pour porter haut les couleurs d’alfa romeo, wolfgang egger puise son inspiration non seulement dans le patrimoine prestigieux de la marque mais aussi à milan, berceau de la mode italienne.

Wolfgang Egger déroge à la règle qui veut que tout bon designer automobile soit habillé d’un complet noir. Avec son allure des plus classiques et son apparence placide, Egger est pourtant un homme de passion. Celle qu’il voue tout entier à Alfa Romeo et à son histoire. Après un court passage chez Seat à Barcelone, où il avait suivi son  » maître  » Walter de Silva, il est depuis deux ans responsable du centre style d’Alfa Romeo. Une décision somme toute assez logique car c’est chez ce constructeur qu’il a effectué quasiment toute sa carrière. Cet Allemand, dont le visage anguleux rappelle celui du pilote de F1 David Coulthard, fait désormais partie de la légende d’Alfa Romeo. Légende, dont il tire d’ailleurs une grande partie de son inspiration…

Weekend Le Vif/L’Express : Il y a quelques mois, Alfa Romeo présentait sous la forme d’un concept-car un projet de 4 X 4. Sera-t-il produit et quelle sera l’identité de la marque pour le futur ?

Wolfgang Egger : Quand nous l’avons conçu, nous avons placé de grands espoirs en ce modèle. C’est un véhicule très important pour nous car il devrait nous permettre d’occuper un nouveau segment de marché. D’autre part, la réaction du public a été très enthousiasmante. Il n’avait jamais vu un 4 x 4 aussi typé, par ses proportions, ses surfaces vitrées très ramassées, le long capot avant, les roues repoussées aux extrémités de la carrosserie ou encore sa face avant. D’après moi, on ne peut que tomber amoureux d’un tel véhicule qui affiche une telle personnalité. Chaque détail, chaque proportion, chaque courbe exprime le style Alfa Romeo.

C’est la 156 qui a relancé Alfa Romeo. Que pensez-vous de cette voiture ?

C’était la pierre angulaire de notre renaissance. Chaque détail y a son importance. Prenez, par exemple, la manière de concevoir le pare-brise. C’est très spécifique à Alfa Romeo. Pourquoi ? Parce que depuis toujours, Alfa Romeo se voulait une marque sportive, engagée dans des compétitions. D’où l’importance de disposer d’une bonne visibilité latérale, notamment sur les virages serrés des petites routes. C’est ce genre d’élément qui continue à influencer notre travail de designer aujourd’hui. On retrouvera donc cet élément avec la prochaine génération d’Alfa Romeo.

La face avant d’une Alfa Romeo, avec sa calandre chromée, est également très importante.

Absolument ! Vous savez, la face avant d’une voiture est un peu comme le visage d’un individu. Vous pouvez directement connaître son humeur en fonction de ce que son visage exprime. Vous pouvez aussi reconnaître des traits de famille sur le visage de quelqu’un, dire d’où il vient ou encore, à quelle famille il appartient. C’est en quelque sorte la manière de montrer votre ADN. Pour une voiture, je dirais que c’est pareil.

Comment voyez-vous l’avenir stylistique de votre marque ?

Pour l’aspect extérieur, nous devons jouer la carte de la continuité. En termes de produits, il faut pourtant que nous nous remettions en question pour créer des modèles qui pourront intéresser une nouvelle génération de clients. C’est la raison pour laquelle nous avons conçu un 4×4. En haut de gamme également, nous devons nous interroger sur ce que nous pouvons proposer. Cela ne doit pas nécessairement être une berline classique ou une limousine. Au niveau de l’habitacle, je pense que des améliorations peuvent aussi intervenir dans le choix des matériaux. Nous devons viser une meilleure qualité et proposer une palette plus grande de couleurs. Les intérieurs ternes actuels sont le résultat d’une industrialisation qui a mené à la standardisation dans tout le secteur automobile. Mais, quand vous achetez des vêtements, vous avez une tout autre démarche. Vous faites en sorte que les couleurs de votre pantalon s’harmonisent avec celles de votre veste, de votre chemise, de vos chaussettes et de vos chaussures. Nous devons offrir cette possibilité aux acheteurs d’Alfa.

Quel genre de matériaux pourrait exprimer cette personnalité Alfa Romeo ?

Le bois était autrefois, sur nos modèles, synonyme de sportivité. Aujourd’hui, il est souvent utilisé dans l’habitacle d’une voiture pour exprimer le luxe. Nous réfléchissons sur la possibilité de renouer avec cette tradition du bois à bord de nos véhicules. Le volant en bois était une vraie signature pour les intérieurs Alfa Romeo. Nous venons de passer six mois à définir son retour. C’est un travail qui implique de retrouver les méthodes artisanales de fabrication. Dans les années 1960, nos volants étaient en bois de cerisier. Ce qui est très coûteux à réaliser de nos jours et qui nécessite des techniques artisanales que nous ne maîtrisons plus. Nous pourrions peut-être remplacer ce matériau par une autre espèce de bois. Mais il doit, en tous les cas, être un bois de Lombardie, issu de la région de Milan.

Le fait qu’Alfa Romeo soit basé à Milan a-t-il une influence sur les voitures que vous dessinez ?

L’environnement culturel dans lequel un designer évolue revêt une influence importante pour son travail. Une Alfa Romeo aujourd’hui ne pourrait pas être conçue en dehors de Milan. Cette ville est vraiment à l’origine de notre marque. Elle y est clairement associée. Dès le départ, Milan était une ville orientée vers le commerce, les échanges. En même temps, c’est une ville très ouverte sur l’extérieur, bénéficiant de beaucoup d’échanges. Il y a aussi cette tradition de l’artisanat, du travail du bois, du métal. Milan est aussi le centre italien de la mode. Il y a également Côme, qui n’est pas très loin. Pour le moment, nous effectuons, pour des intérieurs, des recherches sur les couleurs avec l’école polytechnique de Côme. Cette ville est devenue pour les nouvelles matières le centre mondial du textile.

Vous êtes allemand de nationalité et vous avez travaillé avec Walter de Silva chez Alfa Romeo, puis quelque temps chez Seat, avant de prendre la direction du design Alfa. Quelle impression gardez-vous de Walter de Silva ?

C’est mon étoile ! J’ai appris à travailler avec lui. Nous avons vraiment une très bonne relation. Je continue d’ailleurs à le voir. Entre nous deux, c’est une longue histoire professionnelle faite de complicité. Il suffisait parfois d’un simple regard pour se comprendre.

Quelle voiture conduisez-vous ?

Une Alfa 156 SportsWagon rouge ! Je possède également un spider Duetto, ainsi qu’un coupé Montreal. Ce dernier est très rare, mais c’est un modèle exceptionnel. C’est la meilleure expression du grand tourisme qu’ait jamais donné Alfa Romeo.

Votre Alfa préférée ?

C’est la 2600 Spider. Pour l’élégance et ce qu’elle représentait sur le plan de la carrosserie en termes d’avant-garde à son époque. Rien n’est de trop sur ce modèle. C’était une voiture légère, aérodynamique, une fusion parfaite entre toutes les meilleures idées du moment.

Propos recueillis par

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content