En Afrique du Sud, on a testé le safari enfants admis
Partir sur le continent noir à la découverte des grands mammifères, avec un môme: le défi peut paraître aussi grand que la faune à observer. Mais pari réussi, tout le monde a été conquis!
«Good morning madam, this is your wake-up call. Your game drive will start in half an hour.» Il est 5 heures du matin quand le téléphone retentit dans la chambre. Dans un monde normal, nous ne voudrions pas, pour tout l’or du monde, quitter un confortable lit d’hôtel en pleine nuit.
Mais la normalité, nous l’avons laissée hier à l’entrée de ce vaste domaine sauvage de 62.000 hectares, au Cap occidental de l’Afrique du Sud. Comment en est-on arrivés là? Ces dernières années, nous avons passé nos étés sous tente avec notre fils âgé de 5 ans aujourd’hui. Pour fêter nos 40 ans, nous avions envie de quelque chose de plus inhabituel, de plus palpitant, de plus luxueux aussi.
Autour de la table de la cuisine, on a procédé à un sondage. Est-ce que les membres de la famille avaient des souhaits particuliers quant à la destination ? Monsieur voulait surfer, junior voulait voir des guépards et Madame voulait un mélange de randonnée, de ville et de vin, si possible. Ce fut l’Afrique du Sud.
Ceci n’est pas un zoo
Après quelques jours à Cape Town et dans les environs, nous arrivons à la Sanbona Wildlife Reserve, à 3 heures de route vers l’intérieur des terres, au pied de la montagne Warmwaterberg. Le nom de l’endroit vient des San, les chasseurs-cueilleurs qui peuplaient ce territoire il y a des milliers d’années, et leur bona, la vision de ces gens.
C’est dans ce magnifique environnement, avec des vallées à perte de vue, 650 espèces végétales, des peintures rupestres et une grande diversité d’animaux sauvages que nous sommes réveillés par une sonnerie en pleine nuit.
Nous sautons dans nos vêtements. Dehors, Jaylee, notre ranger, un jeune homme qui a grandi dans la région, nous attend. Pendant les prochains jours, il sera notre guide. Dans sa grande Landrover, des bouillottes remplies d’eau chaude et des couverture polaires sont prêtes, parce que même si le soleil se lève très tôt, il fait encore frais en ce début de printemps. « Ce matin, nous allons chercher des rhinocéros et des zèbres », lance le guide.
Nous n’avons aucune idée de ce qui nous attend quand nous prenons place avec une autre famille dans le grand véhicule, dépourvu de fenêtres, pour bien voir tout ce qui se passe. Dans la plupart des safaris, les enfants sont admis à partir de 6 ans. Et il y a une raison. Les mômes peuvent se comporter de manière imprévisible et les animaux sauvages, ici, ne sont pas ceux d’un zoo.
Des cris ou des pleurs soudains peuvent être interprétés comme un danger. A Sanbona, les petits sont bienvenus à partir de 4 ans et en tant que parents, nous supposons que notre fils, presque 5 ans à ce moment-là, va bien suivre les règles – ne pas crier, rester assis. Et c’est parti !
L’histoire d’une éco-réserve
On l’avoue : avant ce voyage, nous avions une image totalement erronée des safaris. Cela nous semblait être une activité de riches urbains blancs qui veulent sortir de leur bulle pour une expérience à la Out of Africa, avec un chauffeur qui les emmène en voiture jusqu’à un lion. Un animal qui vient probablement d’être nourri par les gardiens du parc, pour qu’il reste calme à proximité de ces touristes. Nous avions tout faux.
Ce n’est pas du tout comme ça que ça se passe dans la Little Karoo, la vallée où se trouve Sanbona. Chaque bête qui se promène ici doit trouver sa nourriture elle-même. Et chaque bête qui se promène ici le faisait il y a 2.000 ans déjà. Mais beaucoup de plantes et d’animaux ont péri il y a 200-300 ans.
