Moins de stress, plus de sommeil: pourquoi garder son doudou à l’âge adulte devrait être encouragé
Source de gêne voire même de honte, le fait de toujours dormir avec un doudou à l’âge adulte devrait pourtant être célébré. C’est que la pratique est non seulement très répandue, mais aussi bénéfique pour la santé mentale et le sommeil.
« Viens, je dois te montrer quelque chose ». Chuchotis, mines sombres, la scène est imbuée de toute la gravité dont on est capable à l’âge de 6 ans. Dans sa chambre aux murs pastels, une des deux fillettes présentes ouvre cérémonieusement le premier tiroir de la commode qui jouxte son lit. Dedans, confortablement installé sur une pile de pyjamas, l’inséparable d’hier relégué aujourd’hui au statut de relique.
Son doudou, désormais délaissé « parce que je suis grande, je n’en ai plus besoin ». Pour sa petite camarade de jeu, pas prête à se séparer de son ourson devenu rêche à force d’être enlacé chaque soir au moment de trouver le sommeil, la démonstration fait l’effet d’un choc. Lui faudrait-il aussi bientôt se résoudre à destituer sa peluche fétiche de ses fonctions, et à la reléguer du lit à une armoire?
Près de 30 ans plus tard, l’ourson est plus râpeux que jamais, mais la réponse est toujours bien « non ». Et si d’aucuns pourraient y voir un comportement marginal, voire même une source de malaise, le fait est qu’en Belgique, pas moins d’un adulte sur cinq dormirait encore avec une peluche. Des chiffres tirés d’une enquête commandée à l’été 2024 par le fabricant d’étiquettes nominatives My Nametags et qui, s’ils semblent déjà élevés (1.87 millions de nos compatriotes dormiraient ainsi avec leur doudou à l’âge adulte) font toutefois pâle figure à côté de ce qui se passe chez nos voisins français.
Dans un reportage diffusé en février dernier, TF1 allait en effet jusqu’à affirmer que dans l’Hexagone, « un adulte sur deux a encore un doudou et dort même, parfois, en sa compagnie ». La petite fille qui avait solennellement mis son doudou à la retraite lors de son passage à l’école primaire serait donc l’exception, et non la norme?
Ce qui est certain, c’est qu’en ayant ainsi renoncé très jeune à s’endormir avec sa peluche dans les bras, elle s’est privée de pas mal de bénéfices avérés.
Moins de stress et plus de confiance en soi
Car avec une telle prévalence de cette relique d’enfance à l’âge adulte, il n’est pas vraiment étonnant que la science ait décidé de s’y intéresser. Ce qui est plus surprenant, peut-être, c’est ce que les études sur le sujet ont démontré.
En France, une étude auprès de 12.000 volontaires, menée par la chercheuse Anne-Sophie Tribot en collaboration avec des scientifiques de l’Université de Montpellier, d’Aix-Marseille, du CNRS, de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité et de l’IRD, a ainsi révélé que le « pouvoir » du doudou resterait intact quel que soit l’âge de la personne qui en bénéficie. Comprendre: « la perception du réconfort d’un nounours ne change donc pas au fil de la vie ». Donc aussi bien adulte qu’enfant, sa présence a des vertus anti-stress et réconfortantes, et permettrait aussi de mieux dormir.
D’après les résultats d’une autre étude, menée en 2013 à l’Université d’Amsterdam et publiée dans Psychological Science, le doudou permettrait également de contrôler les pensées parasites, et même de calmer les angoisses liées à la mort. « Le simple fait de toucher un ours en peluche peut apaiser les craintes existentielles » affirmait alors Sander Koole, le psychologue à l’origine de l’étude. Et de préciser encore que le doudou pourrait également contribuer à améliorer l’estime de soi.
Moins de stress, plus de confiance en soi, un sommeil de meilleure qualité… Alors, doudou pour tous? Pas si vite.
Le doudou, soutien précieux à l’âge adulte
C’est que malgré la proportion d’adultes qui dorment encore avec Pinpin ou Teddy, cette cohabitation n’est pas toujours simple – du moins, quand il s’agit de vivre cet amour au grand jour.
Ainsi, si 82 % des adultes qui dorment avec une peluche se disent fiers de partager leur lit avec leur doudou, 36 % d’entre eux craignent de « passer pour des enfants » selon l’étude de My Nametags, dont le logo n’est autre qu’un ours en peluche.
« Les hommes sont plus enclins à garder le secret quant à leur peluche par crainte de réactions négatives. C’est compréhensible, car près d’un tiers (32 %) de ceux qui en ont une ou en ont eu une un jour trouvent étrange qu’un adulte ait une peluche » ressort-il encore de l’étude, qui pointe que 41% des adultes qui dorment toujours avec leur doudou préfèrent le garder secret, « les hommes tirant un peu la moyenne vers le haut (51 % contre 35 % chez les femmes ».
Et ce alors même que « près de 9 personnes concernées sur 10 (86 %) affirment que dormir avec une peluche a un effet positif sur leur bien-être mental. Les Belges ne peuvent globalement que leur donner raison, puisque 7 compatriotes sur 10 reconnaissent qu’une peluche peut réduire le stress », toujours selon My Nametags. « Les doudous incarnent « des objets transitionnels » pour certains adultes, tels des totems protecteurs, des objets porte-bonheur qui les renvoient à leur propre finitude car on sait qu’il sera tout le temps présent » affirmait récemment au micro de Radio France la psychologue Catherine Pierrat. Dans un monde en crise, le soutien à la résilience émotionnelle offert par la présence de ce petit bout d’enfance n’est pas à négliger.
Mais attention toutefois à adopter une approche adulte du doudou: si, enfant, le moment tant redouté du lavage était un déchirement à chaque séparation temporaire, il ne s’agit pas de faire l’impasse sur le rafraîchissement d’un objet qui peut vite se transformer en nid à bactéries s’il n’est pas lavé à intervalles réguliers. La sagesse populaire (et les sites dédiés au tâches ménagères) s’accordent pour recommander la fréquence d’un lavage par mois afin que vos nuits avec Doudou restent douces. Et si la crainte de faire preuve d’immaturité vous empêche encore pleinement de profiter de la présence continue de votre peluche après toutes ces années, sachez que Margot Robbie a confié dormir chaque nuit avec son lapin en peluche, tandis que le Roi Charles, lui, ne s’est jamais séparé du teddy qu’on lui avait offert quand il était petit. Si c’est bon pour une actrice oscarisée et le roi d’Angleterre, alors, pourquoi se priver?
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