Un sapin la tête en bas, des elfes chaussés de patins à roulettes, des chants traditionnels version flash mob… Dans les grands magasins du monde entier, ce 25 décembre se prépare depuis parfois plus d’un an. Visite féérique.

Au commencement, il y avait Noël, célébration exclusivement religieuse. Puis, au cours du XVIIIe siècle, le sapin pénètre dans les foyers, transformant cette commémoration de la naissance de Jésus en une fête populaire baignant dans une atmosphère toute particulière. Les premiers exemplaires du roi des forêts, dressés dans les salons de riches familles allemandes, sont sobrement décorés avec çà et là, une petite bougie… et les risques d’incendie qui s’ensuivent. Les guirlandes lumineuses, quant à elles, apparaissent il y a plus de cent ans. Edward H. Johnson, alors vice-président de l’Edison Electric Light Company, fait produire, en 1882, quatre-vingts petites lampes à incandescence – rouges, bleues et blanches -, et en garnit un arbre devant sa maison, à New York.

Il faudra toutefois encore attendre plusieurs années avant de voir les rues briller de mille feux, le soir venu, tout au long du mois de décembre. Les légendaires illuminations devant le Rockefeller Center à New York ne datent en effet que de 1956 ! Une année charnière puisque c’est à ce moment-là que McAdenville, une petite bourgade de Caroline du Nord, devient aussi la première ville américaine à utiliser des lampes clignotantes pour célébrer l’Avent. C’est également à pareille époque que Philadelphie organise son premier spectacle lumineux, tandis que Walt Disney fait scintiller ses parcs d’attractions.

QUAND TU DESCENDRAS DU CIEL…

Durant la deuxième moitié du XIXe siècle cependant, avant même l’invention de l’électricité, les décorations estampillées  » Christmas  » sont déjà la spécialité des grands magasins en vogue dans les métropoles. La chaîne américaine Macy’s reçoit ainsi la visite de Santa Claus dans sa boutique phare de Big Apple dès 1862 et commence à composer des étalages festifs en 1874. Il s’agit alors de poupées en porcelaine en provenance des quatre coins de la planète. En 1883, le géant de la consommation introduit les scènes animées : un traîneau monté sur rails tiré par des rennes. Cinq ans plus tard, le Père Noël fait son apparition en Grande-Bretagne, chez J.P. Roberts à Stratford. Il est installé sur un trône dans une grotte artificielle. Depuis, tous les enfants veulent s’asseoir sur les genoux du vieillard barbu.

Au cours de la dernière décennie du XIXe siècle, Noël devient la période de l’année la plus chargée pour les commerçants.  » Les vitrines des dernières fêtes montrent bien tous les progrès réalisés, écrivait L. Frank Baum, l’auteur du Magicien d’Oz, dans la revue professionnelle The Show Window en 1899. Chaque village et hameau du pays a eu droit à l’un ou l’autre étalage d’exception, dont la finalité est d’attirer le public et de stimuler les ventes.  » L’événement devient définitivement un enjeu commercial. Et les enseignes misent chaque année davantage sur le spectaculaire : sapins gigantesques, automates, châteaux miniatures, maisons hantées, montagnes de friandises et de chocolat… Le public est conquis.  » L’année dernière, des foules se pressaient encore devant les magasins longtemps après la fermeture, et les décors sont restés éclairés jusqu’à environ 22 heures « , peut-on lire dans le Times en 1923.

Lorsque Lord & Taylor s’installe sur la Cinquième Avenue, à New York, il fait placer des ascenseurs hydrauliques en façade, offrant de multiples possibilités de mises en scène géniales. Ailleurs, de nouveaux mythes, contes de fées et personnages voient le jour, comme Rodolphe, le renne au nez rouge, né en 1939 de l’imagination de Robert L. May, un auteur au service de Montgomery Ward, à Chicago. Dans certains cas, des artistes renommés tels que Salvador Dalí, Jasper Johns, Maurice Sendak et Andy Warhol prennent même part à la conception des projets.

Certes, la fièvre de Noël est quelque peu retombée depuis le début de ce millénaire. Le rôle social des boutiques n’est plus le même, et le public ne se laisse plus autant impressionner par ces paysages hivernaux miniatures sur fond de Jingle Bells. Ce qui n’empêche pas les plus grandes chaînes du monde de continuer à investir massivement dans cette période faste. Juste pour le plaisir des yeux.

PAR JESSE BROUNS

 » Des êtres étranges et drôles dans un univers qui rappelle l’opéra. On est dans l’excès, tout en restant subtil.  »

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