Longtemps monopolisée par les hommes, la bande dessinée (pas seulement drôle ou pour enfants) s’est considérablement féminisée depuis quelques années. Et avec elle, les sujets abordés : grossesse, maternité, éducation… Très loin de la BD  » girly  » !

A votre tour, les hommes, de jouer cette fois les potiches. La journaliste française et scénariste de bandes dessinées Gwendoline Raisson assume dans un sourire le rôle qu’elle a donné à la gent masculine dans son album paru en mai dernier aux éditions Dargaud : quasi inexistant ! Et pour cause : dans Mères anonymes, dessiné par sa comparse Magali Le Huche, il n’y en a que pour les mamans célibataires, réunies en groupes de parole tels les A.A. Caroline, Marie, Monica, Hélène ou Valentine se confient, toujours avec humour, sur leurs problèmes de mères et de femmes : le baby blues, la culpabilité, la pression sociale et parfois la souffrance longtemps sous-estimée de devenir maman. Une BD de femmes et de mères, pour les mères, mais pas seulement :  » Si moi-même, j’ai pu lire et apprécier des westerns ou des récits de science-fiction sans le moindre personnage féminin digne de ce nom, souligne Gwendoline Raisson, les hommes devraient être capables d’avoir de l’empathie ou même de s’identifier à ces femmes, comme moi j’ai pu le faire avec des cowboys. « Le duo a ainsi rejoint le club de moins en moins fermé des auteures, avec un  » e « , abordant, pour les adultes et dans une veine parfois largement autobiographique, des thèmes jusqu’il y a peu inexistants en BD. Loin, très loin, des titres dits  » girly « , pleins de jeunes femmes futiles s’exprimant sur des sujets qui le sont tout autant. La BD a changé, ses auteures également.

Longtemps, la bande dessinée fut une affaire de mecs, devant et derrière la planche. Des décennies durant, un lectorat essentiellement enfantin et masculin a donné le  » la  » de la production. Il fallut attendre les années 70 pour assister en France à l’apparition d’une bande dessinée plus adulte, et encore plus longtemps pour voir des femmes s’y exprimer sur des questions qui n’appartiennent qu’à elles. La première d’entre elles fut Claire Bretécher, qui, avec Les Mères ou Agrippine, changea la donne au début des années 80. Elle fut suivie par Florence Cestac (lire par ailleurs), mais c’est bien l’arrivée des mangas qui a définitivement révolutionné le genre, avec des collections entièrement conçues pour les filles et jeunes filles, féminisant soudain le lectorat, à tel point qu’un lecteur de BD sur deux est désormais une lectrice. L’explosion des codes (récits adultes, romans graphiques, blogs) a achevé la mutation : désormais, tout est permis en BD, un genre où les auteures sont chaque jour plus nombreuses.

PAR OLIVIER VAN VAERENBERGH

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