Le succès du fleece ou comment la polaire est devenue l’uniforme de toute une génération
Le Gorpcore – mélange de streetwear et de vêtements outdoor techniques (mais branchés) – reste plus que jamais à la mode cette saison. Et pile dans la tendance, la polaire n’est plus réservée aux randos du dimanche.
Comment avoir chaud cet hiver ? La question est sur toutes les lèvres, crise énergétique oblige. Même si, pour l’instant, les températures automnales sont plutôt clémentes. Mais peu importe finalement, puisque tous les prétextes seront bons pour ne plus quitter le pull ou la veste chouchou de la saison : la polaire. On la porte partout tout le temps, lors d’un brunch dans son bar préféré, pour visiter un musée ou – pour lui rendre sa fonction initiale – pour se balader en forêt.
Bien sûr, il y a les classiques chez Patagonia, The North Face et Vaude, mais les chaînes et les marques de haute couture comme Balenciaga, Stella McCartney et JW Anderson surfent aussi sur la tendance.
Qu’est-ce qu’une polaire ?
La polaire est un tissu synthétique et isolant fabriqué à partir d’un type de polyester (PET) ou d’autres fibres synthétiques. D’autres matériaux peuvent être utilisés et ajoutés dans la production du tissu, notamment des fibres naturelles (comme la laine et le coton) ou des fibres recyclées (comme le plastique PET recyclé).
Pourquoi la polaire est-elle si populaire comme vêtement d’extérieur ?
La polaire est très confortable grâce à sa légèreté et à ses propriétés anti-transpirantes. Ce textile permet à l’humidité (la sueur) de s’évaporer, tout en bloquant l’humidité extérieure. Il sèche également rapidement, ce qui le rend parfait pour les tenues sportives d’hiver.
La polaire est aussi isolante, ce qui permet de conserver la chaleur corporelle.
Étant donné que seules des fibres synthétiques sont utilisées, la polaire est une alternative végane à la laine. La technologie de ce matériau est en constante amélioration. Le fil utilisé est désormais aussi fin que le cachemire et peut être fabriqué à partir de bouteilles en plastique recyclées (lire plus bas).
Bon à savoir aussi, l’épaisseur d’une polaire est souvent exprimée en chiffres. 100 est suffisant pour les climats doux ou les efforts physiques intenses, 200 est idéal pour les saisons intermédiaires et 300 vous tiendra chaud pendant les hivers rigoureux.
Dans les tenues d’extérieur à trois couches, en cas de grand froid, la polaire est la couche intermédiaire. En dessous, vous portez une couche thermique, qui est généralement faite de tissu synthétique ou de laine (mérinos). Une veste imperméable au vent et à la pluie peut être ajoutée à la polaire en cas de mauvais temps.
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Petite histoire de la po(pu)laire
1979 : À la fin des années 70, Aaron Feuerstein, PDG de Malden Mills, un fabricant de textile américain (maintenant connu sous le nom de Polartec), commence à expérimenter les possibilités du polyester. En 1979, le moment est venu : il crée le ‘Polarfleece’, une matière légère, qui retient la chaleur et repousse l’humidité. Au début des années 80, l’usine introduit la fibre polaire sur le marché des vêtements de sport grâce à une collaboration avec Yvon Chouinard, propriétaire de la marque outdoor Patagonia, encore inconnue alors. Feuerstein n’a pas breveté la polaire, n’importe qui pouvait donc produire ce matériau.
La première génération de vêtements en polaire s’appelait Synchilla, une combinaison des mots synthétique et chinchilla. En dix ans, la popularité du matériau a énormément augmenté. Pendant ce temps, la polaire a largement été utilisée dans les vêtements de sport et outdoor dans le monde entier.
Années 80 & 90 : La polaire est omniprésente à cette époque, sous diverses formes. Des versions minimalistes aux imprimés les plus kitsch. Dans les années 90, le vêtement tend à se cantonner aux placards des amoureux de la nature, ambiance Décathlon. Mais la polaire connaît un renouveau quelques années plus tard.
2017 : On fait un bond dans le temps. « First Came Normcore. Now Get Ready for Gorpcore » titre le magazine The Cut, annonçant la tendance de la mode outdoor. Gorp vient de « granola, oats, raisins & peanuts » : des en-cas que les alpinistes emportent souvent avec eux pour avoir l’énergie nécessaire à l’effort. Les observateurs de tendances voient soudain les jeunes new yorkais s’habiller en masse comme s’ils allaient faire une randonnée en montagne. Les chaussures deviennent plus solides, les vestes plus bouffantes et les pulls plus pratiques. En fait, le Gorpcore est le prolongement parfait du normcore, cette tendance où les vêtements « normaux », pratiques, voire un peu laids, deviennent à la mode.
