Qui était vraiment Carolyn Bessette-Kennedy, et pourquoi ce mystère fascine encore aujourd’hui
Carolyn Bessette-Kennedy: rien que son nom, et ce choix de garder un double patronyme plutôt que d’adopter celui de la famille la plus prestigieuse des États-Unis, est une énigme. Disparue il y a 25 ans aux côtés de sa soeur et de son célèbre mari dans un avion piloté par ce dernier, la blonde la plus traquée depuis Marilyn n’en finit pas de fasciner. Et semble même plus actuelle que jamais.
Elle avait 33 ans, elle les aura pour toujours. Disparue le 16 juillet 1999 au large de Martha’s Vineyard, dans un accident d’avion qui a également coûté la vie à son mari, John Fitzgerald Kennedy Junior, aux commandes du coucou, et à sa soeur Lauren Bessette, elle a eu un quart de siècle pour tomber dans l’oubli. Et pourtant, celle qui a suscité une véritable tempête médiatique dès l’annonce de sa relation avec le fils du 35e Président des États-Unis continue à faire couler des marées d’encre, et bénéficie même d’un regain d’attention depuis quelques années. C’est que malgré le temps qui passe, et en dépit de son décès tragique, aussitôt attribué à la funeste « malédiction Kennedy », Carolyn Bessette-Kennedy, ou plutôt, son allure au chic intemporel, est toujours au goût du jour.
Longue chevelure lisse et brillante qu’on qualifierait aujourd’hui de liquid hair, silhouette longiligne qui semble faite pour la pratique de l’équitation et du tennis, entre autres disciplines estampillées old money, tenues sans le moindre logo, coupes impeccables, couleurs neutres, bijoux discrets, en argent de préférence, visage nu pile dans l’esthétique clean girl… Comme durant les années 90, quand son blond polaire était montré en exemple aux coloristes de tout l’Occident et que sa dégaine minimaliste chic servait de modèle lors des virées shopping, Carolyn Bessette-Kennedy incarne à nouveau l’essence même du zeitgeist, et fait figure de modèle désormais d’autant plus difficile à répliquer qu’il faut se baser sur une poignée de photos d’archive plutôt que de pouvoir compter sur des aperçus quotidiens de ses tenues.
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Un défi qui aurait probablement été similaire si la jeune femme, promue à une belle carrière dans la mode, voire, qui sait, à la Maison Blanche aux côtés de son mari, avait survécu à leur accident d’avion.
C’est que la native de White Plains, dans l’État de New York, se distinguait aussi par son attitude farouche face aux médias, et à sa volonté de préserver coûte que coûte ce qui lui restait de vie privée. Il semble donc peu probable qu’elle se soit adonnée de son plein gré au partage de ces photos respostées ad nauseam par des Millenials aussi nostalgiques qu’éblouis, qui ont fait d’elle une icône de style 2.0.
Belle, rebelle, célèbre, secrète, privilégiée, maudite, charmante, ensorcelante, traquée, dangereuse: qui était donc Carolyn Bessette-Kennedy? 25 ans après sa mort, le mystère ne semble toujours pas résolu, et pas non plus sur le point de l’être, malgré une fascination continue. Qui voit l’ancienne chargée des relations clients chez Calvin Klein faire l’objet de différents ouvrages actuellement au rayon nouveautés des libraires, de Carolyn et John de Stéphanie des Horts à Once Upon a Time: The Captivating Life of Carolyn Bessette-Kennedy d’Elizabeth Beller en passant par A life in fashion: CBK, où Sunita Kumar Nair retrace son influence mode dans un beau livre à l’élégante couverture cartonnée.
Blonde ambition
Des biographies posthumes comme autant de tentatives de comprendre comment la fille cadette d’un couple de la classe moyenne a su séduire le parti le plus convoité d’Amérique voire même du monde, mais aussi et surtout pourquoi, une fois un tel coup accompli, elle a eu l’air toujours plus malheureuse, elle à qui tout semblait pourtant sourire.
Née deux ans après l’arrivée des jumelles Lauren et Lisa, Carolyn n’a que 8 ans quand ses parents divorcent. Elle part s’installer avec sa mère, Ann, dans le Connecticut, et n’aura par la suite que très peu de contact avec un père qu’elle blâme pour la dissolution de la famille. Après des études à l’université de Boston, elle met le cap sur New York et monte rapidement les rangs chez Calvin Klein, où son allure tant que son don pour convaincre les clients les plus exigeants de se laisser aller à des achats débridés lui permettent rapidement de devenir chargée des relations avec les célébrités.
Selon la légende, c’est d’ailleurs alors que John Kennedy Junior venait chercher des costumes au QG du label new-yorkais qu’il l’aurait aperçue pour la première fois, même si d’autres leur prêtent une rencontre fortuite lors d’un jogging à Central Park. Là où toutes les versions s’accordent, c’est que pour l’héritier de la plus célèbre famille du pays, c’est le coup de foudre immédiat, et très vite, celui qui compte Daryl Hannah, Sarah Jessica Parker et même Madonna parmi ses conquêtes n’a plus d’yeux que pour elle.
