Barbara Witkowska Journaliste

Tongs, semelles compensées ou talons vertigineux… On les chausse avec grâce pour marcher, danser et séduire. Tout l’été.

(*) Aux éditions Könemann, 1997.

Carnet d’adresses en page 91.

U ne semelle toute plate, équipée d’une bride en forme de Y. Peut-on imaginer plus simple pour vêtir ses pieds ? Cette chaussure minimaliste était déjà le must des vacanciers cool. La voilà qui gagne ses lettres de noblesse.

Décorée de pompons de soie, de cristaux Swarovski, de paillettes, de broderies, de sequins, de coquillages, de fleurs, la tong défile sur les podiums des créateurs les plus pointus, arpente sans complexe le macadam, parade dans des cocktails les plus chics de Paris, Londres ou New York.

Sa success story a commencé en Egypte, il y a plus de 5 000 ans.  » Les Egyptiens réalisaient des empreintes de leurs pieds dans le sable humide, y moulaient du papyrus tressé découpé aux bonnes dimensions, et fixaient sur ces semelles des lanières de cuir brut « , rapporte Linda O’Keeffe dans le livre  » Chaussures  » (*).

Au milieu du xxe siècle, grâce au développement du caoutchouc industriel, la tong se répand dans le monde entier. En vedette ? La Havaianas, produite en masse au Brésil : une simple semelle dotée d’une bride en caoutchouc naturel, souple et confortable, déclinée dans tous les coloris. Plus tard, elle sera détrônée par la  » basket « , interprétée de moult façons.

Avec la tendance zen des années 1990, puis le retour de la tendance hippie chic, la tong refait surface. Les créateurs la remettent au goût du jour, la  » relookent  » et en font un objet culte de l’été.

Les tongs bijoux

Jean-Paul Barriol, designer de la marque Accessoire, nous propose une démarche précieuse. Le modèle Soura, construit avec de fines lanières de cuir noir, appelées  » mignons « , s’orne de papillotes de raphia et de perles coquelicot. Les mignons interprètent aussi d’autres versions : ils sont reliés par un bouquet de pastilles de nacre (modèle Sourcil), décorés d’un médaillon dentellé argent (modèle Solari), animés de cabochons de verre rubis sertis dans une couronne de métal or (modèle Soupir) ou encore de larmes de verre composant une fleur (modèle Sphinx).

Chez Fratelli Rossetti, le pied, largement dénudé, est personnalisé par des grappes de perles, des branchages, des feuilles, des dentelles ou des tatouages stylisés. Les coloris sont sobres et classiques : du noir, du marron, du bronze.

La marque française Espace adopte, pour les tongs et les mules, le style métissé. Le thème Bombay Mix met en scène des semelles noires, munies d’un minuscule talon et ornées de motifs indiens rouges, juste pour le plaisir des yeux. Le pied est maintenu par deux lanières fantaisie, également rouges. Les thèmes Beach Girl et Orientales optent également pour le duo rouge et noir. En guise de décoration, des coquillages, pour le premier, des trou-trous, pour le second.

Toujours en avance d’une tendance, le créateur Robert Clergerie aime les lignes novatrices et futuristes. Design, le thème phare de la collection été 2003, joue avec une géométrie très sophistiquée. Les talons sont surprenants et les coloris forts : blanc optique, noir et rouge.

Douceur et confort : tel est le mot d’ordre chez Façonnable. Les tongs en veau velours bicolore soutiennent bien le pied grâce à une large bande, percée d’un £illet. La palette chromatique est également toute douce : bleu azur sur une semelle jaune citron, écru sur une semelle bleu azur ou rayures bayadère en dégradé de rose sur semelle bleue.

La logomania n’a pas dit son dernier mot. Chanel interprète admirablement le modèle le plus classique de la tong (la bride en Y), cuir noir irisé se mêle au tissu blanc, tandis que le nom de la maison, édité en plusieurs exemplaires, forme comme une dentelle tout au long de la bride.

Louis Vuitton joue la carte du sport chic. La tong Monogram de couleur moka est agrémentée d’un  » bijou  » symbolisant les valeurs de la maison. Les fleurs du Monogram associent l’émail et un fond métallique. Plus sport, la mule croisée est gansée de doubles surpiqûres. Le logo de la maison s’affiche en grand. Disponible en noir, rose et jaune.

Les semelles compensées féminissimes

Très fashion, elles aussi, des sandales sur des semelles compensées. Chez Christian Dior, elles se hissent sur des talons de 10 cm. Razor Lace, le modèle phare, s’habille de laçages sophistiquées et… d’une lame de rasoir en guise de pendentif. Disponible en cuir blanc ou en satin kaki. Très originale, la mule  » Haute Elastique « , juchée également sur un talon de 10 cm, est recouverte de tissu Punk, haut en couleur.

Stephane Kélian a dessiné des semelles costaudes et puissantes. Les lignes sont toutefois fluides et féminines. Comme décor, il y a de fines lanières, de grosses fleurs, des bandes en cuir tressé ou des boucles strassées. Le cuir ou le daim déclinent des coloris sombres, le noir, le bronze ou différentes tonalités de marron, très chaleureux.

Chez Armando Pollini, la féminité un brin nostalgique est à l’honneur avec des satins multicolores, des soies brillantes, des peaux souples de couleur métallisée, des tons vifs et des fantaisies ethniques. Nathalie Vrancken, la créatrice de la marque Here and Now, pour sa part, utilise le liège ou le cuir et joue avec les tressages, des lacets spaghetti et des touches ethniques. Et la marque française Lundi Bleu orne ces grosses semelles de motifs, élaborés façon macramé.

Les talons sensuellement vertigineux

Si la tong, la mule plate et les semelles confort (mais épaisses) peuvent parfois alourdir la jambe, d’autres modèles, très sexy, allongent et féminisent la silhouette. Chez Christian Dior, les sandales et les escarpins adoptent le talon de 8 cm. En toile kaki, en denim ou en cuir noir, les chaussures estivales affichent en abondance les symboles de la maison : laçages, bandes de cuir perforé, plaquettes de métal gravées du logo ou des badges fluo.

Chez Céline, les talons sont vertigineux. Une certaine rusticité des détails (cuir brut, clous et rivets) a été sublimée de façon à devenir le comble du glamour. Versace joue à fond la carte de l’exubérance. Les talons sont à la hausse, les couleurs se bousculent et s’entrechoquent, les détails rivalisent d’originalité et de fantaisie. Epoustouflant ? L’escarpin phare de la collection Maud Frizon. Le talon  » boule « , exclusivité de la marque, est en Altuglas façon cristal et mesure 6 cm. Version jour : toile de jean 100 % coton, version soir : satin 100 % soie, fuchsia ou noir.

Les babouches chics et les espadrilles surélevées

Les babouches, très acclamées l’année dernière,  » marchent  » moins bien cette saison. On les remarque encore chez e(x)it, où elles sont joliment brodées de perles de verre rouges et blanches. Lario 1898, lui, choisit le daim camel, orné d’un motif façon tatouage. Aujourd’hui très cotées, en revanche, les espadrilles surélevées. Chez Robert Clergerie, elles ont une semelle intérieure en tapisserie multicolore.

Barbara Witkowska

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