telle qu’on peut la voir aujourd’hui.

Le domaine (réparti en 13 hectares de jardin botanique et 2 hectares de jardin d’agrément) s’orne de magnifiques platanes plantés par les Visconti et taillés en  » chandeliers « , le tout bordé ici et là de glycines de près de 150 ans d’âge. Le ficus, tout aussi âgé, recouvre les murs de la loggia et est taillé aux armoiries de la famille Visconti. La villa s’élève sur 5 niveaux en suivant ainsi la déclivité naturelle de la colline. En haut : la loggia comprenant, de part et d’autre de la terrasse, une bibliothèque de 4 000 ouvrages consacrés aux expéditions de Monzino (il fut le premier Italien à vaincre l’Everest en 1973 et dirigea, entre autres, de nombreuses expéditions au pôle Nord, en Patagonie, au Kilimandjaro, au Pakistan ou encore au Groenland) mais également un salon de musique recelant des meubles de marine et une extraordinaire collection de gravures du lac de Côme datant des xviiie et xixe siècles.

L’entrée de la villa, jouxtant la loggia, s’ouvre sur le bureau de Guido Monzino. Assis derrière ce meuble ayant appartenu à l’amiral Nelson, son regard pouvait s’évader vers le côté nord du lac.

Un chêne vieux de 250 ans effleure la fenêtre et, pour ne pas gâcher la vue, il est encore actuellement taillé à la main par une armée de jardiniers qui y grimpent et opèrent de l’intérieur de l’arbre… Les amateurs d’art ne manqueront pas d’apprécier ensuite le  » salon des Primitifs  » où est exposée une superbe collection de statuettes provenant de Grèce, d’Afrique, d’Egypte, d’Iran ou encore de l’île de Pâques. Pour compléter ses diverses collections, Monzino, mobilisé par ses expéditions, fera appel à de nombreux acheteurs qui écumeront les salles de vente Sotheby’s, dans le monde entier. Ces acquisitions viendront ainsi grossir une très belle collection de peintures sur verre des xviiie et xixe siècles, des porcelaines chinoises de l’époque Tang ou encore des statuettes Inuit. Tapisseries de Beauvais, meubles Louis XV ou Louis XVI décorent par ailleurs les salles communes. Le fumoir s’orne, quant à lui, de magnifiques boiseries issues d’un château de la Loire… De Monzino dont la devise était  » Si on va doucement, on peut atteindre le sommet « , on pourra encore contempler tous les trophées de ses expéditions menées de par le monde… En passant par le salon et la terrasse aux platanes, les amateurs de cinéma reconnaîtront les décors de  » Star Wars. L’attaque des clones « , le deuxième épisode de la saga du réalisateur George Lucas.

Lac de Côme, côté nord et sud

Avant de quitter ce lieu magique, une dernière halte sur la terrasse de la loggia s’impose afin d’embrasser quelques sites emblématiques du lac. Au sud, la vue plonge directement sur Comacina, un territoire encore un peu… belge ! En 1917, le bourgmestre du village de Sala Comacina fit, en effet, don de cette petite île au roi Albert Ier en témoignage de sympathie pour le courage dont avait fait preuve le peuple belge durant la Première Guerre mondiale. Elle fut toutefois rétrocédée en 1920 à l’Etat italien. Le roi des Belges souhaitait alors que les quelques bâtiments présents sur l’île soient consacrés à des activités artistiques et archéologiques sous l’égide de l’Académie des Beaux-Arts de Bréra (Milan). V£u pieux, puisque le projet n’eut jamais de suite. Dernière proposition en date : l’île deviendrait un parc naturel.

Entre la villa Balbianello et Comacina s’ouvre, au bord de lac, l’ancienne villa de Wallis Simpson, celle qui fut la célèbre duchesse de Windsor. Bourdonnante d’activité, elle appartient aujourd’hui au milliardaire britannique Richard Branson. Plus au nord, le regard est attiré par les couleurs chatoyantes des nombreuses azalées des jardins de la villa Melzi. Sentiers tracés à l’anglaise, palmiers, rhododendrons et petit kiosque romantique ponctuent cette propriété privée. La villa, désormais fermée au public par ses propriétaires actuels, les Gallarati Scotti, garde cependant ses jardins accessibles.

Pour clore ce tour d’horizon, on ne manquera pas de s’arrêter à Bellagio, dominé par la villa Serbelloni, appartenant à la Fondation Rockefeller et entourée d’un jardin botanique aux multiples essences rares et aux nombreux arbres fruitiers. Au pied de la colline, on ne saurait manquer le merveilleux Grand Hôtel Villa Serbelloni. Ancienne villa de vacances construite en 1850, l’immeuble de style néoclassique devint un établissement hôtelier en 1973. Propriété de la famille Bucher depuis 1918, le Grand Hôtel s’enorgueillit d’avoir conservé son charme d’antan avec ses fresques et ses peintures aux scènes mythologiques, ses petits angelots, ses hauts plafonds à caissons et ses salles et chambres nanties de lustres de Murano et de meubles de style Empire. Des pièces chargées d’émotions où résidèrent Churchill, Roosevelt et John Kennedy.

Plus glamour, des vedettes comme Robert Mitchum, Clark Gable ou encore Al Pacino ne manquèrent pas de venir s’y délasser. Aujourd’hui, il est toujours le rendez-vous des superpeoples, mais chut ! le propriétaire de l’hôtel garde sa liste d’hôtes confidentielle. Il affirme toutefois que depuis que la villa de George Clooney, à Laglio, a servi de décors à quelques scènes d’  » Ocean Twelve « , l’endroit est à nouveau envahi par les Américains désirant se marier sur les rives d’un lac fréquenté aujourd’hui par la star interplanétaire…

Chantal Piret

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