Le peintre qui customise les objets de luxe s’est rendu célèbre par sa profusion de personnages tout droit sortis de sa mythologie personnelle. La danse est macabre mais le spectacle jouissif. Tournis garanti.

Parmi ses séries télé favorites, il y a Dexter, l’histoire du tueur en série que personne ne soupçonne.  » Pour la question du passage à l’acte « , précise Fabien Verschaere. Le plasticien affirme que devant la toile, armé d’un marqueur ou d’un pinceau, il se sent comme un serial killer qui va commettre l’irréparable. Qu’est-ce qui se passe dans la tête de ce peintre de 37 ans qui, pour cause de maladie génétique, a passé une partie de son enfance alité ? Ses fresques fourmillant de monstres enchevêtrés parlent pour lui. Un tourbillon de têtes de mort, d’anges déchus, de clowns travestis et de centaures ricanants.

Depuis presque dix ans, ses contes de fées qui auraient mis les doigts dans la prise se retrouvent dans les galeries d’art du monde entier mais aussi sur des coupés automobiles impayables (Aston Martin), des boutiques de luxe (à l’hôtel Royal Monceau, à Paris), une guitare de star (pour le groupe U2), des endroits à la mode (le club VIP Room, à Paris) ou, plus récemment, du mobilier pour happy few (pour l’éditeur Domeau & Pérès). Des créations qu’il réalise à la vitesse de l’éclair.  » Je n’effectue quasiment jamais d’esquisse car je fais confiance au premier jet. La spontanéité contient une forme de sincérité qui disparaît avec la répétition. Et puis si les choses traînent, au bout d’un moment, elles ne me captivent plus.  » La perfection esthétique ? Il s’en fout. Son trait est nerveux, puissant et sans nuances. La vitalité lui importe plus que la beauté.  » Le produit fini ne m’intéresse pas, c’est l’expérience qui compte.  »

Français d’origine belge lointaine, Fabien Verschaere se met à dessiner dans ses jeunes années pendant ses séjours répétés en clinique.  » J’y étais comme enfermé, il fallait passer le temps.  » Comme d’autres ont l’oreille absolue, le garçon se découvre un sens inné de la composition qu’il perfectionnera à l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Paris dont il sort diplômé en 2000. Sa mythologie personnelle, proche de l’illustration, prend forme. Son univers se décline à l’envi sur les murs en brique même si son bestiaire fantastique semble s’accommoder de toutes les surfaces, des radiateurs de musée jusqu’aux toilettes de boîte de nuit. Et que les lieux soient jugés  » impurs  » le ravit…

Performeur in situ, Fabien Verschaere opère de préférence avec les écouteurs collés sur les oreilles.  » La musique m’inspire plus que les arts visuels. J’aime le lyrisme de Brel, de Léo Ferré ou de Biolay mais je me méfie de la poésie dans la peinture. Il faut rester connecté à son époque. Je ne me vois pas revenir au fusain ou à la sanguine.  » Entre les projets personnels et les customisations d’objets haut de gamme en édition limitée, il alterne les deux modes d’expression sans pour autant les confondre :  » Quand je collabore avec des marques, je m’adresse à tout le monde, c’est le contraire de ce que je fais quand je travaille en atelier pour moi, où j’explore davantage.  »

En attendant de revenir à  » des choses plus intimistes « , comme il dit, l’artiste a achevé un partenariat avec Elie bleu. Cette prestigieuse firme de tabletterie dont les coffrets trônent dans les salons de la Maison-Blanche et du Vatican lui a commandé une série d’étuis sur le thème du Péché originel. Ses fans en redemandent. Pour ce qui est du Saint-Siège, on est moins sûr. ?

PAR ANTOINE MORENO

 » LE PRODUIT FINI NE M’INTÉRESSE PAS, C’EST L’EXPÉRIENCE QUI COMPTE.  »

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