Mer turquoise et chapelles blanches, la Grèce veut faire oublier les réfugiés

Les célèbres dômes bleus de l'île de Santorin © iStockphoto

La Grèce, ses chapelles écrasées de soleil, ses eaux turquoise. Et une armada de barques surchargées de réfugiés qui accostent sur ses plages. Au Salon du tourisme de Berlin, les professionnels hellènes tentent de faire oublier le drame des migrants.

« Nous pensons que l’année 2016 va être encore meilleure que l’an dernier car s’il y a eu quelques problèmes sur certaines îles, il y a maintenant un retour à la stabilité », assure à l’AFP la ministre grecque du Tourisme, Elena Kountoura, présente à Berlin, l’un des grands rendez-vous mondiaux du secteur. « Des mesures ont été prises au niveau européen et le nombre d’entrées de réfugiés recule », poursuit-elle, pleine d’assurance malgré une réalité beaucoup plus contrastée sur le terrain.

En Grèce, le tourisme est un secteur aussi lucratif que vital pour une économie essorée par une crise sans fin. Il représente jusqu’à 20% du Produit intérieur brut (PIB) et emploie une personne sur cinq.

La vie d’îles entières, de Corfou à Santorin, dépend des arrivées de charters qui déversent aux beaux jours Allemands ou Britanniques en quête de soleil.

Mais les îles de la mer Égée orientale, située à quelques milles marins des côtes turques, sont devenues la principale porte d’entrée des réfugiés fuyant la guerre et la misère en Syrie, en Irak ou en Afghanistan.

Plus de 131.000 personnes sont arrivées par la Méditerranée depuis le début 2016, dont une écrasante majorité (plus de 122.000) en Grèce, selon le Haut Commissariat aux réfugiés des Nations Unies (UNHCR). L’an dernier, les îles grecques ont accueilli plus de 840.000 migrants bravant la mer en canot pneumatique.

Tsunami humain

Un tsunami humain qui a bouleversé la vie des îliens et engendré d’épouvantables drames quand la mer a rejeté les corps de malheureux naufragés.

Sur certaines îles, des familles avec de jeunes enfants ont croupi dans des conditions sanitaires désastreuses, très loin des dépliants distribués au Salon de Berlin qui aguichent l’envie de tavernes les pieds dans l’eau. Sur ces îles, en particulier la pittoresque Lesbos, les hôteliers font grise mine lorsqu’ils ont consultent leur livres de réservation et quand le téléphone sonne, c’est bien souvent pour des annulations.

Selon la société d’études de marché Euromonitor, certaines compagnies de croisières ont décidé de ne plus faire escale à Mytilène, chef-lieu de l’île de Lesbos qui enregistre un plongeon de 90% des réservations, selon le quotidien grec Kathimerini. Et dans l’archipel du Dodécanèse, l’île de Kos enregistre une dégringolade de 40%.

A Berlin, le maire de Kos, Giorgos Kiritsis, insiste sur la dimension européenne de cette crise des réfugiés, tout en reconnaissant l’impact « très négatif » des images montrant des réfugiés livrés à eux-mêmes dans les rues de son île.

Campagne marketing

« L’an dernier nous avons été complètement surpris par l’ampleur de l’afflux », explique-t-il à l’AFP, mais « nous voulons promouvoir l’île via une campagne marketing sur internet et les réseaux sociaux ».

Grande destination du tourisme organisé, Kos est vent debout contre l’installation d’un centre de « tri » et d’enregistrement des migrants, un « hotspot ». « Nous ne voulons pas que notre île soit associée à un camp pour migrants », souligne l’adjoint au maire chargé du tourisme, Elias Sifakis.

L’image de la Grèce, réputée pour la chaleur de son accueil, pourrait toutefois sortir grandie de cette crise. Devant l’apathie de nombreux Occidentaux face au drame des Syriens, les Grecs ont fait preuve d’une incroyable solidarité. Une collecte monstre organisée à Athènes a permis de récolter des tonnes de vivres pour les réfugiés.

Des habitants des îles, en particulier une grand-mère et un pêcheur, figurent parmi les personnalités qui pourraient rafler le prix Nobel de la paix. « Les histoires montrant des villageois accueillant des réfugiés, fournissant de la nourriture ou un abri aux réfugiés sont de très bonnes opportunités pour attirer des touristes », a assuré à Berlin Taleb Rifai, secrétaire général de l’Organisation mondiale du tourisme (UNWTO), une agence des Nations-Unies.

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