À moins de 40 ans, le directeur artistique de Salvatore Ferragamo incarne l’héritage grand chic de la maison toscane. En exclu, le Florentin a accepté de jouer les insiders dans  » sa  » cité des Médicis. Balade forcément allurée.

Barbe de trois jours, blazer marine à rayures craie enfilé sur une maille blanc cassé, poignée de main accompagnée d’un léger plissement des yeux. Ailleurs, il serait incendié pour péché de frime. Dans les frontières de la Péninsule, l’attitude est naturelle, mieux : irrésistiblement charmante. N’empêche de légers cernes à mettre sur le compte de la saison – on le rencontre mi-février entre les présentations des collections Homme et Femme, qu’il dessine aussi depuis 2010 -, Massimiliano Giornetti a le verbe prolixe du type habité par ses projets. L’£il débordant d’enthousiasme, à mille lieues de la morgue du poseur arty. Pour un ragazzo toscan fantasmant tout jeune sur  » le glamour et l’élégance  » de la légende écrite par le chausseur Salvatore Ferragamo (1898-1960) aux pieds des Dietrich et autres Hepburn, se retrouver à la direction du style de toutes les lignes du sémillant groupe de luxe florentin doit en effet tenir du rêve éveillé.

Patient, solide comme le marbre de Carrare, ville d’où il est originaire, ce créateur discret s’est hissé sans fracas au sommet de la mode italienne à la faveur d’un parcours un brin atypique. Pour répondre aux souhaits familiaux, il s’inscrit d’abord en faculté de Lettres à l’université de Florence.  » C’était un compromis, car je voulais déjà être créateur de mode, se souvient-il. Mais a posteriori, je me rends bien compte que cette étape a été essentielle dans mon cursus.  » Quand il débarque diplôme en poche sur les bancs de la célèbre école Polimoda à Florence, Massimiliano Giornetti a en effet une certaine forme de maturité qui manque généralement aux jeunes loups.  » J’ai commencé avec une autre perspective, plus réaliste peut-être, plus efficace en tout cas, en accord avec la tradition séculaire de l’artisanat florentin que j’ai appris à connaître et à respecter. Ce qui ne signifie pas que l’innovation ne m’intéresse pas. Je considère simplement, comme Salvatore Ferragamo, qu’on peut créer autant de chefs-d’£uvre qu’on veut, si ce n’est pas confortable, ça n’a pas d’intérêt.  » C’est un principe qui revient régulièrement dans les propos de celui qui fut engagé il y a dix ans chez Ferragamo comme assistant au département maille : pour lui, si la mode est une forme d’art, elle n’en est pas un à proprement parler. Les défilés de Salvatore Ferragamo n’ont pourtant rien de soporifique, point de trois-pièces de banquiers à l’horizon. Véritables courts-métrages convoquant généralement des imaginaires intimes et racés comme l’Argentine des gauchos solitaires l’hiver dernier, la Riviera française de Jean Cocteau dans les années 30 cet été, les shows cornaqués par Giornetti démontrent que la mode est gorgée d’envies et de rêves, et qu’elle est encore plus attirante quand ces derniers peuvent se réaliser. Chantre d’un  » art de vivre raffiné à l’italienne « , Massimiliano Giornetti et la maison Ferragamo s’inscrivent clairement dans la tendance gagnante du moment qui signe la fin des créateurs stars au profit des maisons à l’héritage consacré. Son Florence, à la fois fier et délicat, respire naturellement la même authenticité.

1. IL SANTO BEVITORE

Trois potes trentenaires, dont l’un est avocat, un autre porte-parole bancaire, se relaient à la tête de cette néo-cantine slow-food doublée d’un bar à vins naturels et d’une boutique de bons produits made in Italy. Adresse courue du quartier branché de l’Oltrarno, Il Santo Bevitore remporte un faramineux succès auprès des bobos locavores. Dites kilometro zero.

Via Santo Spirito, 66 r.

2. LUNGARNO SUITES

Pour se préparer un plat de pâtes come alla casa avec le service d’un hôtel 5-étoiles en sus (conciergerie, blanchisserie, room service…). Située en plein centre-ville, cette résidence locative, propriété du groupe Ferragamo, offre une vue inégalable sur le Ponte Vecchio. Une petite folie pour vivre Florence comme un prince en villégiature.

