A Alost, le jeune architecte Pascal François signe sa propre maison : un espace intérieur aérien et immaculé, protégé par une « peau » opaque et rassurante. Superbe !

C’est un cube massif et compact. Les proportions (22 mètres de longueur et 7 mètres de profondeur) sont parfaites. De loin, on dirait un imposant corps monolithique, taillé dans la pierre. On s’approche. On constate que le cube est revêtu de briques rouge foncé. Ce matériau belge, le plus classique et le plus traditionnel, l’architecte l’a traité d’une façon originale et non conventionnelle. Les briques, réalisées à la main ne sont pas jointoyées, mais simplement empilées l’une sur l’autre (avec des interstices de trois millimètres), puis collées contre les murs des façades. Le résultat est spectaculaire : à la fois sculptural, brut et rassurant. Ce haut lieu des pesanteurs, du matériel et du solide, évoque immédiatement le savoir-faire des bâtisseurs romains.

On franchit la porte. Tout est blanc. L’ambiance est diaphane, un peu immatérielle, un peu fragile. Le contraste avec l’extérieur est saisissant ! « Ce contraste était à la base de mon concept, explique d’emblée Pascal François. A l’extérieur, je voulais exprimer un sentiment de protection. D’où cette architecture compacte, revêtue d’une « peau » opaque, un peu rugueuse. Pour accentuer ce côté rude, les briques de façade sont découpées à 45° aux endroits de jonction avec le crépi des retours de fenêtres. A l’intérieur, j’ai souhaité mettre en scène la fragilité. Tout paraît donc voué à plus de légèreté, de transparence, à moins de présence palpable. »

Aérienne, la structure intérieure n’est pas moins complexe, car elle doit répondre à plusieurs fonctions différentes. Sous le même toit sont réunis, en effet, l’habitation privée de l’architecte et de sa famille, ses bureaux, ainsi que le cabinet de sa femme Inge, kinésithérapeute. Le hall d’entrée, petit mais d’une hauteur impressionnante, est commun aux fonctions privées et professionnelles. A gauche, Pascal François a aménagé un petit bureau-salle de réunion. Il jouxte le cabinet de son épouse. Un escalier en béton brut lisse mène vers les bureaux du maître des lieux. Les espaces dédiés au travail sont ainsi regroupés face à la rue. La partie privative profite, en revanche, de l’intimité de la nature. On y pénètre en poussant une sobre porte en verre dépoli.

Un long couloir remplit le rôle de « zone tampon », utile pour séparer les pièces à vivre. Elles se succèdent de façon linéaire : débarras, toilettes, cuisine, salle à manger et, tout au bout, le salon. Pour plus de facilité, l’architecte a prévu une double circulation. L’accès aux différentes pièces est donc aussi possible par un étroit passage, longeant la façade côté jardin. Ce concept, très fluide, offre des parcours variés. L’ambiance est certes « minimaliste », mais agrémentée de surprises. Les hauteurs sous plafond varient selon les fonctions. Dans le salon, par exemple, il y a trois hauteurs différentes : 3,20 m, 5,25 m et 6,75 m. Résultat ? Un espace explosé, agité, plein de vie et de rythme. Les baies vitrées du rez-de-chaussée ont également été traitées de façon peu conventionnelle. Ainsi, les portes-fenêtres sont pivotantes, ouvrantes ou coulissantes. Un second escalier, privé, mène à l’étage où s’enchaînent deux chambres pour enfants, une salle de bains, le dressing et la chambre des parents.

« Je souhaitais créer un espace continu, empreint d’une grande logique dans l’agencement des volumes, explique Pascal François. Mon fil rouge ? La lumière. Selon moi, l’élément le plus important, car c’est elle qui crée l’espace. Une ouverture linéaire, percée dans le toit, éclaire agréablement la chambre et même le couloir du rez-de-chaussée, grâce à une passerelle de verre. » Les fenêtres ne manquent pas. Elles forment d’étroits bandeaux et sont placées verticalement ou horizontalement, parfois aux endroits inhabituels, comme par exemple dans la chambre, directement au-dessus du sol.

Une grande sobriété caractérise l’aménagement intérieur. Tous les sols de la maison sont recouverts d’une chape en époxy, revêtement industriel souple et économique qui offre, en plus, l’avantage d’une surface parfaitement lisse, sans joints. Le blanc domine partout. Une solution de facilité ? « Je visais la simplicité, précise Pascal François. Or le blanc accentue cette simplicité. Il faut être toujours conséquent dans ses actes. »

Cela dit, simplicité ne rime pas, ici, avec ennui. Toute la maison fourmille de détails vraiment peu banals. Quelques exemples ? L’architecte a renoncé aux plinthes. Elles sont remplacées partout par des profilés en acier galvanisé. Ils forment un petit creux qui allège ainsi la jonction avec le sol. Ces mêmes profilés courent aux extrémités des marches de l’escalier en béton. Celui-ci gagne en légèreté et donne l’impression de flotter dans l’espace. Les fenêtres surprennent par leur « look » novateur, doublement original. Une partie des fenêtres est « froide », à savoir enchâssée directement dans le mur. L’illusion optique joue à fond, on a l’impression que le verre est carrément absent. L’autre partie est insérée dans un châssis, formant un bloc épais. Cette mini-fenêtre est ouvrante pour permettre la ventilation.

Pour optimaliser la pureté de l’ambiance, l’architecte a tenu à dissimuler au maximum tous les accessoires « techniques » et incontournables. Les interrupteurs sont placés de manière quasi invisible. Les spots encastrés dans les plafonds sont sobres et microscopiques. Pour plus de discrétion, Pascal François les a relégués dans les coins, contre les murs. Dans la salle de bains se reflète la même volonté de formes droites, débarrassées de fioritures. L’architecte a opté pour une baignoire en quaryl. « Ce matériau synthétique à base de quartz permet d’obtenir des coins droits et aigus, conformes à la philosophie de l’ensemble, précise-t-il. L’autre plus ? Il s’agit d’un matériau résistant et peu onéreux. »

Conclusion ? Un architecte peut-il rêver d’une plus belle carte de visite ?

Carnet d’adresses en page 128.

Barbara Witkowska Photos : Sven Everaert

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