Bruno Van Gils, tailleur-fondateur de Café Costume: « il n’y a rien de mieux qu’un client qui vous met au défi »

bruno van gils cafe costume
© Titus Simoens
Wim Denolf Journaliste Knack Weekend

Bruno Van Gils (44 ans) appartient à la troisième génération de la famille de tailleurs Van Gils, à la tête de la marque pour hommes du même nom jusqu’en 1992. En 2006, il a cofondé Café Costume, qui habille cette année les athlètes olympiques masculins de l’équipe de Belgique et ouvrira cet été une boutique à Hasselt, après Anvers, Bruxelles, Gand, Courtrai et Bruges.

La passion donne des ailes

Plus jeune, mon père n’avait pas vraiment son mot à dire sur son avenir – il devait simplement rejoindre l’entreprise familiale – mais, avec ma belle-mère, il a veillé à ce que ses propres enfants suivent leur cœur et développent leurs talents innés. Aujourd’hui, je leur en suis immensément reconnaissant, car je fais quelque chose qui m’inspire et me rend heureux.

Quand on est enfant, la liberté est une arme à double tranchant

J’ai eu une enfance merveilleuse, car à la maison, tout était possible et permis – « fais-le », disait toujours mon père. Grâce à lui, j’étais très aventureux : je faisais de longues randonnées avec mes amis dans la campagne autour de la Kalmthoutse Heide, découchant parfois pendant des jours et faisant des tas de bêtises. Mais cette liberté me conférait également une grande responsabilité. Cultiver l’autodiscipline, apprendre à me fixer des limites : j’ai dû faire la plupart de ces choses par moi-même.

L’Académie de mode d’Anvers a été pour moi une école de la vie

Principalement parce qu’on m’y a encouragé à être critique envers moi-même et à placer la barre très haut. Ce que je fais constamment aujourd’hui chez Café Costume. Mais aussi parce que, à la fin de ma troisième année, les professeurs n’ont pas hésité à me dire que mon travail ne les convainquait pas et que je ferais mieux d’abandonner. Sur le coup, c’était incroyablement dur, mais j’en ai tiré une leçon précieuse : la réalisation que rien n’était insurmontable, et qu’il était possible de se relever de tout échec.

Le repos est essentiel à la réussite

L’un ne va pas sans l’autre, mais avant de m’en rendre compte, j’ai vécu une dépression à 30 ans. Aujourd’hui, j’ai toujours tendance à passer à la vitesse supérieure et à surcharger ma barque, mais je suis plus vigilant quant à ma capacité à tout gérer. Par exemple, je me suis mieux entouré sur le plan professionnel, je délègue davantage et je mets plus souvent mon téléphone de côté le soir pour profiter pleinement de ma famille. J’ose aussi dire qu’il vaut mieux ne pas faire un projet, ou le remettre à plus tard. Avant, c’était difficile : je me laissais tellement emporter par mon enthousiasme que je voulais tout faire en même temps.

Il faut savoir faire preuve de persévérance

La vie n’est pas un long fleuve tranquille, raison pour laquelle il faut savoir garder la tête froide et une attitude positive. Même si la tentation est parfois grande de se précipiter et de réagir sous le coup de la panique, dans les moments difficiles, il est très utile d’avoir confiance en soi et en l’avenir, et de prendre le temps d’examiner calmement les options qui s’offrent à nous.

En tant que tailleur, il n’y a rien de mieux qu’un client qui vous met au défi

Quelqu’un qui suit la mode et qui est donc bien informé, par exemple, ou bien des personnes qui ont des goûts précis et qui savent très bien ce qu’elles veulent. Il faut savoir faire preuve d’empathie et engager le dialogue, deux qualités indispensables avec nos clients. Heureusement, les hommes d’aujourd’hui osent mieux exprimer leurs émotions et s’intéresser plus à la mode, mais ils restent plutôt dociles quand même : s’ils ne se font pas guider par un vendeur, ce sont leurs amis ou leur partenaire qui les aident à choisir.

Ma dyslexie a alimenté ma créativité

Bien sûr, c’était pénible d’avoir du mal à lire et à écrire, et je n’aime toujours pas parler devant un large public. Mais comme beaucoup de ceux qui en souffrent, j’ai aussi développé mon cerveau autrement. Je pense et communique en images plutôt qu’en mots, et je peux acquérir des connaissances grâce à des livres audio et des documentaires.

Etre un patron empathique est un apprentissage de tous les jours

J’ai hérité de mes parents un amour énorme pour les gens et j’ai un très bon sens de ce que ressentent les autres, ce qui rend parfois les choses complexes. Même si j’aime créer un environnement de travail agréable et sûr pour tout le monde, en tant que capitaine du navire, je dois fixer et contrôler le cap. D’un autre côté, je n’oublierai jamais les funérailles de mon grand-père maternel, et la façon dont tout le monde a souligné à quel point il avait été une bonne personne. Peu importe ce que vous réalisez dans votre vie, c’est le plus beau souvenir que vous puissiez laisser. cafecostume.com

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