Lungarno Acciaiuoli, 4.

Son Florence

3. CIBRÈO

Attention, coup de c£ur. Depuis 1979, le chef Fabio Picchi revisite la cuisine toscane  » du pauvre  » avec un talent qui confine  » au sublime « , dixit Massimiliano Giornetti qui a élu l’endroit pour fêter son dernier anniversaire. Pas de carte, menu dicté à table. Outre le restaurant, plutôt onéreux, le petit empire de Picchi compte une trattoria pour dîner sans façon au coude-à-coude, un café toujours bondé et même un club à l’anglaise axé théâtre et gastronomie ouvert à tous moyennant cotisation.

Cibréo, trattoria : Via dei Macci, 122 r.

4. CAPPELLA BRANCACCI

Un peu en dehors des circuits touristiques, cette chapelle située dans l’Oltrarno abrite de très émouvantes fresques signées par Masolino et Masaccio. Ce dernier, considéré comme une des figures de proue de la Renaissance, a influencé tous les grands maîtres, de Michel-Ange à Raphaël. Par son traitement tout en rondeur des corps, par exemple. La restauration des couleurs en 1990 a redonné au lieu toute sa splendeur originale.

Piazza del Carmine, 14.

5. MERCATO DI SANT’AMBROGIO

Sous une halle en fer forgé typique du XIXe, les fermiers de la campagne florentine viennent écouler leurs produits estampillés bio pour beaucoup. Légumes, viandes (dont la fameuse côte de b£uf florentine), poissons, fromages d’appellation protégée (DOP), charcuteries à se damner, pain sans sel, rien ne manque pour se préparer un pique-nique premium.

Piazza Ghiberti.

6. STUDIO PUCK

Dans ce cabinet de curiosités 2.0., on trouve, spécialité maison, toutes sortes d’objets de décoration imprimés d’extraits de très vieux bouquins, de l’herbier au traité scientifique. Créations uniques d’un goût exquis.

Via Santo Spirito, 28 r.

7. OFFICINA SANTA MARIA NOVELLA

Créée au début du XIIIe siècle par les frères dominicains, cette très vieille pharmacie ouverte au public depuis 1612 et confisquée à l’Église par le gouvernement italien au XIXe est chargée d’histoires et d’odeurs divines. Sous son décor mêlant boiseries néogothiques, fresques Renaissance et baroques, on trouve aujourd’hui un trésor de parfums, mélanges d’herbes, pommades, alcool et produits de soins préparés selon des recettes ancestrales.

Via della Scala, 16.

8. FLAIR

Alessandra et Franco Mariotti avaient ouvert une petite boutique de design vintage dans le quartier de l’Oltrarno il y a quinze ans. Il y a six mois, ils ont inauguré un magnifique espace rive droite. Au menu : les créations art déco de Jean-Michel Franck se mêlent joyeusement à des carpettes berbères et des lampes Murano des années 50, décennie favorite de ce couple de chineurs grande classe qui a également exporté son enseigne à Milan, Rome et New York.

Piazza Goldoni, 6 r.

9. LORETTA CAPONI

Dans le décor pastel et désuet d’un palazzo à faire rêver les candidates princesses, l’adorable Loretta Caponi et sa turbulente fille Lucia perpétuent l’art de la broderie à la faveur d’un savoir-faire d’un autre temps. Linge de table, vêtements pour enfants modèles, robes et tenues de nuit, tout est fait main dans les coulisses de la boutique. Magique.

Piazza Antinori, 4 r.

10. PROCACCI

Ce très vieux delicatessen fondé en 1885 a miraculeusement survécu à la surenchère immobilière de l’avenue Montaigne locale. Entre les boutiques de luxe, cette adresse patinée tout en boiseries et carrelage coloré reste la plus charmante pause gourmande de la ville pour s’enfiler un de ses terribles panini tartufati – au beurre de truffe – à l’heure de l’apéritif.

Via dei Tornabuoni, 64 r.

PAR BAUDOUIN GALLER

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