En avoir ou pas: la neige artificielle, un sujet de crispation dans les stations
Dans le sud-ouest de la France, la ville de Font-Romeu mise sur les canons à neige pour préserver ses activités de ski. En dépit des critiques des écologistes et d’une eau qui devient de plus en plus rare dans la région.
Pour l’une des stations les plus ensoleillées d’Europe, située dans les Pyrénées-Orientales, ce choix est assumé y compris face au réchauffement climatique.
Après avoir implanté ses premiers canons en 1976, la ville se targue aujourd’hui de pouvoir couvrir en neige artificielle jusqu’à 93% des 43 kilomètres de son domaine skiable qui compte 510 canons.
« On sait que pendant 35 ans, les 120 jours d’exploitation nécessaires pour faire vivre le territoire, on les aura », affirme Jacques Alvarez, directeur du domaine de Font-Romeu Pyrénées 2000.
Il précise que cette confiance s’appuie sur une étude de 2022, baptisée Climsnow, qui compile des données du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat des Nations unies), des paramètres météo et des indices d’humidité de l’atmosphère sur le long terme.
Cette position de Font-Romeu sur l’avenir du ski malgré le réchauffement climatique de la planète est cependant vivement critiquée par les écologistes, qui déconcent un « déni ».
« On n’est qu’au tout début de la catastrophe climatique qui nous pend au nez, et ils font toujours comme si les choses allaient rester telles qu’elles sont », déplore Nicolas Berjoan, un responsable du parti EELV dans les Pyrénées-Orientales.
« Usine à neige »
Dénonçant globalement la stratégie du tout-ski, les écologistes s’inquiètent spécifiquement de l’utilisation de l’eau nécessaire à la production de la neige artificielle alors que la tension est forte sur les ressources hydriques de la zone.
Dans les Alpes, la dénonciation du ski comme activité anachronique est même allée jusqu’à des dégradations de canons à neige. Rien de tel dans les Pyrénées, mais la question de l’accès à l’eau nourrit néanmoins les crispations.
Admettant à ce sujet une « inquiétude », élus et responsables de stations, comme les agriculteurs, appellent l’Etat à trouver très rapidement des solutions pour rassurer tous les acteurs économiques du territoire.
En attendant, le maire de la localité, Alain Luneau, indique que la délégation de service public vient d’être renouvelée au gestionnaire de la station avec à la clé « 30 millions d’euros d’investissements sur les 25 prochaines années ».
Aujourd’hui, les canons sont alimentés par une « usine à neige » construite en 2008 au coeur des pistes et que font fonctionner nuit et jour des « snowmakers » ou « nivoculteurs », comme ils préfèrent parfois s’appeler.
Ces employés se relaient pour alimenter les pistes en commandant le réseau de canons qu’ils surveillent sur des écrans.
La station a également investi dans des outils d’optimisation de l’or blanc: depuis l’an dernier, ses huit dameuses sont équipées de radars mesurant l’épaisseur de neige afin qu’elle puisse être répartie au mieux sur les pistes.
Alors que les autres stations du massif sont longtemps restées fermées faute de neige, Font-Romeu dit avoir tiré cet hiver son épingle du jeu « avec un domaine skiable ouvert de 70% » entre décembre et mi-janvier, et cela sans pratiquement aucun flocon naturel.
La station se félicite d’un chiffre d’affaires record, en hausse de 10% au 25 janvier par rapport à la même période de la saison passée.
D’autres stations ont elles, au contraire, décidé de tourner la page. Comme dans le Vercors (centre-est), où la mairie de Chateau-Bernard a décidé de favoriser les raquettes et le ski de randonnée.
En haut du télésiège, le refuge de la Soldanelle promet « panorama exceptionnel », séjour en yourte et expérience « sans voiture », pour les amateurs de randonnées sportives, de descentes VTT ou de découverte de la montage en famille. Le refuge a maintenu sa fréquentation, selon la mairie.
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