Une véritable féerie ! Maître dans l’art de recevoir, le décorateur et scénographe français Philippe Renaud a habillé un appartement classique d’une pincée de couleurs vives, d’un zeste de miroir, d’un soupçon d’exotisme et de douces lumières. Que la fête commence…

Un lieu blanc mais pas neutre : quatre mètres de hauteur sous plafond, un parquet ancien en chêne, des proportions et un esprit xviiie siècle, à Paris. Un écrin immaculé, idéal pour imaginer un décor. En réalité, il s’agit de l’appartement Massant, dans lequel ce fabricant de copies d’ancien expose ses meubles au public un jour par semaine. L’endroit est historique, le terrain celui de l’ancien collège de Navarre. Loti sous Louis XIII, il abrita l’hôtel de La Veuville, du nom du surintendant des finances du roi. Au xviiie siècle, sous ses lambris, les conversations restent animées car devenu salon de la Correspondance générale pour les Sciences et les Arts, il est le lieu de rendez-vous des savants, artistes et amateurs d’art de nombreux pays.

Le mobilier, aujourd’hui hétéroclite, prouve que le mélange des styles peut être merveilleux. Tapissé en général de tissu blanc, ce sont ses lignes qui, seules, se détachent et dessinent leurs courbes gracieuses dans l’espace. Pourtant, çà et là, un coussin, une assise, un dos, sont recouverts d’une étoffe originale, en général des morceaux destinés à la haute couture que Philippe Renaud sait dénicher, ou de patchworks indiens rapportés de voyages. Dans l’entrée, qui fait office de premier petit salon, la soie à grosses taches roses vif, sur la bergère

Louis XVI, est parfaite. En écho, sur le mur, des gros pois roses lui répondent. Sous la girandole à pampilles, des photophores en verre mercurisé, couleur rose à l’intérieur, multiplient l’effet de brillance. Enfin, d’imposants miroirs, posés à même le sol, sans cadre en bas, donnent l’impression d’une ouverture dans le mur. Un joli trucage qui permet de doubler l’espace…

Dans le grand salon, le champagne attend les invités, mais en bouteilles individuelles rose pétard, c’est plus gai. Roses toujours, les piles de macarons à la framboise et à la rose. Baigné d’une lumière douce, un bouddha au collier de fleurs vives est entouré de grosses bougies et de bâtons d’encens. Des masques africains dialoguent entre eux sur une table cabaret Louis XV ; des sculptures de Timor, impassibles sur la cheminée, sont éclairées par des photophores mercurisés à l’intérieur orange fluo, tandis que le canapé rococo s’est enveloppé d’un patchwork géométrique. Métissage savant, toujours sur fond blanc.

Plus tard, on dînera dans la salle à manger, où la table sombre et l’armoire de mariage chinoise noire imposent leur silhouette massive. Le lustre, une £uvre arachnéenne en fil de fer de Marie Christophe, est à peine suggéré, si léger, si poétique, juste là pour sa beauté. L’éclairage se fera aux bougies. Le noir des sets et des assiettes, rehaussé de contrepoints orange, donnent à l’ensemble une touche éclatante.

De l’orange encore dans le dernier salon où l’on sert le café. Le tabouret Cyrano de Bergerac, une réédition Massant pour la Comédie-Française, trône dans la pièce. À côté, le guéridon à deux plateaux propose ses douceurs. Au fond de la pièce, une méridienne recouverte de différents tissus marron, noirs et blancs, amusant mélange de pois et de carreaux, tend ses bras. Il fait bon s’y pelotonner…

Carnet d’adresses en page 116.

Gilles Dallière et Aude de la Conté Photos : Francis Amiand

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