« Merci », un nouveau concept store solidaire

Après la success story Bonpoint, Marie-France Cohen ouvre à Paris ce samedi une boutique d’un nouveau genre. Elle nous dévoile son projet inédit, baptisé Merci.

Après la success story Bonpoint, Marie-France Cohen ouvre à Paris ce samedi une boutique d’un nouveau genre. Elle nous dévoile son projet inédit, baptisé Merci.

Elle aurait pu aller planter des fraises dans l’Aveyron, sa région natale. S’offrir une retraite tranquille. Ou simplement s’occuper de ses sept petits-enfants. Elle en a décidé autrement. A 60 ans passés, Marie-France Cohen, qui a créé voilà plus de trente ans l’enseigne Bonpoint avec son mari, a décidé de se lancer dans une nouvelle aventure: un concept store solidaire. Un projet énorme et assez révolutionnaire auquel elle a consacré trois ans de sa vie. Avec un optimisme forcené. Baptisé Merci, ce grand vaisseau de 1 500 mètres carrés, situé boulevard Beaumarchais, à Paris, vient d’ouvrir.

En quoi Merci est-il un concept store d’un nouveau genre?
C’est à la fois une vitrine de l’époque et un vrai lieu de vie, voué à la mode et à la maison. Flanqué d’un café littéraire, d’un fleuriste, d’une cantine chic… Je ne veux surtout pas que Merci s’apparente à une boutique-galerie, intimidante, réservée à une élite en quête de l’achat « égotique ». Ici, point de baskets numérotées ou de chaises en édition limitée, mais une sélection de produits dont la valeur tient plus à leur fonction, à leur esprit, à leur capacité à ne pas se démoder qu’à leur rareté. Et à ce qu’ils vont permettre…

Qu’entendez-vous par là?

Que Merci est à ce jour le seul magasin solidaire où 100 % des bénéfices seront reversés, via une fondation, à des associations qui aident les femmes et les enfants de Madagascar. L’un des pays les plus pauvres de la planète. Et avec lequel nous avons tissé des liens privilégiés.

Par « solidaire », faut-il aussi entendre un magasin proposant des produits écolo?
Je ne prétends pas vouloir sauver la planète ! En revanche, je souhaite lui faire le moins de mal possible. Et, si j’ai le choix entre vendre des assiettes en plastique et d’autres en bagasse (résidu de fibre de canne), fabriquées dans de jolis coloris, évidemment j’opte pour la seconde solution. Il est temps de comprendre que solidaire n’est plus synonyme d’austère, de tristounet.

Que va-t-on trouver, ici, de différent?
Le choix est inédit à bien des égards. La sélection mixe à la fois des objets précieux – un pupitre d’école d’Arne Jacobsen des années 1950 – et des objets plus ordinaires – des rouleaux de serviettes en lin et coton 12 coloris. Des pièces exclusives – la fameuse saharienne d’Yves Saint Laurent rééditée pour Merci en blanc et kaki – et d’autres de talents émergents ou des marques de prêt-à-porter plus confidentielles – Acne, Forte Forte, Swildens. Du mobilier d’hier – des tabourets du xixe siècle que nous avons dénichés dans des fermes chinoises – et des accessoires de toujours – des interrupteurs en Bakélite noire réédités pour l’occasion. Bref, j’ai rassemblé un subtil mélange de pièces rares et quotidiennes qui incarnent ma philosophie de vie.

Trois adjectifs pour qualifier la sélection de Merci?
Eclectique, inattendue, accessible… Pour preuve, nous avons réussi à convaincre des maisons comme Isabel Marant, Azzaro, Stella McCartney, Kris Van Assche, Paul Smith et d’autres de créer pour Merci, et sans marge, une silhouette ou une pièce unique, vendue de 30 à 40 % moins cher que dans leurs boutiques. Autre prouesse dont je suis fière : la maison Goutal (qui n’appartient plus à ma famille depuis le décès de ma soeur Annick) a accepté de vendre quatre de ses parfums -Eau de Camille, Heure exquise… – dans des flacons de laborantin afin que l’étudiante comme la mère de famille au budget serré puissent s’offrir l’une de ces fragrances un tiers moins cher que son prix d’origine.

Vous avez aussi créé trois charity shops au sein de Merci pour alimenter la fondation. De quoi s’agit-il?
Comme à Londres ou à New York, j’ai voulu créer des boutiques qui fonctionnent grâce aux dons des particuliers (au moins pour la librairie ou l’espace mode vintage) et qui soient aussi jolies et sexy que n’importe quel magasin du quartier. La librairie, par exemple, aux allures de café littéraire, propose une jolie sélection de romans (entre 3 et 10 euros), à déguster entre une orange pressée et une tartine grillée.

Il n’y a pas que le fonctionnement de Merci qui soit atypique. Le lieu l’est aussi…
Effectivement, le bâtiment a aussi beaucoup de caractère. Nous nous sommes installés dans un bel immeuble du xixe siècle, coincé entre une cour pavée et un jardin, et autrefois occupé par les maisons de tissus Braquenié puis Frey. Un espace de 1 500 mètres carrés avec 10 mètres de hauteur sous plafond, inondé de lumière par une somptueuse verrière. Seuls le café littéraire et la boutique de fleurs ont pignon sur rue.

Connaissant votre histoire familiale, pourquoi avoir décidé de vous engager à Madagascar plutôt que dans la lutte contre le cancer?
Parce que je connais bien ce pays avec qui j’ai beaucoup travaillé du temps de Bonpoint. Et que je sais, grâce à mes connexions sur place, que je pourrai suivre les fonds envoyés. Ma priorité étant de récupérer les petites filles dans la rue et de les former à un métier. La couture en l’occurrence !

Avez-vous envie d’ouvrir d’autres Merci de par le monde?
Pourquoi pas, si ça marche? A Londres, Tokyo ou New York…

Pourquoi avoir baptisé ce projet Merci?
C’est un nom magique qui s’est imposé tout de suite. C’est merci la vie, merci d’avoir été si gâtés par elle. Merci de pouvoir rendre à la société ce qu’elle nous a donné. La vente de Bonpoint nous permet aujourd’hui de vivre plus que décemment. Avec mon mari, nous ne cherchons pas, à présent, à gagner toujours plus. En revanche, nous avions envie de relever un nouveau défi. De retrouver le bonheur d’entreprendre. La valeur de la vie ne tient-elle pas au sens qu’on veut bien lui donner?

Merci, 111, boulevard Beaumarchais, Paris (IIIe), 01-42-77-01-90.

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