Paola, la souveraine mal aimée

Paola à Oostduinkerke en juin 2013 © Belga Image

En dépit de son dévouement inconditionnel durant 20 ans pour la nation, la sixième Reine des Belges semble être et avoir été incomprise, bien qu’à sa manière, elle ait donné le meilleur d’elle-même.

Elle qui en rêvait tant, Paola devra encore faire preuve de patience avant de pouvoir passer une retraite insouciante aux côtés de son époux. Depuis l’abdication du Roi Albert en juillet 2013, les problèmes se sont enchaînés. La santé de l’ancien souverain la préoccupe beaucoup. Conséquence directe ou fruit du hasard, Paola a elle-même souffert de problèmes cardiaques. Mais les nombreuses railleries à leur égard lui ont certainement fait autant de mal. En effet, en dépit de son dévouement inconditionnel durant 20 ans pour la nation, la sixième Reine des Belges semble d’ores et déjà oubliée. A sa manière, elle a pourtant donné le meilleur d’elle-même.

Paola et Albert, le jour de leur fiançailles
Paola et Albert, le jour de leur fiançailles© Belga Image

L’annonce des fiançailles de Paola Ruffo di Calabria avec le Prince Albert au printemps 1959 a ravi toute la population belge. Pour la première fois depuis 1926, un mariage princier allait être célébré. La jeune Italienne a même été comparée à la Reine Astrid.

Chacune des Joyeuses Entrées du nouveau couple princier a pris des allures de marche triomphale. Le Roi Baudouin a lui aussi été enchanté par cette union et n’a d’ailleurs pas hésité à déclarer que sa belle-soeur était « le plus beau cadeau que les Italiens pouvaient offrir à notre pays ». Mais Paola a rapidement constaté que la vie à la cour belge n’était pas si rose. Sa belle-mère Lilian a par exemple brillé par son absence aux fiançailles du couple. La relation avec la Reine Fabiola, qui a pour sa part fait son entrée à la cour l’année suivante, n’a jamais été chaleureuse non plus. Quelle différence en effet entre la vie d’ascète de la princesse espagnole et celle de la sémillante princesse italienne. Seule la Reine Elisabeth, femme rebelle, appréciait la spontanéité de Paola.

Etrangère

La naissance d’un fils, Philippe, neuf mois et deux semaines après son mariage, a comblé la princesse de joie. Astrid et Laurent ont rapidement suivi. Mais Paola se sentait trop éloignée de sa famille pour être capable de partager son bonheur. Ses amis étaient rares dans le milieu aristocratique. Elle était néanmoins encensée par la presse internationale. La jeune fille timide s’était effectivement transformée en une femme magnifique. Mais la beauté ne suffit pas pour être princesse.

Sa popularité a commencé à chuter lorsqu’il est apparu que Paola ne faisait pas forte impression lors des missions de représentation. Mais cette situation était inévitable puisque personne ne lui a appris l’exercice. Il s’est en outre rapidement avéré que la princesse était peu douée pour les langues. Elle se sentait aussi incomprise par son époux. Ils ont tous deux reconnu par la suite qu’ils s’étaient mariés trop jeunes et qu’ils n’avaient pas suffisamment appris à se connaître. L’opinion publique a toutefois rejeté la responsabilité de leurs problèmes conjugaux sur Paola. A cette époque, tout le monde ignorait la vérité.

Une mère sans famille

Le prince Philippe, la princesse Astrid, la reine Paola et le prince Laurent, nouveau-né, le 19 10 1963
Le prince Philippe, la princesse Astrid, la reine Paola et le prince Laurent, nouveau-né, le 19 10 1963 © Belga Image

Le reste appartient à l’histoire. Albert a entretenu une relation extraconjugale durant 18 ans. Paola avait elle aussi des « amis proches ». Leurs enfants ont grandi dans une certaine solitude, dont les effets se font ressentir aujourd’hui encore. Selon ses amis, Paola a pourtant cherché à améliorer la situation. Elle organisait de grandes fêtes d’anniversaire dans les jardins du Belvédère, se rendait aux réunions de parents et allait régulièrement chercher ses enfants à l’école. Mais aux yeux du peuple et du Roi Baudouin, ses efforts n’étaient jamais suffisants. Le souverain a finalement consenti au divorce du couple mais les conditions imposées étaient tellement strictes que les conséquences auraient été trop lourdes à supporter pour Albert et Paola.

Paola, la souveraine mal aimée
© Reuters

Rétrospectivement, Baudouin a pris la bonne décision car comme par miracle, ces discussions difficiles ont rapproché le couple. Malheureusement, à ce moment, les enfants d’Albert et Paola avaient pratiquement quitté la maison et n’ont jamais eu pleinement l’occasion de profiter de la réconciliation de leurs parents.

Une reine non préparée à cette tâche

Paola, la souveraine mal aimée
© Belga

Enfin réunis, Albert et Paola s’apprêtaient à couler des jours paisibles lorsqu’ils ont appris le décès du Roi Baudouin le 31 juillet 1993. Albert était âgé de 59 ans et Paola de 56 ans au moment où ils ont été choisis, contre toute attente, et donc sans y être préparés, pour succéder au couple royal. Tous deux redoutaient d’assumer cette tâche. L’accueil chaleureux qui leur a été réservé durant les Joyeuses Entrées a été un réel stimulant. Le couple ne s’y attendait pas. Albert s’est forgé une réputation de bon vivant toujours de bonne humeur. Paola a immédiatement été critiquée pour son manque de maîtrise du néerlandais. De nombreux Belges n’ont pas caché qu’ils considéraient toujours Fabiola comme leur reine. Très sociable, cette dernière passait en effet, certes non sans commettre d’erreurs, facilement d’une langue à l’autre. Paola s’exprime avec moins d’aisance et, en dépit de longues heures de cours de néerlandais, elle n’est jamais parvenue à parler sans difficulté cette langue nationale.

(…)

Oubliée ?

Depuis deux ans, le pays compte une nouvelle reine adulée de tous. Mathilde est titulaire des diplômes adéquats, est très impliquée socialement et avait déjà de l’expérience avant de devenir reine, ce qui n’était pas le cas de Paola. Rares sont ceux à se remémorer l’époque où Paola était reine, un triste constat pour une femme qui s’est donné corps et âme durant tant d’années et qui s’est toujours mobilisée pour le bien-être de la population. Peu de personnes semblent l’avoir compris. Triste constat !

Par Helena Ten Brugghe

>>> Lire l’intégralité de l’article dans le numéro de décembre 2015 de Royals.

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