A Bordeaux, les codes du vin bousculés par les barriques en verre

vin de bordeaux

Au Château Olivier dans le Bordelais, le maître de chai déverse son sauvignon blanc dans une étrange barrique, en fait une cuve en verre devant préserver pureté et fraîcheur du raisin, alternative innovante au traditionnel tonneau en bois.

Cuves en inox, amphores en terre cuite, et autres oeufs en béton: depuis quelques années, de nouveaux contenants ont fait leur apparition dans les chais. 

Ce dernier venu sur le marché, commercialisé par l’entreprise Michael Paetzold depuis seulement deux ans sous la marque Wineglobe, a déjà conquis quelque 500 viticulteurs dans le monde en quête d’excellence.

Jusque dans le Bordelais, dans le sud-ouest de la France, où l’élevage se fait traditionnellement en fût de chêne. « On ne va pas se passer encore des barriques qui font partie de notre ADN! », prévient Anthony Gariador, maître de chai de ce grand cru classé de Graves dans l’AOC Pessac-Léognan, en rouge et en blanc.

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« Mais on se devait d’essayer. Un grand vin, c’est un ensemble de petits détails qui font la différence en bouche. Les Wineglobe vont nous permettre d’apporter de la complexité, une nuance supplémentaire au vin », espère ce professionnel qui prévoit de multiplier « les dégustations à l’aveugle » et « les mesures en arômes ». 

Lors de cette phase de test, le vin élevé dans huit de ces cuve de Pyrex de 220 litres – l’équivalent d’une barrique – laissant entrevoir sa couleur mordorée, pourrait intégrer celui élevé en tonneau lors de l’assemblage final.

Vin sans artifice

« Contenant idéal » pour le blanc, le Wineglobe « apporte longueur, fraîcheur persistante en bouche et 50% d’arômes en plus », assure Marie Paetzold, directrice générale de cette entité de l’entreprise Michael Paetzold, du nom de son père, inventeur de technologies de pointe pour le travail œnologique en cuverie.

Cette PME aux 30 brevets actifs s’est lancée dans la conception pour des vignerons bourguignons qui cherchaient un contenant en verre plus gros et moins fragile que les dames-jeannes dans lequel ils élèvent ou font vieillir leur vin de fin de barrique.

« La neutralité totale du verre, étanche en oxygène, permet l’expression entière du raisin, sans artifice et sans masque », selon Marie Paetzold, présente au milieu de tonneliers au salon Vinitech de Bordeaux, de mardi à jeudi.

« On est dans la pureté du terroir de la parcelle. C’est comme si en cuisine vous goûtiez une viande d’exception, sans sel, sans poivre, le bois étant juste l’épice supplémentaire », explique Frédéric Savart, créateur de champagnes au sud de Reims (nord-est).

Stéphane Derenoncourt, du domaine de l’A près de Castillon-la-Bataille, près de Bordeaux, évoque « un terrain expérimental assez génial », « plus proche des qualités originelles du raisin ».

Pour le rouge, dont le vieillissement passe par l’oxygénation traversant les pores du bois, son utilisation est davantage complémentaire lors d’assemblages, même si certains tentent un élevage 100% en verre, comme Gérard Courrèges, du Domaine Vaccelli en Corse. 

Autres avantages signalés: son hygiène parfaite et la diminution du recours au dioxyde de soufre, utilisé pour ses vertus antioxydantes et antiseptiques.

Utilisable « à vie »

Et, face au réchauffement climatique qui favorise des millésime chargés en sucre manquant d’acidité, le verre peut devenir un outil complémentaire. 

Comme au Domaine Christophe Perrot-Minot, en Côte de Nuits en Bourgogne où les Wineglobes servent à poursuivre quelques mois supplémentaires le vieillissement du vin élevé préalablement en barrique, au lieu de le mettre prématurément en bouteilles. 

« Le vin garde toute sa fraîcheur ainsi que sa netteté sans montrer aucun signe de fatigue », relate le maître de chai Jérôme Gay, qui en utilise une cinquantaine et prévoit de poursuivre l’acquisition. « On ne reviendra plus en arrière ».

Plus cher à l’achat – 4.000 euros contre 1.000 pour un fût en chêne – le wineglobe est utilisable « à vie » quand le bois doit être changé tous les 3 ans dans les grands châteaux.

Face à une demande grandissante notamment des pays de l’hémisphère Sud, la PME espère commercialiser en 2023 ses propres Wineglobes, jusqu’ici soufflés à bouche dans une verrerie d’Europe centrale. 

Elle construit dans son siège de Cadaujac, près de Bordeaux, un four pouvant produire quatre modèles de cuves, y compris des plus grandes de 440 litres, nouvelle tendance en tonnellerie.

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