Aujourd’hui, les nouveaux artistes urbains s’approprient la ville à coups de stickers. De toutes les matières, c’est la colle qu’ils préfèrent.

Retrouvez Frédéric Brébant chaque lundi matin, vers 9 h 45, dans l’émission  » Bonjour quand même « , de Jean-Pierre Hautier, sur La Première (RTBF radio).

Quatre fantômes et une boule jaune en plein c£ur de Manhattan ? Pas de panique, vous n’avez pas rêvé, mais sachez toutefois que les cinq intrus étaient incarnés par des hommes dont on voyait la tête… Je m’explique : il y a quelques semaines déjà, une poignée de joyeux illuminés a eu la bonne idée d’organiser un Pac-Man grandeur nature dans les rues de New York en hommage à ce jeu vidéo mythique des années 1980. Hilarant, ce Pac-Manhattan s’est déployé autour du Washington Square Park (dont le quartier ressemble étrangement au quadrillage du vrai jeu !) et l’initiative a forcément gagné la sympathie des foules. Depuis, on attend impatiemment la première tentative en Belgique. Téméraires, les organisateurs souhaitent en effet exporter le concept dans toutes les villes intéressées ( www.pacmanhattan.com) ! Au-delà de l’exploit mémorable, cette anecdote croustillante révèle cependant une tendance de fond dans nos sociétés occidentales : le désir croissant, chez les citadins, de se réapproprier l’espace urbain. Multiforme, cette envie se décline désormais dans le non-sens et la provocation douce, dans l’artistique et l’humour bon enfant. Avez-vous déjà bien observé les feux rouges de Bruxelles ? Depuis peu, certains d’entre eux se sont garnis d’autocollants a priori invisibles mais qui révèlent toute leur audace graphique une fois l’ampoule allumée. Concrètement, le feu rouge prend la forme d’un c£ur et le vert, celui d’un trèfle. Amusante, cette démarche n’a rien de politique et vise simplement à apporter un peu de poésie au sein des villes désincarnées. Même constat pour la vague de stickers qui envahit aujourd’hui nos rues avec une orientation toutefois beaucoup plus artistique. Après la mode (toujours tenace) des graffitis, les adeptes du  » street art  » (comprenez l’art urbain) se tournent en effet de plus en plus vers les autocollants originaux comme moyen d’expression alternatif. L’air de rien, ils animent les murs et les panneaux de signalisation, les poubelles et les cabines téléphoniques, les abribus et les réverbères à coups de créations uniques et adhésives. Révélateurs d’une certaine culture citadine, les poseurs de stickers sont aujourd’hui la cible consentante de sites spécialisés sur le Net ( www.stickit.nl, www.saru.org,…) et font même l’objet de convoitise de la part de collectionneurs d’avant-garde. Certains, plus pervers, s’amusent aussi à détourner les messages publicitaires sur les panneaux ad hoc, dans les trams et les métros (on se souvient du fameux  » Besoin d’argent ? Maurice Noël !  » qui avait été jadis revisité en un tonitruant  » Besoin d’amour ! « ) et le jeu consiste désormais à pirater les affiches avec goût. En France, le phénomène est tel que la RATP a récemment offert des emplacements publicitaires du métro parisien à ces drôles d’artistes anti-pub, histoire de canaliser leurs débordements créatifs ! Mais l’initiative était temporaire et les Zorros du sticker sont repartis de plus belle à l’assaut du mobilier urbain. Plus rien ne pourra les arrêter. Surtout pas une boule jaune suivie par quatre fantômes hilares.

Frédéric Brébant

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