Mélangeant allègrement le futurisme et la nostalgie, la  » rétromodernité  » s’abat de plus en plus sur les objets du quotidien et nos habitudes de vie.

Retrouvez Frédéric Brébant chaque lundi matin, vers 9 h 45, dans l’émission  » Bonjour quand même « , de Jean-Pierre Hautier, sur La Première (RTBF radio).

F aites l’expérience : sur Internet, au c£ur de l’incontournable moteur de recherche www.google.com, tapez en anglais  » phones of the future  » (traduction :  » les téléphones du futur « ). Ironie du sort : le tout premier site épinglé par Google est celui de www.pokia.com. Bizarre, bizarre : le nom ressemble à une marque finlandaise très connue. Allez-y, cliquez ! Et alors, ce n’est pas beau, tout ça ? Pour ceux qui n’ont pas l’image, l’adresse en question exhibe une série d’engins hybrides qui mixent audacieusement la téléphonie de papa aux GSM dernier cri. En clair : un cornet en porcelaine des années 1930, un combiné en Bakélite des années 1950 et un récepteur en plastique des années 1970 respectivement branchés sur les derniers joujoux technologiques signés Samsung, Siemens et Sony Ericsson. A priori, on pourrait croire à une vaste blague bidouillée par un gentil farfelu, mais à y regarder de plus près, les étranges appareils n’ont pas été  » photoshopisés  » et font même l’objet d’un engouement frémissant outre-Atlantique. L’air de rien, un Pokia a même récemment montré le bout de son cornet lors des derniers MTV Awards américains (l’artiste Fonzworth Bentley n’a en effet pas résisté à la tentation) et, depuis, on en trouve régulièrement sur le plus célèbre des sites d’enchères www.ebay.com (et même parfois dans sa version française www.ebay.fr). L’intérêt du Pokia ? Nullement pratique puisque le concept encombre finalement l’usager ! Alors, pourquoi donc s’amuser à connecter un combiné  » ancienne génération  » sur un mini-téléphone portable ? La réponse est précisément dans la question : l’amusement ; pour la beauté du geste et l’étonnement des foules. Mais au-delà du sourire que génère forcément ce genre de décalage technologique, il faut toutefois prendre en considération un autre phénomène de société pour expliquer le succès soudain de ce nouveau gadget à la mode : la  » newstalgia «  comme le disent si bien certains observateurs anglophones. Bien sûr, le terme est intraduisible en français, mais chacun aura compris qu’il mélange audacieusement les notions de nouveauté et de nostalgie. En clair : on a toujours soif d’invention révolutionnaire sans renier, pour autant, le charme du bon vieux temps. De cette alchimie sans doute paradoxale émerge finalement l’envie d’un passé réactualisé à coups de créations curieuses et de rééditions audacieuses. Bref, cette tendance  » newstalgique  » est bel et bien dans l’air du temps, portée par la vague du vintage (ressuscité il y a quelques années déjà) et de tous ces vieux modèles de sacs, de baskets et de tee-shirts que l’on ressort massivement dans des versions flambant neuves. Idem pour les voitures (voyez le succès de la  » nouvelle  » Mini). Idem pour les chansons (regardez la Star Ac et ses reprises incessantes). Idem pour les soirées (ce 23 octobre, il y a encore une super  » Gloubi Boulga Night  » avec Casimir en personne au Cirque royal de Bruxelles). Idem pour la vraie musique puisque, depuis peu, les bonnes vieilles platines améliorées refont surface dans les salons des mélomanes alors qu’elles n’étaient plus que l’apanage exclusif des DJ esseulés.  » Il n’y a de nouveau que ce qui est oublié « , a dit un jour la styliste personnelle de la reine Marie-Antoinette. Autant s’en souvenir, sans en perdre la tête…

Frédéric Brébant

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