A quelques jours de l’inauguration de l’Expo universelle de Milan, Le Vif Weekend a palpé l’atmosphère d’une ville plus que jamais ancrée dans le XXIe siècle. Un peu de Hollywood, un soupçon d’histoire et beaucoup de vitalité, le tout porté par des projets prometteurs.

Depuis plusieurs années, la ville est en effervescence. S’apprêtant à accueillir des milliers de visiteurs et enthousiaste à l’idée de transformer son Expo universelle en réussite totale, Milan n’a pas hésité à s’attaquer à quelques gros chantiers, travaillant d’arrache-pied pour bâtir de nouveaux gratte-ciel, embellir ses parcs, ajouter des lignes de métro ou mettre en lumière des boutiques inédites. Même son fameux Dôme, symbole de la capitale lombarde et troisième plus grande église de la planète, a bénéficié d’une petite cure de rajeunissement.

A côté de cela, Milan se découvre toujours de la même manière : en se promenant à travers ses trésors et ses quartiers où le temps semble s’être arrêté. A gauche, un palais antique. A droite, des néons publicitaires roses des années 50 qui côtoient des restaurants dont le charme est intact depuis des décennies : un décor en formica, avec une souriante  » nonna  » à la caisse, son petit-fils en chemise et noeud papillon, la carte sous le bras. Dans ce Milan-là, seules les enseignes nommées Armani, Versace ou Prada semblent d’un autre âge, même si elles ont réussi à trouver leur place dans le paysage…

La ville abrite des endroits fascinants par dizaines. Parmi ceux-ci, le jardin botanique de Brera, créé en 1777 pour favoriser l’enseignement de la botanique pharmaceutique. Paradis de verdure s’étendant sur quelque 5 000 m2, il dévoile des plantes, des arbres (dont deux des plus anciens Ginkgo biloba d’Europe), des allées fleuries et des zones en friche où l’on peut flâner de longs moments. Le lieu se cache au bout d’une ruelle, juste derrière la Pinacothèque où se concentre toute la splendeur de l’art italien, entre les murs d’un ancien couvent.

Plus loin, il faut visiter les ateliers des pionniers du design, Achille Castiglioni (27, Piazza Castello) et Vico Magistretti (20, Via Conservatorio), désormais convertis en petits musées remplis de croquis ou d’outils. Quant au quartier résidentiel portant le joli nom de Quadrilatero del Silenzio, qui se trouve à un jet de pierre du centre-ville, il régale de villas et de tours d’habitations de style Liberty. Sa demeure la plus célèbre est la Villa Necchi Campiglio, imaginée par l’architecte Piero Portaluppi et également transformée en musée. En 2009, elle servait de décor au film Amore, où la comédienne Tilda Swinton découvrait la passion en la personne du cuisinier engagé par son riche père. Ici, l’Art déco rencontre Hollywood : immenses salles de bains, structures vitrées formant de beaux jardins d’hiver et piscine à ciel ouvert où l’on imagine Rita Hayworth en train de siroter un cocktail…

A quelques pas de là, l’imposant Palazzo Serbelloni, de style néoclassique, a servi de demeure à Napoléon et à Joséphine en 1796. Son magnifique hall principal mérite à lui seul le coup d’oeil. Pas étonnant que l’endroit soit loué pour des événements prestigieux ou emprunté pour les incontournables défilés milanais (dont Moschino, l’année dernière). En quittant le quartier par la Via Cappuccini, le promeneur s’étonnera probablement de tomber nez-à-nez avec les… flamants roses occupant la cour de la Villa Invernizzi. Puis il ira peut-être se mettre en quête de plaisirs incontournables : ceux qui garnissent les boutiques de luxe de la Via della Spiga et de la Via Montenapoleone.

LES CHANTIERS DE LA GLOIRE

Si Milan, à quelques exceptions près, prend soin de son patrimoine historique, c’est aujourd’hui l’avenir qu’elle construit. L’Exposition universelle, qui ouvrira ses portes ce 1er mai et se clôturera le 31 octobre prochain, constitue une étape décisive de son développement. L’événement prend ses quartiers au nord-est de la cité, à environ 15 kilomètres du centre, et le complexe a balayé celui qui avait servi de décor à l’Expo de 1906. Des bâtiments modernes y côtoient des pavillons écologiques et des oeuvres architecturales qui devraient marquer les esprits. Milan sait à quel point un tel déploiement laisse des traces d’envergure dans le paysage (l’Atomium ou la Tour Eiffel en sont témoins…). Et ce n’est pas parce que le site a été pensé comme une vaste cité… romaine qu’il a négligé le futur : dès la fin de l’Expo, un parc devrait prendre le relais sur ce site de 110 hectares.

Toujours au nord de Milan, le projet Citylife s’apprête aussi à transformer le visage de la ville. Des stars internationales de l’architecture, à savoir Zaha Hadid, Daniel Libeskind et Arata Isozaki, y font pousser trois gratte-ciel qui serviront de repères à une sorte de mini-ville dans la ville. Au programme : des logements, bien sûr, mais aussi un musée d’art contemporain, des espaces boisés, des pistes cyclables, un amphithéâtre, des restos, des bars et un centre commercial, qui prendront place dans l’une des zones  » sans voiture  » les plus grandes d’Europe.

La revitalisation urbaine est clairement l’un des enjeux de Milan. D’autres preuves sont à observer du côté de la Porta Nuova, où les piétonniers et les tours modifient chaque jour un peu plus l’horizon. L’Unicredit Tower, dessinée par Cesar Pelli, est l’un des symboles de ce nouveau souffle : ses 231 mètres de hauteur et ses formes arrondies ne sont pas sans évoquer les constructions de Dubai. Non loin, la Via Vincenzo Cappeli a vu récemment ouvrir de nouvelles enseignes, dont Les Hommes et Maison Margiela, ainsi que l’impressionnant projet baptisé Bosco Verticale de Stefano Boeri, soit deux immeubles dont les terrasses intègrent 900 arbres. Si la Tour Pirelli reste la plus élégante du coin, il ne faut pas quitter le lieu sans avoir apprécié la vue époustouflante offerte par le Palazzo Lombardia, qui projette aussi bien son ombre sur le quartier d’affaires inachevé Centro Direzionale que sur les gares de Milano Centrale et de Porta Garibaldi. Le sommet parfait pour observer Milan dans toute sa frénésie, aussi bien humaine qu’architecturale…

PAR JESSE BROUNS ET NICOLAS BALMET

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