De plus en plus d’éditeurs s’intéressent à la mode et au design version kids. Un ton décalé, des photos stylées, une actu en plein boom : les magazines lifestyle XXS se forgent un caractère bien trempé.

Ici, une fillette, n£ud rose dans les cheveux et veste moutarde, mordille ses doigts sur les genoux de sa maman en microjupe. Là, un petit mec, look denim et doudoune sans manches, plonge son regard noisette dans celui des lecteurs. Sur notre Une, cette semaine, c’est Noah qui s’impose, immobile sous son chapeau géant signé Elvis Pompilio. Dans les rayons des librairies, les covers de magazines lifestyle branchés où trônent de craquants minois de gosses se multiplient. Vogue, Marie Claire, L’Officiel… Toutes ces références modeuses ont désormais leurs éditions estampillées  » Enfant « . Quant au Vif Weekend, présent depuis toujours dans le secteur, il propose, dès 2011, non plus un mais deux numéros par an dédiés aux plus jeunes, en janvier et en août. En parallèle, certaines revues complètement tournées vers l’univers des plus petits, comme Doolittle et Milk en France, ont vu le jour ces dernières années et deviennent de véritables références dans le secteur. Et cette invasion de juniors n’est pas près de s’arrêter. Notre pays verra arriver, d’ici à mars prochain, une édition belge de Milk, en français et néerlandais. Et Marie Claire Enfants, lancé au printemps 2010, est désormais publié en version italienne, turque… En attendant de possibles moutures britannique et chinoise !

Le succès grandissant de ces médias extrasmall est sans aucun doute à attribuer au développement sans précédent que connaît la mode enfantine ces dernières années.  » Dépenser pour ses enfants en période de crise paraît beaucoup moins culpabilisant pour les parents qui veulent toujours leur faire plaisir. Ce qui explique que la plupart des griffes de luxe présentent aujourd’hui leur propre collection pour les petits, rappelle Anne-Charlotte Vermynck, directrice de rédaction chez Doolittle. Nous sommes un relais d’information pour toutes ces marques.  »

Ce développement médiatique s’inscrit également, plus globalement, dans une logique d’évolution du marché de la presse féminine.  » Dans les années 80, les revues généralistes ont vu leur diffusion plafonner, se souvient Jean-Marie Charon, sociologue au CNRS et spécialiste du domaine. Les éditeurs ont alors relancé leurs activités soit en s’internationalisant – c’est ainsi que sont nées des éditions étrangères de ces magazines, notamment dans les pays émergents -, soit en mettant en avant certaines de leurs thématiques – beauté, déco, cuisine, famille… – et en leur dédiant des titres à part entière. « 

Ces marchés de niche, comme on les appelle, permettent de développer des stratégies de marketing bien spécifiques… et donc lucratives.  » Ce sont des périodiques qui ont des diffusions peu importantes, puisqu’ils sont plus spécialisés, mais qui apportent aux annonceurs la garantie d’une audience ciblée et réceptive par rapport au type de produit dont ils veulent faire la publicité, continue Jean-Marie Charon. On se détache ici complètement de la logique de mass media qui consiste à vendre de l’audience à la tonne sans pouvoir la qualifier. Ici, la qualité du lectorat l’emporte sur la quantité. « 

UNE IDENTITÉ FORTE

Proches de la presse féminine, ces médias d’un nouveau genre se cherchent néanmoins un style bien spécifique.  » Nous devons trouver notre propre identité, c’est là toute la difficulté pour une presse en pleine expansion qui doit imposer ses codes, analyse Aude Bunetel, rédactrice en chef de Milk. C’est pourquoi nous avons développé un ton et une écriture photographique très personnels.  » S’adressant à un public souvent aisé, cultivé et à la recherche d’une information pointue et bien présentée, ces magazines travaillent donc leur esthétique, à l’image de Kid’s Wear qui, avec sa couverture cartonnée, ses pages mates et ses photos artistiques n’est pas sans rappeler le fameux magazine lifestyle Wallpaper*. Précurseur en matière de mode Enfant – il fut fondé en 1995 ! -, Kid’s Wear est désormais publié en trois langues (anglais, allemand et italien) et se revendique comme véritable référence dans le secteur. Deux fois par an, pour chaque nouvelle saison de mode, les plus grands photographes de la planète et de nombreux artistes et auteurs y apportent leur contribution personnelle pour former au final une véritable bible arty. Bien loin de la presse parentale pratico-pratique, la nouvelle presse Kids s’affiche donc comme avant-gardiste et pointue… Qui aurait pensé qu’un jour il serait vraiment tendance de parler layette et biberons ?

PAR FANNY BOUVRY

« La nouvelle presse Kids s’affiche avant-gardiste et pointue. »

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