À 22 ans, cette photographe liégeoise met son urgence de vivre au service d’une esthétique pop et romantique que consacrent trois expos et une première monographie parue chez Yellow Now.

Donner un titre à son premier livre n’est pas une mince affaire. Après s’être  » longuement pris la tête « , Lara Gasparotto (Liège, 1989) le baptise finalement Sleepwalk. L’objet, composé de trois ans de clichés intimes et nomades, tient en effet du rêve animé, agité, même. Par flashs, sans soucis géographiques ou chronologiques, s’y déploie un monde éclaté, décousu, une mosaïque chromatique où poussent en herbes folles des corps, des visages, des paysages, des bouts d’histoire. La sienne. À la sortie de ses études de photographie à l’Institut Saint-Luc de Liège, Lara Gasparotto se sent  » perdue « . Forcément serait-on tenté d’écrire. Quitte à s’inquiéter de son avenir d’artiste, autant profiter du  » mode de vie qu’il peut offrir « . Entendre le voyage, les expériences, les rencontres,  » la liberté « . À bien y regarder, cette option ressemble à une fugue. Un moyen d’échapper à ce qu’elle ne veut pas devenir – à défaut de savoir précisément ce qu’elle aimerait être.

De cette incertitude, Lara Gasparotto tire en vérité sa force, le carburant de son talent. Avec une sensibilité évidente aux petites étincelles de l’instant présent – elle parle  » d’éclats de lumière  » -, un équilibre parfait entre doute et audace, une fraîcheur héritée de l’enfance toute proche doublée d’un goût prononcé pour l’étrangeté, la jeune photographe sublime de biais l’instant charnière que constitue la fin de l’adolescence. De Kiev à Los Angeles où elle a pérégriné en  » mode cheap avec une bande de potes « , elle a ramené des images qui ont des saveurs de roman initiatique, quelque chose de mélancolique, d’aventureux et de profondément troublant. D’honnête, aussi, une gageure dans un registre esthétique où la posture menace si souvent. Ici, on est face à une espèce improbable de skyblog racé, parcouru d’atmosphères romantiques et inquiètes, justement tempérées de respirations pop.  » C’est mon petit compte rendu, dit-elle. Je ne prétends pas avoir le recul pour analyser mes photos. Je suis dans l’instinct. Je laisse aux autres le soin de commenter mon travail. Mon seul souhait, ce serait de provoquer plus d’émotions que de jugements.  » V£u exaucé.

PAR BAUDOUIN GALLER

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