2018 : Une théorie qui expliquerait la raison pour laquelle les vêtements outdoor ont tant de succès serait que les jeunes soucieux du climat veulent porter des vêtements qui leur rappellent la nature. Zuzanna Skalska, analyste des tendances, estime que les personnes écoanxieuses ont tout intérêt à porter des vêtements pratiques et moches. Moins de beauté, plus de fonctionnalité – et plus de matériaux réutilisables.
Automne 2020 : Pendant la crise du Covid, les confinements successifs incitent les gens à enfiler des vêtements confortables et pratiques comme… une bonne vieille polaire. Selon Vogue, la polaire est rendue sexy par des célébrités telles que Hailey Bieber et Bella Hadid. Les deux stars posent pour un post Instagram dans la même polaire MM6 Maison Margiela x The North Face. Les collaborations entre les marques outdoor et les marques de mode boostent la tendance.
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2021 : C’est l’année où les polaires « Retro Pile » et « Retro-X » de Patagonia deviennent des «it-vestes». Le pull « Classic Retro-X » de Patagonia se classe septième dans le classement The Lyst des produits les plus recherchés pour hommes. Et si l’on regarde autour de nous en 2022, la popularité de cette bonne vieille polaire, certes pimpée au goût du jour, semble n’avoir fait qu’augmenter.
Automne 2022 :
- Ne dites plus « Sherpa » pour ce pull en polaire à poils longs, parfois appelé polaire sherpa. Récemment, le label The North Face a déclaré qu’il n’utiliserait plus ce terme, par respect pour les Sherpas, fameux peuple originaire du Népal.. Vous trouverez maintenant ce type d’article sous la rubrique «High Pile ». Dans le même temps, la marque met en avant les Sherpas afin que les gens puissent découvrir leur patrimoine culturel et leur passé, profondément ancré dans l’alpinisme.
- Pendant ce temps, la pièce « 8-ball sherpa » de Stüssy est sold-out et s’arrache sur les plateformes de revente au double de son prix d’origine.
Le plastique, c’est pas fantastique
Malheureusement, la polaire n’est pas idéale pour l’environnement et le climat. En général, le textile est fabriqué à partir de matières premières non renouvelables : c’est du plastique portable. En outre, un revêtement chimique supplémentaire est souvent ajouté pour rendre le matériau coupe-vent et hydrofuge.
Une façon d’utiliser moins de matières premières est de travailler avec des matériaux recyclés. Patagonia a été l’une des premières marques à produire des polaires à partir de bouteilles en PET recyclées. Entre-temps, de nombreuses marques proposent des polaires dites écologiques, notamment Vaude, Outerknown et The North Face.
Le recyclage est préférable à l’élimination, mais les experts suggèrent qu’il vaudrait mieux recycler les bouteilles en PET pour en faire des bouteilles en PET plutôt que du matériau polaire. Ainsi, on reste en circuit fermé. Il est en effet impossible de recycler un pull en polaire recyclé pour en faire un nouveau vêtement, alors que les bouteilles en PET recyclées peuvent facilement avoir une nouvelle vie en tant que bouteille. Actuellement, seul 1 % des vêtements mis au rebut est recyclé en nouveaux textiles. Il est donc illusoire de penser que les textiles ont actuellement une vie éternelle grâce au recyclage.
Enfin, les fibres synthétiques, recyclées ou non, posent un problème car elles ne sont pas biodégradables. Une étude de 2016 financée par Patagonia et menée par l’Université de Californie a révélé que les vestes en polaire synthétique perdent en moyenne 1,7 gramme de microfibres par lavage, et que les vieux vêtements perdent presque deux fois plus de fibres que les nouveaux.
Comment minimiser son impact environnemental et climatique ?
– Optez pour les vêtements d’occasion : plus un vêtement est porté et chéri longtemps, plus il est durable.
– Regardez l’étiquette de composition et choisissez une polaire fabriquée à partir de matériaux recyclés/durables. De nombreuses marques le proposent. Vaude propose également des vestes polaires composées de 91 % de polyester recyclé et de 9 % de fibres de bois.
– Portez toujours un tee-shirt sous votre polaire, afin de ne pas avoir à la laver trop souvent. Conseil : optez pour un tee-shirt ou une chemise en fibre de chanvre ou en laine mérinos. Cela permet à votre peau de bien respirer.
– Choisissez une polaire qui sert de veste et a donc très peu besoin d’être lavée.
– Utilisez un sac de lavage. Avec ce sac à linge, vous récupérez les fibres détachées pendant le passage en machine, empêchant ainsi les microplastiques de se répandre dans l’eau. Vous pouvez également installer un filtre en plastique sur votre machine à laver.
– Trouvez un article similaire fabriqué à partir de matériaux naturels. Par exemple, le label durable Pangaia triche en fabriquant une polaire à partir de laine recyclée.
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