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Et l’épouse le 21 septembre 1996, dans la minuscule chapelle d’une île perdue en plein coeur de l’État de Géorgie, histoire d’échapper aux paparazzi. La mariée, élégante et distinguée dans son fourreau de soie rehaussé d’un simple chignon, est sublime. Le couple, irrésistible. La légende est en marche, rien ne dit qu’elle va finir en tragédie, mais déjà, les racontars entachent l’image de ce duo presque trop beau pour être vrai.
Gloire et déboires
Riches, jeunes, séduisants, sportifs, promus à un brillant avenir… Ils ne manquerait pas plus qu’ils soient heureux! Et justement, les clichés volés d’eux les montrent le plus souvent la mine sombre, quand les voleurs d’images ne les immortalisent carrément pas en pleine dispute violente dans un parc. Avec ou sans John, Carolyn fait grise mine, rentre la tête dans les épaules, a les traits tirés et les yeux cernés. On la dit infidèle, non, attendez, c’est lui qui la trompe, ils sont au bord du divorce, elle a sombré dans la drogue…
« Tous les livres que j’ai pu trouver ont été écrits par des amis de John, qui n’ont pas été tendres avec Caroline » concède Stéphanie des Horts, dont le portrait, bien que nuancé, dépeint lui aussi une jeune femme en pleine spirale descendante, entre paranoïa grandissante, repli et cocaïne.
« J’ai la chance d’avoir des amis proches qui travaillent pour Paris Match et qui m’ont ouvert les archives du magazine. Tous les articles évoquaient de manière plus ou moins discrète la consommation de drogues, et des copains qui les ont pas mal fréquenté à l’époque me l’ont assuré: c’était elle, pas lui. John était accro aux sensations fortes, mais pas aux substances, alors qu’elle s’est réfugiée dans la drogue et est devenue encore plus parano. Sur la fin, elle vivait presque cloîtrée dans leur appartement, elle avait rejeté tous les copains de John ainsi que sa famille et refusait de sortir de peur de devoir affronter les photographes. C’est intéressant, parce que quand on se marie avec quelqu’un comme lui, c’est comme d’entrer dans la famille royale, c’est le rêve de toute petite fille. Les Kennedy sont les aristocrates de l’Amérique, donc bien sûr, elle a été prise en photo, mais pas tant que ça, et John lui avait expliqué comment gérer: il suffisait de leur en donner un peu et ils vous foutaient la paix. Mais en refusant, parce que Carolyn était une fille qui disait non à tout, les photographes se sont mis à la traquer ».
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Et un quart de siècle plus tard, ces images sont à nouveau partout au gré de la célébrité renouvelée d’un couple, et d’une icône de style, qui n’en finit pas de fasciner.
En toute sobriété
« Lui parce que c’est un Kennedy et que sa famille fascine depuis toujours, et elle parce qu’elle est l’incarnation du style quiet luxury qui cartonne depuis un moment. Quand ma fille de 29 ans a su que j’écrivais un livre sur Carolyn Bessette-Kennedy, elle a trouvé ça génial » sourit Stéphanie des Horts. Pour qui la disparue était « très en avance sur son temps. À l’époque, elle était la seule à s’habiller de manière aussi sobre, ce qui lui allait très bien, et elle est devenue iconique en portant des pièces finalement assez simples ».
Et en refusant de rentrer dans le moule de l’épouse parfaite que la foule frémissante (des médias, des admirateurs mais aussi des détracteurs) avait pourtant préparé pour elle. CBK, une parano droguée, là où on attendait d’elle toutes les qualités requises d’une First Lady?
Pas si vite. Bras droit de JFK Junior, dont elle fût l’assistante au sein de la rédaction de son magazine d’infotainment, George, RoseMarie Terenzio a consacré une (auto)biographie émouvante au couple dont la tragédie l’a frappée d’autant plus fort qu’elle séjournait dans leur appartement quand leur avion s’est écrasé en plein vol. Et si son Fairy Tale Interrupted déborde d’admiration pour son illustre patron mais aussi pour l’épouse de ce dernier, qui l’avait prise sous son aile, il est aussi truffé d’anecdotes qui montrent un autre visage de Carolyn Bessette-Kennedy.
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Envers et contre tous
« Carolyn n’était pas l’ombre de John, elle était son égale. Il respectait son expertise et lui demandait son avis sur les couvertures du magazine ou bien sur les créateurs de mode à contacter. De ce que j’ai pu en voir, John était plus heureux quand Carolyn était là » assure RoseMarie Terenzio, qui apporte un élément d’explication à pourquoi cette dernière a été si critiquée en soulignant que « comme chaque femme intelligente, elle avait le don d’attirer l’attention de son mari sur des choses qu’il n’avait pas forcément envie de voir. Par exemple, en l’aidant à faire la différence entre ceux qui voulaient profiter de sa générosité, et ceux qui méritaient légitimement son attention ».
