Barbara Witkowska Journaliste

Parmi les derniers lancements, des crèmes de soin et mêmes des lignes complètes affichent des prix « pur luxe ». Phénomène éphémère ou tendance de fond ? L’enquête de Weekend.

En 1999, la marque Sisley crée l’événement en lançant Sisleya, un soin anti-âge global, à 7 500 F le pot de 50 ml. Précédée par une campagne publicitaire mondiale et fracassante, la crème bat tous les records de vente.  » En cinq mois, nous avons réalisé avec Sisleya plus de volume qu’avec Hydra Flash visage en un an sur le monde « , déclare Anne-Marie Faure, directrice marketing de la marque.

Depuis lors, les prix s’emballent. La Prairie propose Caviar Luxe (11 000 F le pot), Guerlain lance une cure de huit semaines dont le coût s’élève à 14 400 F. La crème des crèmes ? La voici. Baptisée en toute simplicité  » La crème « , elle coûte 18 280 F et a été concoctée par Clé de Peau Beauté (Shiseido). Les consommatrices craquent. Pourquoi ? Parce que les femmes, sans croire au miracle,  » savent qu’elles n’ont qu’une seule peau et veulent s’offrir le top « . Dans les parfumeries, les spécialistes  » sur le terrain « , sont formels : la motivation des clientes repose sur la notion de  » luxe choisi  » et de plaisir pour soi.  » On n’a le bien que l’on se fait  » ou encore  » quand on (s)’aime, on ne compte pas « … Les célèbres dictons se vérifient une fois de plus.

Il est vrai, aussi, que le terme  » luxe  » est devenu une notion un peu galvaudée. On a écrit des romans sur le luxe qui  » descend dans la rue « , le luxe  » à la portée de tous « . Or le luxe n’est absolument pas démocratique. Si l’on revendique, aujourd’hui, le statut de produit de luxe, il faut placer la barre un peu plus haut. Plus de recherche, plus d’innovations, des ingrédients vraiment très rares, une communication somptueuse qui cultive l’imaginaire et… des prix à l’avenant qui justifient l’exclusivité. Cela dit, il est vrai que les textures de ces soins de luxe sont d’une sensualité exceptionnelle. Les pots, de petits bijoux, flattent agréablement la rétine. Enfin, le plaisir d’application est tel que le moral, du coup, est lifté, lui aussi.

Marque à part entière du groupe japonais Shiseido, Clé de Peau Beauté, fraîchement débarquée en Belgique, revendique le titre de  » haute couture  » de la cosmétique.  » Cette ligne est le fruit des découvertes technologiques les plus pointues, explique Chris Melsen, training manager chez Shiseido Belgique. C’est cette recherche de très haut niveau qui intervient dans le prix. Faisons un parallèle avec les recherches dans l’industrie automobile. Toutes les innovations appliquées dans les voitures de formule 1 sont très onéreuses. Elles se retrouveront, quelques années plus tard, seulement, dans les voitures de série. « 

La spécificité de Clé de Peau Beauté ? La formule agit sur le rythme naturel de la peau et sur les neuf enzymes clés (d’où son nom). Objectif ? Redonner à la peau sa vigueur et sa santé, lui offrir plus de résistance et de vitalité. En effet, la peau fonctionne selon un rythme. Les agressions extérieures, mais aussi les agressions intérieures, telles le stress émotionnel, par exemple, peuvent bouleverser ce rythme. Que se passe-t-il alors ? Les enzymes, susceptibles de maintenir la peau en équilibre et en bonne santé, agissent de façon désordonnée. Certains s’emballent, deviennent hyperactifs, d’autres, en revanche, présentent des signes de fatigue et agissent au ralenti.  » Les chercheurs Shiseido ont donc réuni des ingrédients très performants qui inhibent les enzymes hyperactifs et activent les enzymes « fatigués », poursuit Chris Melsen. Prenons un seul exemple, celui de L-Sérine. Cet acide aminé, facteur dominant de nos facteurs naturels d’hydratation, exerce deux actions. Au niveau de la couche cornée, il active l’enzyme Trypsin. En effet, lorsque l’action de cet enzyme se ralentit, le teint a un aspect terne. De plus, au niveau de l’épiderme, L-Sérine active l’enzyme Glutamate Dehydrogenase. La peau retrouvera plus de force et de vitalité. L’ensemble des ingrédients, en rééquilibrant le rythme naturel de la peau, exerce une action vraiment spectaculaire sur la fermeté, les rides et la déshydratation. « 

