Sieste-flash
(1) Edition du 12 mai 2003.
Non, ce n’est pas une histoire à dormir debout. Mais personne n’est dupe, le travail fatigue. Incontournable pour s’intégrer dans la société, gagner son pain quotidien, voire même obtenir un statut social, il nous condamne à trimer dur. Et si le boulot est devenu un devoir sacré,
le refuser c’est, hélas pour certains, accepter de n’être personne. » Laissez-moi dormir, j’étais fait pour ça « , dit l’épitaphe malicieuse
de l’humoriste Francis Blanche. Un v£u secret partagé par de nombreux jouisseurs bien avant d’être couchés six pieds sous terre. Dormir. Un bienfait qui ne comble pas seulement l’individu, mais bien aussi l’entreprise. Si, si, ce serait même pour elle désormais, si l’on en croit » Libération » (1), une question de vie ou de mort. Tchernobyl, le pétrolier Exxon Valdez,
la navette Challenger, on ne compterait plus les accidents de travail dramatiques liés à un problème de somnolence. On fatigue, on lutte contre le sommeil, mais à l’insu de notre plein gré la torpeur guette et c’est le crash. Il n’y a pas que les pilotes de ligne qui risquent, sous l’effet de l’engourdissement, de piquer du nez. Nous tous, nous avons, bien incrustée en nous et ravivée encore par le stress croissant, une partie languissante toujours prête à s’endormir. A diagnostic sévère, remèdes de choc. Les spécialistes consultés dans le monde entier sont unanimes : il faut réveiller d’urgence… la sieste. Pas la sieste honteuse, le » siester caché « . Non, la vraie, la voluptueuse sieste quotidienne, dans son bureau, au vu et au su de tout le monde, roulé en boule sur une banquette, ou mieux lové dans un hamac. Celle-là même pointée injustement par les pays nordiques comme une flemme, une fainéantise. Alors qu’elle n’est, le Sud le sait si bien, que minirégénérescence, minirenaissance. Selon des études récentes réalisées par la Nasa, quarante minutes de repos au c£ur d’une journée de travail augmentent de pas moins de 40 % les performances d’un individu. Concentration accrue, efficacité itou. Mais pas question de s’abandonner au plus clair du jour des heures dans les bras de Morphée.
Une sieste-flash, après le repas, histoire de traverser le » creux de
vigilance » détecté par les médecins, suffit. Lézarder oui, mais juste
un peu. Faire la méridienne, jouer l’aï d’accord, mais sans sombrer.
Le tout payé par un patron bienveillant. Un rêve, le vrai.
Christine Laurent
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