C’est là la plus grande mission de cette réserve naturelle : restaurer la biodiversité et réintégrer la faune qui circulait librement il y a des milliers d’années parmi les San. Pour atteindre cet objectif, des études à grande échelle sont menées, ainsi qu’une surveillance étroite et la formation de la jeunesse locale en gardiens de parc expérimentés.
Cela a commencé en 1998, avec l’idée d’exploiter des lodges privés sur un terrain qui était bien plus petit que ce qu’il est aujourd’hui. Quand il s’est avéré que le succès financier n’était pas au rendez-vous, un couple qui avait fait fortune dans l’industrie du café et du sucre et qui voulait rendre une partie de leur bénéfice au pays, a racheté le domaine.
Il en a doublé la superficie lorsqu’il a appris qu’il y avait ici un projet de réintroduction du rhinocéros noir, menacé d’extinction, comme les guépards et les lions blancs. Aujourd’hui, Sanbona est géré en non-profit, personne n’est propriétaire du territoire.
S’entraîner à mieux regarder la faune
«Là ! Des babouins!», dit Jaylee, qui coupe le moteur de la voiture. Une troupe de singes se balade calmement dans les rochers qui nous entourent. «Les éléphants traversent la montagne», entend-on dans le walkie-talkie avec lequel communiquent tous les rangers qui circulent dans le domaine.
«A gauche, des springboks», lance notre accompagnateur. On regarde et on cherche, mais il faut s’habituer au vaste paysage, rempli de fleurs violettes, de rochers erratiques et de nombreux buissons. Nos yeux ne sont pas assez entraînés et les animaux ne se détachent pas de la végétation.
Heureusement il y a plusieurs sorties safari comprises dans notre séjour de deux jours, chaque fois de 3-4 heures. On peut en faire une au lever du soleil et une au coucher, ce qui en vaut absolument la peine.
Aucune escapade ne se ressemble. Un jour, on part des heures à la recherche de troupeaux d’éléphants ou de girafes. Le jour suivant, on est en quête de lions et de zèbres. Les babouins, les buffles et les springboks sont quasiment toujours visibles, tout comme le décor désertique, qui est vraiment à couper le souffle.
L’âge idéal pour un safari en famille
Autre image fausse que nous avions des safaris : on vient ici pour voir les grands fauves. Mais quand Jaylee nous parle des deux plus petits papillons du monde qui volètent là, ou d’une fleur qui a besoin de cent ans pour pousser et qui ne fleurit qu’une seule fois, ou d’un arbuste vieux de 1.000 ans qui ne grandit que d’un demi-millimètre par an, nous sommes pendus à ses lèvres. C’est de la pure poésie, prononcée par un jeune homme qui a un fusil à ses pieds.
Entre nos «oh» et nos «ah», Jaylee a à nouveau repéré quelque chose: «Regardez, les yeux d’un hippopotame qui dépassent de l’eau. Vous saviez que cette espèce ne sait pas nager ? Elle s’immerge dans l’eau pour refroidir sa peau du soleil. Selon mon manuel, les hippopotames ne s’éloignent jamais de plus de 18 kilomètres de l’eau. Mais j’en ai déjà rencontré un à 30 kilomètres. La nature ne suit pas forcément que ce prétendent les livres.»
Est-ce que ça vaut la peine de partir en safari avec un enfant en bas âge? Les avis divergent. Certains estiment que 5 ans, c’est trop jeune, parce que c’est un voyage cher et on ne sait pas s’il en gardera des souvenirs. Pour une expédition qu’on fera une fois dans sa vie, c’est peut-être mieux à partir de 8 ans.
Mais quoi qu’il en soit, à la fin de la première journée, notre fiston a déjà décidé que plus tard il veut devenir conservateur. Comme celui qui, nous explique-t-on, parcourt chaque soir tout le domaine pour noter dans son journal de bord où se trouvent tous les animaux, quelles proies ils ont trouvées, ou si un petit est né.