Chez Dior, la nouvelle ligne de soins unit luxe, nature et beauté.  » Nous travaillons beaucoup avec les bureaux de tendances, explique Leila Rochet, directrice marketing soins chez Parfums Christian Dior, à Paris. Lorsque nous avons appris que le retour du luxe se profilait à l’horizon, nous avons décidé de prendre le train en marche, car le luxe fait partie de notre héritage. Notre objectif ? Formuler la crème la plus performante qui soit, sans tenir compte de son prix. Au même moment, nos laboratoires ont pris connaissance d’un actif exceptionnel et très exclusif, le nectar de kniphofia, mis en évidence par un chercheur de l’INRA, Institut national de recherches agroalimentaires. Il s’agit du nectar d’une plante de Madagascar, recueilli à la main, à six heures du matin.  » La maison Dior met alors sur pied une culture biologique de kniphofia, dans le sud de la France. Au départ, une seule crème de soin est au programme. Les premiers tests auprès des consommatrices se révèlent, toutefois, tellement positif, qu’on décide de lancer une ligne complète,  » pour permettre aux femmes d’entrer dans cet univers holistique « .  » Tous les produits comportent un maximum d’actifs d’excellente qualité, souligne Leila Rochet. Ils contribuent réellement à la revitalisation de la peau. La texture, travaillée de façon artisanale, est exceptionnelle. Nous avons confié le parfumage à Edouard Fléchier, un véritable  » nez « . Le pot est ciselé comme un bijou. Idéale pour les femmes de 50 ans, la crème de soin convient également aux femmes à partir de 30 ans qui ont besoin de revitaliser leur peau et qui apprécient le confort. « 

Guerlain propose, lui, une cure de luxe. Des mini-flaconnettes à utiliser pendant huit semaines promettent de  » suspendre les effets du temps « . Le secret ? Un rétinol  » nouvelle génération « , très bien toléré, parfaitement stabilisé et… très cher. L’autre ingrédient précieux, donc onéreux? L’Or Bleu, l’un des composants clés de la ligne Issima. Il s’agit d’un alliage d’or pur et d’une huile précieuse issue de la mer qui donne un éclat incomparable à la peau.  » On tire le bénéfice de toutes les qualités du rétinol, mais en sécurité et en douceur, précise Lieve Bosmans, formatrice chez Guerlain Belux. La cure se déroule en trois phases. La première, qui dure une semaine, prépare la peau avec le palmitate (dérivé de vitamine A). Puis, pendant trois semaines, on applique, uniquement le soir, des flaconnettes contenant du rétinol faiblement concentré. Le taux de concentration sera plus élevé dans la dernière phase, entre la quatrième et la huitième semaine de la cure. Parallèlement, à partir de la deuxième semaine, on applique, deux fois par semaine, un patch sur le contour des yeux. Il contient le palmitate de vitamine A. Au terme de la cure, le résultat est vraiment spectaculaire. La peau est très lumineuse, le grain de peau affiné et les taches pigmentaires atténuées.  » On se retrouve, donc, avec une peau  » neuve  » et très fine, ce qui demande toutefois quelques précautions. A partir de la phase 2, une protection stricte de la peau (on conseille IP 30), est indispensable. Les expositions au soleil étant, bien entendu, déconseillées, la cure doit se terminer un mois avant le départ en vacances. Ou alors, elle sera effectuée au retour.

Barbara Witkowska

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