Barbara Witkowska Journaliste

F ace au  » prêt-à-porter olfactif  » se développe aujourd’hui un second marché, une parfumerie différente, plus personnelle, basée sur le conseil et le parti pris. Elitiste, diront certains. Exigeante, répondront les amateurs de  » rare « . Dans le sillage de Marie-Antoinette. Francis Kurkdjian, l’un des parfumeurs contemporains les plus talentueux (lire aussi Weekend Le Vif/L’Express du 9 mars dernier), vient de concevoir le Sillage de la Reine, une réinterprétation du parfum de Marie-Antoinette, composé à l’époque par Jean-Louis Fargeon, jeune parfumeur de Montpellier. Une création 100 % naturelle, réunissant les plus somptueuses essences de fleurs (iris, rose, jasmin, tubéreuse et fleur d’oranger), dans le respect des méthodes et des matières premières d’époque, avec le souci de rendre le résultat appréciable au début du IIIe millénaire ! Ce parfum, édité à 1 000 exemplaires numérotés, est uniquement disponible au château de Versailles. Nos lectrices pourront le humer et, éventuellement, l’acquérir, en se joignant à la visite-conférence dans les appartements de la reine. Cette découverte exclusive, organisée à l’initiative de Dimitri Weber, expert et formateur en parfumerie, aura pour thème  » A la recherche du sillage et de l’âme de Marie-Antoinette  » (lire aussi page 59). Elle sera, en, outre, rehaussée par la présence de Elisabeth de Feydeau, historienne du parfum et auteur du livre  » Jean-Louis Fargeon, parfumeur de Marie-Antoinette  » (aux éditions Perrin), dont les recherches ont servi à Francis Kurkdjian pour la formulation du Sillage de la Reine.

Luxe et volupté. L’engouement pour la parfumerie traditionnelle de qualité a aussi une autre raison.  » Le luxe s’est banalisé, explique Elisabeth de Feydeau. Aujourd’hui, un accessoire signé par une grande maison ne véhicule plus cette notion de luxe. Les personnes qui y aspirent, recherchent des objets qui ont disparu. On revient ainsi à l’artisanat. Car le luxe, c’est le métier de la main. Les rééditions, les créations actuelles  » à l’ancienne  » ou les collections limitées ont précisément pour but ce retour aux racines et à la qualité des essences. Cela dit, le succès des parfums anciens ne signifie pas pour autant que les produits actuels manquent de créativité. Ils renvoient tout simplement à notre besoin de se ressourcer. Les parfums anciens apportent une caution, car ils avaient une signification.  »

Il suffit d’observer le regain d’intérêt pour des matières premières comme l’encens, la myrrhe, le benjoin, le poivre, la cannelle ou les résines. Leur usage, si ancien et si répandu dans toutes les nations et toutes les religions, a pour but de nous réjouir, de nous éveiller, de nous purifier, de nous apaiser et de nous détendre. Tout se passe comme si une partie de l’héritage mystique du parfum avait traversé l’histoire de l’humanité et des civilisations, ancrée dans la mémoire collective. Ce n’est donc pas un hasard si notre époque, plus que jamais en quête de sens et de spiritualité, renoue avec ces valeurs traditionnelles de la parfumerie. L’odorat est le sens du souvenir par excellence. Ces fragrances d’antan permettent d’aborder une époque d’une façon plus sensible. Puisant leur inspiration dans l’Histoire avec un grand H, elles ont un autre point commun : elles racontent… une histoire.

Barbara Witkowska

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