Tiens, une crotte de rhino
Un safari avec un enfant, ça provoque aussi pas mal de rires, comme lorsqu’on se trouve près d’une girafe avec son girafon et qu’on se retourne pour voir ce que sa progéniture en pense et que notre fils tourne le dos au spectacle parce qu’il veut manger un biscuit et que «la girafe ne peut pas le voir».
Spécialement pour les plus jeunes, Sanbona dispose d’un local en plein air avec des squelettes d’animaux. Et chaque enfant reçoit un livret avec des pages auxquelles sont accrochés des petits sacs en plastique, avec des missions à réaliser dont les adultes aussi peuvent beaucoup apprendre. «Place ici une branche de l’arbre préféré de la girafe pour ses repas.» Ou «Place ici une crotte d’éléphant».
Notre ranger nous apprend d’ailleurs que les déjections des herbivores comme les rhinocéros et les éléphants sont essentiellement de l’herbe séchée et donc pas très sales. Grâce à Jaylee et à son regard perçant, nous trouvons vite une crotte de rhinocéros. Voilà qui fera impression la semaine prochaine à l’école.
Le luxe du Sanbona
Ce qui rend Sanbona si magique, en dehors de son magnifique environnement et de ses exceptionnels game drivers, c’est que pendant tout le séjour on n’a en réalité rien d’autre à faire que d’admirer la vue. Tout est réglé pour vous, du petit-déjeuner au souper et les chambres sont admirablement entretenues. Entre deux sorties, on peut lire, se relaxer à la piscine, se promener ou réserver un soin wellness.
La seule chose dont il faut se préoccuper, c’est le choix de son apéritif pour la sortie au coucher du soleil : gin tonic ou vin blanc ? A chaque expédition, un arrêt est prévu dans un endroit idyllique, pour un café, un thé ou un chocolat chaud le matin, et du vin, un cocktail ou un soft le soir.
Entre-temps, on a pu écouter des histoires plus incroyables les unes que les autres. Sur la raison pour laquelle il y a peu d’animaux qui circulent à Sanbona, pour qu’il y ait assez de nourriture à trouver dans les années où il pleut peu et avec peu de floraisons.
Sur la façon dont les deux uniques lions blancs sont décédés de mort naturelle l’an dernier, mais seront bientôt remplacés par deux nouveaux spécimens. Et sur ce qui explique que personne ne peut savoir combien de rhinocéros noirs il y a ici, parce qu’ils sont menacés d’extinction.
Et puis arrive le moment de notre dernière sortie. « A droite, des guépards !», crie notre fils, en tapant avec enthousiasme sur l’épaule de Jaylee. Nos yeux se sont habitués et nous le voyons tout de suite : il y a des springboks qui courent à toute vitesse dans le lointain. Mais notre petit n’est pas déçu, il est fier d’avoir repéré quelque chose avant le guide. La première graine de sa carrière de conservateur semble plantée.
En pratique
Nous avons pris le vol de nuit depuis Bruxelles vers Le Cap, avec escale à Francfort, avec Lufthansa. A partir de 750 euros par personne. lufthansa.com
Pour ce voyage, nous avons été conseillés par le tour operator belge Sur La Iri, spécialisé dans les voyages durables en Afrique. Sanbona était l’une des étapes de notre séjour, composé en fonction de nos souhaits. surlairi.com
A Sanbona, nous avons séjourné au Gondwana Family Lodge, àpd 610 euros la nuit pour 2 personnes (lit enfant compris). Le prix comprend petit-déjeuner, lunch, souper et deux sorties par jour. sanbona.com
À proximité
Le Cap se trouve à 3 heures de voiture de Sanbona. C’est votre première fois en Afrique du Sud ? Alors une visite dans les bidonvilles autour de la ville, avec l’OBG Uthando, est une entrée en matière confrontante mais enrichissante. Uthando.org
Sanbona se trouve le long de la Route 62, la plus longue route du vin au monde, avec toute une série de domaines viticoles où l’on peut faire des dégustations.
Chouette à faire aussi avec des enfants : le cap de Bonne-Espérance, Bouders Beach – réputée pour ses pingouins- et l’ascension de la montagne de la Table.
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