Carnet d’adresses en page 88.

Rien ne laisse présager le contraste : une route sinueuse à une heure de route d’Avignon dans le Vaucluse profond, avec ses champs de lavande et ses vignes à perte de vue. C’est pourtant dans ce paysage de terroir, à Saint-Saturnin-lès-Apt, que Olivier et Patrizia Massart ont imaginé leurs maisons d’hôte ultracontemporaines.

De l’extérieur, le domaine des Andéols, ce sont neuf maisonnettes dispersées sur vingt hectares de terrain qui appartenait au grand-père d’Olivier ; neuf bâtisses qui jouent le jeu de la tradition séculaire, entourées de fontaines à tête de monstre, construites avec des murs de pierres sèches et des toits de tuiles rouges. Les deux autres maisons qui abritent le hammam et le restaurant s’inscrivent elles aussi, mais en apparence seulement, dans la veine régionaliste. C’est un leurre, évidemment. Lorsqu’on pénètre, côté jardin, par le restaurant, on comprend instantanément le pari de la modernité : blancheur immaculée, sol de béton et galets, chaises en polycarbonate de Starck, méridienne en fibre de verre de Eames, tables en inox et voiles translucides pour structurer ce grand cube évidé. Au plafond un gigantesque tirage photographique reproduit une célèbre fresque de Michel-Ange. Bref, l’antidote provençal !

Les Massart déclinent leur goût pour la théâtralité à travers chacune des pièces et des recoins du hameau. Au pays des santons, minimalisme et grandes pointures du design du xxe siècle (Noguchi, Arne Jacobsen, Eero Saarinen, Mies van der Rohe, Garouste et Bonetti) sont la signature pour la moins atypique des lieux. Les superbes salles d’eau, situées à un vol de cigale du restaurant, jouent la sobriété extrême et privilégient la lumière naturelle. Le soleil s’engouffre ici par de grandes baies vitrées ou d’étroites impostes qui rappellent davantage le Bauhaus que Marcel Pagnol !

Si la mise en scène prévaut aux Andéols, c’est à la personnalité et aux trajectoires professionnelles peu communes des concepteurs qu’on la doit. Olivier Massart, dont le père dirigea la maison de couture Dior, a fait toute sa carrière dans le stylisme en créant il y a vingt ans  » la mode en images « , l’une des sociétés d’événementiels les plus réputées de Paris. Quant à sa femme, Patrizia, ancien mannequin et égérie du photographe italien Oliviero Toscani, elle dirige aujourd’hui une agence de casting.

Les Andéols, qui étaient au départ des maisons pour artistes en résidence, se transforment l’an passé en luxueuses maisons d’hôte. Chacune d’entre elles porte un nom et a une atmosphère chromatique distincte. La maison des cascades privilégie les teintes menthe, la maison de l’artiste, l’ambre et le bois, la maison des lointains, le noir et blanc, la maison des terrasses, le rouge et le bleu. Des atmosphères propres à chaque mas mais qui comportent néanmoins quelques constantes comme le recours systématique aux sols en résine, aux baignoires en ciment brut ou aux chaises  » Luis Luis  » de Pucci de Rossi, revisitant le style Louis XIV à coups de dossiers en Plexiglas et d’assises aluminium ! Ce refus de la standardisation n’est pas gratuit : la plupart des meubles que l’on rencontre aux Andéols proviennent des collections privées des propriétaires, au même titre que les photographies accrochées aux murs, des tirages originaux signés Cartier-Bresson, Araki, Helmut Newton ou Jeanloup Sieff…

Pour parfaire le cadre enchanteur, le couple ne pouvait ignorer l’aménagement des jardins qui se fondent dans le paysage environnant. Terrasses étagées et bassins privatifs se succèdent en cascade jusqu’à la piscine centrale à débordement ; le point de vue idéal pour savourer les projections de films qu’Olivier Massart compte organiser prochainement en dressant un écran géant sur la colline d’en face…

Antoine Moreno – Photos : Renaud Callebaut

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