Catherine Deneuve, femme libre… jusqu’à susciter l’incompréhension

© Isopix

Icône du cinéma français mondialement connue, mais aussi « femme libre » qui « dit ce qu’elle veut », Catherine Deneuve, critiquée après avoir plaidé pour la « liberté d’importuner » les femmes, n’a jamais hésité à aller à contre-courant, sans craindre de choquer.

Depuis deux jours, elle est la cible de vives attaques sur les réseaux sociaux, en France comme à l’étranger, pour avoir cosigné avec une centaine de personnalités une tribune dans Le Monde défendant une « liberté d’importuner » les femmes, « indispensable à la liberté sexuelle » et s’inquiétant d’un retour du « puritanisme » après l’affaire Weinstein.

« Un jour à peine après les Golden Globes où Hollywood a affiché son soutien au mouvement #MeToo, une actrice célèbre de l’autre côté de l’Atlantique signe une tribune pour dénoncer ce mouvement et son équivalent français, #balancetonporc », a écrit le New York Times.

L’actrice Asia Argento, l’une des premières à avoir dénoncé le producteur Harvey Weinstein, a été plus cinglante sur Twitter: « Catherine Deneuve et d’autres femmes françaises racontent au monde comment leur misogynie intériorisée les a lobotomisées au point de non-retour ».

Dans le quotidien britannique The Guardian, qui estime que l’actrice est « surtout connue pour avoir joué le rôle d’une prostituée dans Belle de jour de Luis Buñuel, en 1967″, l’écrivaine australienne Van Badham « explique » à « Catherine Deneuve pourquoi #MeToo n’a rien d’une chasse aux sorcières ».

Sollicitée par l’AFP, Catherine Deneuve n’a pas souhaité s’exprimer.

Soutien de Polanski

Avant cette tribune, elle s’était déjà attiré les foudres des féministes en soutenant le réalisateur Roman Polanski. Elle avait déclaré avoir toujours trouvé « excessif » le terme de « viol », à propos de l’inculpation en 1977 de celui avec qui elle tourna « Répulsion ».

Catherine Deneuve aux côtes de Roman Polanski, en mai 2017 aux pieds des marches du Palais des Festivals à Cannes
Catherine Deneuve aux côtes de Roman Polanski, en mai 2017 aux pieds des marches du Palais des Festivals à Cannes© Reuters

La victime présumée du réalisateur, Samantha Geimer, qui a depuis pardonné à son agresseur, a d’ailleurs soutenu l’actrice sur Twitter. « Je suis totalement d’accord avec Catherine Deneuve. Les femmes ont besoin d’égalité, de respect et de liberté sexuelle. Ce que nous obtenons par nous-mêmes (…). Pas en demandant à d’autres de nous protéger. »

A l’image de ces sorties récentes, Catherine Deneuve est avant tout « une femme libre qui ne se laisse pas marcher sur les pieds », observe Eric Neuhoff, spécialiste du cinéma au Figaro. « Elle dit ce qu’elle pense, ce qu’elle veut. »

« Le mot liberté lui colle à la peau. Elle a toujours été libre de ses choix de vie, de carrière et de ses combats, que ce soit en signant le manifeste des 343 (en faveur de l’avortement en 1971 en France) ou pour soutenir Polanski », renchérit le journaliste Alexandre Fache, auteur de Catherine Deneuve: une biographie.

Pour autant, la star a récemment confié au magazine Technikart n’avoir jamais appartenu aux mouvements féministes.

Un caractère entier

Si ses récentes prises de position ont décontenancé l’opinion publique, elle s’est aussi engagée en 2001 pour l’abolition de la peine de mort aux Etats-Unis. En 2004, elle a présidé un gala d’Amnesty pour soutenir une campagne contre les violences faites aux femmes. Et en 2007, elle a cosigné une pétition pour soutenir la candidate socialiste Ségolène Royal, cible d’attaques sexistes pendant la campagne présidentielle.

Médiatiquement, Catherine Deneuve pratique aussi l’art du contrepied, capable d’apparaître en « cougar » aux côtés d’un jeune homme nu en Une d’un magazine gay, Têtu, ou de se prêter avec humour pour la télévision à la lecture de phrases désopilantes sur la mode, un monde qu’elle adore.

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Ces dernières années, l’actrice de 74 ans a donné ainsi l’impression de casser son image de star distante voire de grande bourgeoise froide bâtie durant toute sa carrière.

Si Eric Neuhoff suggère que « l’âge, qui autorise tout, y est peut-être pour quelque chose », Alexandre Fache affirme au contraire qu’elle n’a jamais cessé d’avoir une parole libre. « Elle s’est toujours faite assez rare dans les médias, car elle n’aime pas se livrer. Mais quand elle le fait, c’est avec franchise ». « C’est un caractère entier, remarquablement organisé sous des apparences frivoles. Elle a des idées très avancées, je dirais même anarchistes dans tous les domaines, carrière, famille, amour… », disait d’elle son père Maurice Dorléac, dans des propos au magazine Cinémonde en 1964 rapportés par la revue Schnock.

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