De là à imaginer que ceux qui ont rédigé ou donné des témoignages peu flatteurs sur l’épouse de John Kennedy Junior appartenaient à la première catégorie… Son ancienne secrétaire l’affirme: contrairement aux rumeurs persistantes, Carolyn ne se droguait pas. Elle avait par contre le don d’aider les autres à se sentir séduisants et plus confiants en eux, quitte à jouer les fées fashion et à leur offrir une nouvelle garde-robe, comme ce fût le cas pour RoseMarie.
Qui concède que le couple pouvait parfois se déchirer, par exemple « quand elle restait des heures durant au téléphone et qu’il n’arrivait pas à la joindre, ou bien qu’elle se jetait corps et âme dans la résolution des problèmes des autres, et que John se sentait délaissé. Mais quel que soit le problème, ils parvenaient toujours à en rire. Ils ne se prenaient pas au sérieux, et avaient l’un pour l’autre un immense respect, qui a contribué à l’évolution rapide de leur relation, et fait qu’en un an seulement, ils sont passés de quelques rendez-vous à un emménagement ensemble ».
La rumeur qui veut qu’elle l’ait fait poireauter des semaines avant d’accepter sa demande en mariage? Faux, jure l’ancienne secrétaire, qui pointe que leur silence à ce sujet n’était qu’une manière pour eux de tenter de retarder la déferlante d’attention qu’ils savaient que la nouvelle déclencherait.
La paranoïa de Carolyn? RoseMarie Terenzio raconte la meute de photographe postés chaque jour devant l’immeuble du couple, et le sentiment d’emprisonnement de la jeune femme, forcée de sortir de chez elle à l’aube ou bien d’affronter les paparazzi et leurs provocations.
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« Carolyn ne savait pas faire comme John et poser naturellement pour eux. Et même si elle l’avait pu, ça n’aurait rien changé, parce que ces photos se vendaient beaucoup moins bien que celles où elle avait l’air au bord du gouffre, donc ils ne reculaient devant aucune ruse vicieuse pour obtenir ce genre de clichés » dénonce encore l’auteure de Fairy Tale Interrupted.
Carolyn Bessette-Kennedy, l’icône tragique
Qui écrit avoir dû à maintes reprises jouer les arbitres quand les tensions inhérentes à leur vie extrêmement publique devenaient source de disputes pour John et Carolyn. Laquelle, échaudée, avait refusé d’accompagner son mari au mariage de sa cousine, Rory Kennedy, dans le domaine familial de Hyannis Port.
Une cérémonie prévue pour le 17 juillet 1999, en route vers laquelle l’avion piloté par John Kennedy Junior et transportant son épouse ainsi que la soeur de cette dernière s’est écrasé dans l’océan, tuant ses trois occupants sur le coup.
« Écoute-moi bien Carolyn. Tu n’as pas envie de forcer John à devoir expliquer pourquoi tu n’es pas là, pas plus que tu n’as envie d’offrir ton absence à la vindicte populaire. Tu es déjà assez critiquée comme ça, alors achète-toi une robe et je te commande une voiture vers l’aéroport » se souvient lui avoir dit RoseMarie Terenzio le jour du vol fatidique, ayant réussi sans le savoir de la convaincre à rejoindre son mari non pas à un mariage mais bien jusqu’à ce que la mort les sépare…
Sans cette tragédie, qui sait où ils seraient aujourd’hui, et même, s’ils seraient encore ensemble.
Dans les semaines précédent sa mort, il se murmurait que le fils du Président s’apprêtait lui aussi à entrer en politique, avec comme objectif ultime, la Maison Blanche. Et Carolyn comme First Lady? « Je pense que s’ils avaient survécu et que cela n’avait tenu qu’à John, ils seraient toujours ensemble aujourd’hui, parce qu’il l’aimait plus que tout et qu’il était prêt à tout pour la garder. Mais elle était totalement à la dérive… Peut-être que s’ils étaient entrés en politique, cela les aurait sauvés » hypothèse Stéphanie Des Horts. Selon laquelle Carolyn avait besoin, comme une autre tragique blonde célèbre avant elle, d’être cadrée.
« Quand on regarde Diana, faire partie de la famille royale l’a brisée, mais le jour où elle s’est donné le rôle de princesse du peuple, tout a changé. Carolyn avait besoin qu’on lui donne une fonction, et si j’avais pu imaginer un chapitre où ils avaient survécu, j’aurais mis John sur la route de la présidence et Carolyn à ses côtés, confie l’auteure française. Ça aurait été extraordinaire: il suffit de regarder JFK et Jackie, qui formaient le plus beau couple présidentiel au monde, et John et Carolyn auraient pu reprendre le flambeau. Les gens ont besoin de rêver, et ils auraient pu leur offrir ça ». Malheureusement, le rêve s’est achevé en cauchemar dans les eaux sombres de l’océan Atlantique.
John Fitzgerald Kennedy Jr. allait sur ses 39 ans, Carolyn Bessette-Kennedy avait soufflé ses 33 bougies quelques mois auparavant, et quelques semaines seulement après le crash, ils auraient célébré leur troisième anniversaire de mariage. La frontière entre le conte de fées et le faits divers peut être cruellement mince.
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