Vertigo

Christine Laurent
Christine Laurent Rédactrice en chef du Vif/L'Express

Ce bon vieil Archimède n’en croirait pas ses yeux. Et pourtant, elles flottent bel et bien à la surface de l’eau ces lunettes de soleil toutes de légèreté créées par Vuitton ( lire page 4). Pas moins d’un an de recherche pour un nouvel accessoire sophistiqué digne de l’aura raffinée du célèbre maroquinier français. Et la quasi-certitude de faire craquer cet été plusieurs milliers de fashionistas quelques jours à peine avant le départ en vacances. Une opération rondement menée et qui viendra gonfler encore le déjà très substantiel chiffre d’affaires de la marque.

C’est que dans cette aventure, Vuitton a tout juste. Les spécialistes de l’industrie du luxe le savent bien : pour doper le business, il s’agit d’innover. Encore et encore. Sans le moindre répit. Seules comptent désormais l’imagination, la souplesse, la réactivité. Objectif : faire face aux exigences grandissantes de la clientèle. Et plus particulièrement celles des classes moyennes, qui, grâce à une nette progression de leur niveau de vie, alimentent le développement du commerce du luxe. Esthétique des produits, qualité, elles ne s’en laissent pas conter. Et puis, il y a ces nouveaux marchés à conquérir très vite, au risque de se faire piquer la place par la concurrence. Alors on ose, les marques se décomplexant de plus en plus pour couvrir toutes les strates de la demande. Une véritable stratégie qui repose sur deux piliers majeurs : la création de produits emblématiques (comme l’irrésistible  » Kelly  » chez Hermès), doublée de la prolifération de dérivés plus rentables, plus accessibles au plus grand nombre (portefeuilles, agendas, pochettes). Et l’affaire est dans le sac ! Au passage, on aura mêlé adroitement passé et présent pour éviter que les grands noms se fanent, réactivé les styles avec un zeste de modernité, ouvrant ainsi des horizons inattendus dans lesquels s’engouffreront avec délice ces nouveaux consommateurs.

Mais attention. Il ne s’agit pas de perdre de vue pour autant la cible richissime, ces quelque sept millions de privilégiés dans le monde qui thésaurisent (sur des comptes d’une discrétion exemplaire) une fortune cumulée de pas moins de 28 billions de dollars. Mais les satisfaire relève souvent de l’exploit. Blasés, gâtés, comment les séduire encore ? Seule solution, de l’avis des plus expérimentés : monter encore en gamme, plus haut, toujours plus haut. Avec des prix tout aussi vertigineux. Pour preuve, cette Tour de l’Ile, la  » montre la plus compliquée du monde « , éditée en sept exemplaires et présentée au récent Salon de Genève par Vacherin Constantin. Pour la modeste somme de 1 404 000 euros, on peut acquérir  » le fruit le plus abouti du génie horloger  » ! Une paille…

Christine Laurent

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