Justine Lévy nous conte avec tendresse et parfois humour la relation particulière qui l’a toujours unie à sa mère. Cette fois-ci, toute à sa joie d’être enceinte pour la première fois, la jeune femme apprend que sa mère va mourir d’un cancer.

Un rêve d’enfant ?

Sauver ma mère d’elle-même. Je voulais qu’elle soit heureuse pour pouvoir s’occuper de moi. Il en reste une impression d’insouciance. Même face à la mort, j’ai du mal à croire que les choses sont définitives. J’essaie de changer de manteau, mais la mue est lenteà

Pourquoi aviez-vous  » peur de devenir adulte  » ?

Parce que ça voulait dire que mes parents allaient vieillir, ne plus être là, mourirà Quel scandale !

Qu’est-ce qu’une  » mauvaise fille  » ?

Une fille qui ne trouve pas les mots pour consoler ou sauver sa mère. Je n’ai pas pu lui dire que j’étais enceinte. A ses yeux, j’avais toujours 5 ans. Devenir une femme a été un affront pour elle.

Que signifie  » devenir mère  » ?

J’allais devenir mère alors que je perdais la mienne. En dépit de la joie, c’est d’une violence inouïe. On cesse d’être une fille pour devenir une mère. Lorsque ma fille a dit pour la première fois  » maman « , j’ai su que c’était moi puisque la mienne était morte.

Comment  » échappez-vous à la tristesse  » ?

Je fais diversion, comme un enfant à qui on montre un oiseau dans l’arbre, quand il a mal. Sinon, je téléphone aux copains, je m’occupe des autres et je m’achète des jeans.

L’écriture est-elle une thérapie ?

Non, une libération. C’est si physique, que je ne peux pas écrire si je ne suis pas bien. Ecrire sert à oublierà Quand je m’y mets, plus rien n’existe, même pas les pleurs d’un enfant. Ce roman a été un accouchement inversé, qui m’a permis de redonner vie à ma mère.

Ressemblez-vous à votre mère ?

Non, mais elle m’a transmis l’éblouissement et la capacité à ne pas complètement se noyer.

De quoi êtes-vous fière ?

De me relever à chaque fois, de faire bonne figure quand ça ne va pas. Je suis fière de petites choses, de défis que je me lance tous les jours et d’avoir terminé ce roman après l’avoir longuement porté.

Et qu’est-ce qui vous fait honte ?

Je préfère garder cela diffus et confus. Il y a tant de noirceur dans mes livres, que je n’ai pas envie d’être contaminée dans la vie.

Le mot que vous préférez.

Maman. Il est si chargé de sens, qu’il est magnifique en toutes les langues.

Le talent que vous auriez aimer avoir ?

Jouer de la musique et pouvoir me foutre de ce qu’on pense de moi. Les critiques me font mal. Il faut apprendre à se blinder, au lieu de vaciller.

Vous ne pourriez pas vivre sansà

Mes enfants, mon amoureux et la Nicorette. La dépendance me rassure. Je n’aimerais pas être libre. Vivre c’est le contraire de survivre. La vie, c’est le mouvement et moi, je me vois très vivante !

Mauvaise fille, par Justine Lévy, Stock, 198 pages.

Par Kerenn Elkaïm

« Vivre c’est le contraire de survivre »

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