ENFER DORÉ
(1)(2) » L’Enfer des Riches « , par Béatrice Peyrani et Corinne Tissier, éd. Albin Michel, 314 pages.
Anne-Marie Mitterrand le clame haut et fort : » La Belgique au moins respecte ses riches » (1). Confortablement installée désormais au bord des étangs d’Ixelles, cette nièce par alliance de François, qui se revendique bourgeoise de droite, n’a pas de mot assez dur pour fustiger son pays d’origine, la France, si hostile, à ses yeux, à l’égard des nantis. Elle est loin d’être la seule. C’est bien une cohorte de Français millionnaires qui, en catimini, trouvent refuge dans nos beaux quartiers. Car, contrairement à ce que les envieux pourraient croire, la vie de nabab, particulièrement outre-Quiévrain, n’est pas rose tous les jours. C’est même un enfer, affirment deux journalistes économiques, qui ont consacré à nos voisins argentés une enquête minutieuse de deux ans (2).
Les contrariétés ne manquent pas. D’abord, il y a l’environnement, menaçant. Mieux vaut circuler à Paris en Twingo plutôt qu’avec la dernière Jaguar, ne pas afficher de signe ostensible de richesse, histoire de tenir à distance les jaloux, se méfier du personnel de maison ou des sociétés de gardiennage, dont certains membres pourraient être tentés par quelque larcin. Sans parler de la hantise du kidnapping.
Rayon famille, nos crésus ne sont souvent pas davantage favorisés. On ne compte plus les noms bien lourds à porter. Comment être à la hauteur des ancêtres qui ont bâti fortune, réputation ou quartiers de noblesse ? Faire face à l’entretien du patrimoine, des parcs et châteaux, autant de cadeaux empoisonnés ? Et aux querelles d’héritage qui voient la haine grimper à la hauteur des milliards en jeu ?
Dans cet univers impitoyable, on se méfiera, aussi, des mauvais conseillers qui peuvent défaire en quelques minutes une fortune à la Bourse, l’endroit, dixit l’ex-ministre français Michel Charasse, » où les riches se volent entre eux » ; du fisc, qui ne demande qu’à croquer du parvenu ; du Dow Jones ou du Nasdaq qui tient en éveil jour et nuit.
Mais il y a plus perturbant encore. Voilà qu’il faut encore se saigner pour financer les débuts mondains des enfants, des soirées » infernales » troublées par la coke, les bagarres et la vaisselle cassée. Et se battre, lors de chaque balade dans le square du coin, pour ne pas se faire piquer la nounou des petits, une » vraie perle « , par des parents plus riches encore et qui ont le culot de faire grimper les prix.
On vous l’avait dit, une vraie misère.
Christine Laurent
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