Faites le test : à peu près aussi systématiquement qu’un homme évoque sa mère durant le premier quart d’heure passé sur le divan d’un psy, un jeune père causera nuits sans sommeil, régurgitations et pleurs stridents dans les 5 minutes qui suivront la question  » alors, ce nouveau bébé ? « . Bien sûr, la poignée de secondes précédant ce cri du c£ur en forme de catharsis aura été consacrée à vanter les incommensurables qualités du petit être qui illumine désormais les jours du flambant neuf papa : la désexualisation des rôles et l’amour paternel revendiqué sont passés par là. Si bien qu’aujourd’hui, même si leur participation à l’éducation des enfants reste sélective – selon le magazine Parents, ils ne seraient que 27 % à se lever la nuit pour consoler leur rejeton, mais un sur deux contribue à part égale au changement des couches- culottes – les pères trimballent leur porte-bébé en simili-jeans et crapahutent leur poussette high-tech avec un plaisir non feint.

La satisfaction virile qu’éprouvent les plus investis d’entre eux à customiser leur Bugaboo n’est d’ailleurs pas sans rappeler celle de leur paternel au moment de choisir les options de leur Renault Fuego ou de leur Peugeot 404, il y a trente ou quarante ans. Quelques décennies qui, à l’échelle du schéma familial, nous renvoient au paléolithique ou à peu près. Car, on ne le répètera jamais assez, en 2012, dans les moments de joie comme dans les épisodes plus grinçants liés à la progéniture, l’homme est (presque) devenu une femme comme les autres – les doléances sur les nuits trop courtes et les maladies infantiles étant d’ailleurs un gimmick partagé avec les jeunes mamans.

Ce qui veut dire, messieurs les papas tout frais émoulus, que vous n’êtes pas au bout de vos peines. Parce qu’en toute logique votre petiot deviendra grand. Or, martèlent Pierre Antilogus et Jean-Louis Festjens dans leur Guide du toujours jeune père (éd. Michel Lafon)  » d’un point de vue scientifique, l’adolescent présente la particularité de ne plus être un enfant sans pour autant être un adulte, c’est-à-dire qu’il cumule les défauts des uns et des autres sans en avoir aucune des qualités. Un être hybride, imparfait, non fini, odieux, angoissant, tête à claques… Et qu’on ne vienne pas nous parler de la chrysalide qui va se transformer bientôt en magnifique papillon virevoltant dans le ciel printanier. Les chrysalides ne fument pas de haschisch !  »

Pendant les (minimum) dix-huit ans à venir, ça va donc être votre fête. Et pas seulement le deuxième dimanche de juin. Ce jour-là, au moins, rappelez-vous qu’un ado ça peut aussi être attendrissant, gentil et plein d’humour. Si si. C’est une mère qui vous le dit.

DELPHINE KINDERMANS, RÉDACTRICE EN CHEF

 » LES CHRYSALIDES NE FUMENT PAS DE HASCHISCH ! « 

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