Il y a le ciel, le soleil et, surtout,

la mer… C’est dans sa maison de Tanger, à nulle autre pareille,

que le décorateur Yves Taralon

se retire pour changer d’air et savourer une liberté infinie.

Il habite Paris, il a la charge û et l’agrément û d’une vaste maison de famille en Touraine, et, pour se reposer de tout cela, pour changer d’air, au sens propre, il voulait une maison au bord de la mer. N’importe quoi. N’importe où. Il a élu Tanger. Yves Taralon, le designer et architecte d’intérieur qui a décoré le Café Marly sous les Arcades du Louvre et aménagé l’Espace Lafayette Maison, à Paris, passe sa vie à créer des maisons pour les autres et souhaitait, pour lui, un cadre de vie  » bricolé « . Loin de ce qui obéit à une vue d’ensemble clairement arrêtée, léchée et fignolée, il a conçu un décor plus instinctif, impulsif, mais patiemment construit, année après année, chaque strate du décor obéissant, aussi bien en contradiction avec les précédentes, à l’humeur du moment.

Dans sa maison de Tanger, la mer est si présente qu’elle y a pris davantage de place que le Maroc : le pays s’est effacé devant l’eau. Cette  » disparition de la terre « , comme une image des pesanteurs de l’existence, rend Yves Taralon plus libre. Il a l’impression, ici, d’être comme un nomade, comme un solitaire sur l’Atlantique, délesté des souvenirs de sa vie terrienne.

Il voulait une maison au bord de la mer : il l’a. Malgré ses allures des années 1930-1940, c’est une construction très récente, d’autant plus récente que le créateur l’a considérablement agrandie, se fiant aux principes des villages de pêcheurs û ou, du reste, des villages de la montagne marocaine û en accrochant les cubes les uns aux autres pour leur faire dévaler, de terrasse en terrasse, les rochers qui descendent jusqu’à la mer. Loin de toute recherche de démonstration, il n’a employé que des matériaux extraordinairement simples, et, en tout, s’est confié, aux artisans de la ville.

Yves Taralon ne souhaitait pas que sa maison entrât dans quelque catégorie que ce soit. Il ne voulait ni une maison  » à la mauresque « , ni un décor  » minimaliste « , qui aurait pu exister n’importe où, il ne voulait pas plus incarner un genre que céder à une mode. Il voulait que sa demeure fût libre û elle l’est û et qu’elle fonctionnât avec tout le monde û ce qui est le cas. C’est la mer, chez lui, qui commande et c’est elle, confie-t-il, qui a tout décidé…

Le décorateur assure qu’il n’y a chez lui que le strict nécessaire… Tout ce qui meuble sa demeure a été trouvé sur place, chez des brocanteurs ou au marché aux puces, ou fabriqué par des artisans de la ville (tisserandes, ferronniers, dinandiers, menuisiers, etc.) sur des dessins (ou des  » gribouillages « , préfère-t-il dire) du maître des lieux. Beaucoup d’amis artistes, qui sont passés par là, ont laissé des £uvres : elles seules ornent les murs de la lumineuse demeure.

Yves Taralon aime le côté discret, caché, de sa maison au bord de la mer : on y accède par une minuscule porte sur la rue, et, de cour en cour, d’étage en étage, on la voit descendre vers les vagues. Il apprécie surtout qu’elle est offerte aux éléments, à la merci d’un coup de vent, ou d’une canicule, comme un bateau en haute mer. C’est cette extraordinaire légèreté, cette liberté infinie, que, par son inventivité, son goût et son talent, il a eu l’art, entre ciel et mer, de mettre en scène.

Robert Colonna d’Istria

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