Temps libres

Filip Arickx © JEF BOES

A côté de la mode, qui les occupe au quotidien, ces créateurs et entrepreneurs vivent une autre passion, parfois surprenante et à cent lieues de leur cadre professionnel. De quoi nourrir tant le corps que l’esprit.

 » J’apprécie cette manière d’apprendre, sans échéances ou stress.  » Filip Arickx, créateur chez A.F. Vandevorst Sa passion : souffleur de verre

 » Tout a commencé avec une formation en apiculture qu’An ( NDLR : An Vandevorst) a suivie il y a quelque temps. Pour plaisanter, j’ai proposé de faire des pots de miel. Mais l’an passé, quand j’ai visité l’institut des arts et métiers de Malines, j’ai été séduit. L’ambiance dans l’atelier, les fours, la fragilité du verre, sa transparence et sa brillance, l’infinité des possibilités… Un vrai coup de foudre.

J’étais attiré par l’idée de repartir de zéro avec une matière imprévisible. En tant que créateur, l’inspiration me vient peut-être plus rapidement, mais cela ne veut pas dire que je maîtrise cette masse fluide et chauffée au rouge.

En céramique, on peut utiliser ses mains. Avec le verre liquide par contre, on est complètement dépendant de la fêle ( NDLR : la canne utilisée), de notre souffle et de nos mouvements de rotation. Ce sera un travail de longue haleine : une formation complète dure sept ans, et ce n’est qu’un début.

Pour l’instant, la plupart de mes tentatives se transforment en échecs, mais je m’amuse beaucoup. Je n’abandonne pas. Je me persuade que la prochaine fois sera la bonne et je cherche une nouvelle approche : rien à voir avec la norme selon laquelle toutes nos actions doivent être immédiatement rentables. Dans cette activité, il faut attendre de maîtriser parfaitement la technique pour commencer à obtenir des résultats. Une petite erreur et l’objet se brise. J’apprécie énormément cette manière d’apprendre, sans échéances ou stress. C’est très libérateur. Plus je m’y adonne, plus je rêve que cela devienne un jour plus qu’un loisir. Au marché ou chez Brico, je me surprends à analyser les luminaires. Je pense que je suis accro ( rires).  »

Christian Wijnants
Christian Wijnants© JEF BOES

afvandevorst.be, ikamechelen.be

 » Une activité physique me permet de penser clairement.  » Christian Wijnants, créateur Sa passion : le fitness

 » J’ai toujours eu besoin de faire du sport pour me détendre. Je n’étais pas un enfant turbulent, mais il fallait que je me dépense en nageant, en jouant au tennis ou en faisant de la gymnastique. A 18 ans, mes études et ma propre marque de mode sont devenues mes priorités, et je n’ai repris une activité physique que dix ans plus tard. Le yoga, les rollers ou le trampoline me permettent d’être plus serein au travail, et de penser clairement.

Depuis une dizaine d’années, je vais à la salle trois fois par semaine, de préférence en couple ou entre amis. Je n’aime pas la compétition, mais ensemble, c’est plus motivant. Je n’ai pas envie d’avoir les plus gros biceps ou les abdos les plus saillants. Cependant, quand je croise mon reflet dans le miroir et que je vois que je ne fais pas tous ces efforts pour rien, ça me motive. Le plus important, c’est l’aspect mental. Même pendant les périodes chargées, comme les Fashion Weeks, j’essaie de continuer. Sinon, le stress s’accumule, et tout se complique.

Par contre, le fitness doit rester un loisir. Je ne m’impose donc pas de programme d’entraînement strict avec des jours pour les jambes et d’autres pour le haut du corps, j’ai déjà bien assez de pression et d’obligations dans ma vie professionnelle.  »

christianwijnants.com

 » Les chansons ressemblent à des vêtements.  » Sarah De Saint Hubert, créatrice Sa passion : chanter, dans le groupe Her Wild Love

 » Vers 25 ans, j’ai eu besoin de faire une pause. J’avais atterri à l’Académie de mode d’Anvers à 17 ans, puis j’avais immédiatement plongé dans la réalité du job, chez Givenchy, Alberta Ferretti et Ann Demeulemeester. Je devais prendre le temps de réfléchir. Je voulais aussi profiter de cette période pour me remettre à la guitare avec un professeur privé. Mais ça n’a pas vraiment fonctionné : Rafael ( NDLR : Rafael Van Mulders) et moi sommes tombés amoureux, et j’ai arrêté les cours (rires). Il m’a suggéré de commencer à chanter, ce que je faisais déjà pour moi. Très vite, nous avons fondé un groupe.

Sarah De Saint Hubert
Sarah De Saint Hubert© JEF BOES

Dix ans de théâtre m’ont aidée à être à l’aise sur scène. Je ne sais pas lire une partition, mais cela me permet de me sentir libre. En mode, je ne peux plus débrancher mes neurones, tandis que quand je chante, je travaille uniquement autour des sensations, en interaction avec Raf. Il joue de la guitare, du piano et de la batterie ; j’écris les paroles en anglais et la mélodie.

Pour moi, les chansons ressemblent à des vêtements : je les imagine dans ma tête, et tout comme mes collections, elles racontent une histoire très personnelle. En outre, nous aimons tous deux le rock et la musique folk des années 60 et 70 et nous essayons de rendre la musique la plus authentique possible, avec des instruments de l’époque.

Quand nous avons le temps, nous jouons dans des petites salles ou des cafés, mais ce n’est pas évident. L’été dernier, nous avons passé un peu de temps en studio, et notre playlist sera bientôt disponible sur Spotify. Nous mettons également en musique les vidéos de mes collections. Cela reste toutefois une passion, et nous ne faisons que ce dont nous avons envie. La musique est un plaisir pour nous, et doit le rester.  »

sarahdesainthubert.be

 » Le plaisir me vient de la simplicité de cette tâche.  » Anne Chapelle, CEO du groupe de mode BVBA 32 Sa passion : les confitures

 » Etudiante en kot, je n’avais pas des habitudes alimentaires très saines, mais je commençais toujours mes journées avec une tartine à la confiture. Chez moi, ma mère et ma grand-mère faisaient leurs propres pots, une pratique assez courante dans le Limbourg, avec tous les fruits qu’on y cultive. D’autant plus qu’à l’époque, le saumurage, la fermentation, la conservation et la mise en bocaux étaient des pratiques répandues. Nous étions huit enfants à la maison et il nous fallait assez de vivres pour passer l’hiver. C’est ainsi que je suis tombée amoureuse de la confiture. Surtout en regardant ma maman, qui n’était pas très bavarde, la préparer.

Depuis, j’en fais tellement que cette passion s’est intégrée dans mon rythme annuel. Dès que le printemps se pointe, je commence à chercher des fruits, et quand mai arrive, plus rien ne m’arrête. Je vais au marché le dimanche matin pour acheter des fruits et légumes, un rituel précieux, et mes pots se remplissent de semaine en semaine. Mes préférées sont celles aux abricots ou à la framboise, pour leur petit goût acidulé. L’hiver, par contre, j’arrête car les fruits perdent leur saveur et, comme pour les fleurs, je ne veux pas acheter de produits ayant traversé la moitié du globe.

Le souvenir de mes aïeules joue sûrement un rôle dans cette passion, mais le plaisir me vient aussi de la simplicité de cette tâche et de son caractère familial. En créant quelque chose, peu importe la difficulté, vous ne pensez plus à rien et tous vos soucis professionnels disparaissent. Et comme je peux savourer le résultat immédiatement, c’est le paradis sur terre. Dans mes rêves les plus fous, je me lance dans une fabrique de confitures traditionnelles. Ce sera pour après ma retraite, mais j’aime déjà l’idée – les rêves nous font vivre !  »

 » L’essentiel est que nous fassions quelque chose avec des amis.  » Jan et Patrick Olyslager, fondateurs de la marque Howlin’ Leur passion : la radio et les platines

 » Avec mon frère, nous sommes passionnés de musique, explique Patrick Olyslager. Nous collectionnons les disques depuis nos 14 ans, lorsque nous avons mis les pieds pour la première fois chez USA Import. A l’époque, c’était the place to be pour l’électro, à Anvers. Après, j’ai travaillé des années pour une ASBL qui gère le festival Muziekclub Petrol et des événements tels que le 10 Days Off. Et aujourd’hui, la musique reste une source d’inspiration majeure pour les collections de Howlin’.

Nous limiter à la mode nous aurait rendus malheureux. Il y a quelques années, nous nous sommes donc associés avec d’autres passionnés et, en 2018, nous avons créé ensemble la station radio en ligne We Are Various, une plate-forme accessible à tous les artistes et DJ intéressés. Alors que ce type de chaîne se concentre principalement sur la dance, nous accueillons tous les genres, du folk au jazz en passant par le rap ou la musique d’ambiance. Nous cherchons également à nous diversifier lorsque nous interviewons des DJ ou des artistes. Nous avons ainsi reçu Mauro Pawlowski ou Bent Van Looy, mais aussi le poète Andy Fierens.

Avec Jan, nous créons des sets sous le nom de Howlin Soundsystem, mais c’est là l’unique référence à notre marque. L’essentiel est que nous fassions quelque chose avec des amis que nous apprécions, et que nous puissions le partager avec d’autres. D’où notre collaboration avec le Pixelcafé du FotoMuseum, à Anvers, où les visiteurs peuvent regarder nos émissions en direct et où nous organisons régulièrement des événements. Depuis un grenier, il est possible de créer une communauté d’amateurs de musique en ligne, mais c’est encore plus amusant de vraiment rassembler les gens.  »

wearevarious.com

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Anne Chapelle
Anne Chapelle© JEF BOES
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Jan et Patrick Olyslager
Jan et Patrick Olyslager© JEF BOES

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