Vins & co / Les bières triples

© MARTIN KNIZE / UNSPLASH
Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

Notre expert ès flacons décortique les tendances et noie les idées reçues. Cette semaine, gros plan sur les triples, cette fierté nationale au succès intact.

Bachelorette party

Cette chronique nous a été inspirée par un enterrement de vie de jeune fille. Juqu’aux petites heures du matin, les demoiselles carburaient… à la Jambe-de-Bois, une triple à 8% de volume d’alcool signée par la Brasserie de la Senne. A l’heure de la sour beer et des IPA, on n’en est pas revenu que les moins de 30 ans s’enthousiasment pour un genre brassicole presque centenaire. La triple, c’est la vitrine de la Belgique. Née dans le sillage de la Spéciale Belge, cette bière riche en matière première fait valoir, pour le dire vite, trois fois plus de céréales qu’une pils. Une recette de haute densité qui lui vaut une réputation internationale.

Buvabilité chérie

Avec son degré élevé d’alcool et sa bouche pleine, la triple aurait pu finir dans les oubliettes du goût, catégorie «bière à papa». Qu’est-ce qui a empêché cela? Une nouvelle génération de brasseurs artisanaux désireuse de redorer la blason d’une bière dont on fait officiellement remonter la naissance à 1934, année où est sortie la Westmalle Tripel qui reste «la mère de toutes les triples» malgré ses 9,5%. Pour preuve, un brasseur comme Jef Van den Steen (De Glazen Toren à Erpe-Mere), spécialiste incontestable, lui voue un véritable culte. Le coup de force des néobrasseurs? Il est technique. Emanuele Corazzini, Novabirra, le résume en une phrase: «Parvenir à proposer un bon ratio entre les alcools supérieurs et les esters de fruit.» Une fois cette épreuve réussie, la bière évolue sur le fil ténu entre puissance et buvabilité.

Un champ de taille

Preuve de la popularité de ce type de bière, AB InBev a récemment lancé la Victoria, une triple qui ne dit pas son nom, pour concurrencer une autre triple qui ne dit pas son nom, la Duvel. Car à l’heure où certaines canettes de bières américaines s’affichent à des montants indécents, une bonne triple incarne, pour les brasseurs, un eldorado promettant du corps, du fruit et de la fraîcheur à un prix tout ce qu’il y a de plus accessible. Sans oublier, comme le rappelle Emanuele Corazzini, sa capacité à servir des mets variés, qu’il s’agisse de plats traditionnels ou de cuisine asiatique.

En Stoemelings Curieuse Neus.
Cette triple ne fait valoir que 7% de volume d’alcool… ou comment jouer avec les limites d’un style tout en restant fidèle à son esprit. Mention pour les notes de banane et d’abricot super gourmandes.
2,50 euros. enstoemelings.be © Alexandre Bibaut

De Glazen Toren Ondineke.
Un bel hommage au romancier alostois Louis Paul Boon. On aime ce jus de couleur blonde dorée avec mousse abondante. Son goût est intense et fait valoir une légère amertume due au houblon.
7,50 euros (75 cl). glazentoren.be © Alexandre Bibaut
NovaBirra Big Nose.
Sur les installations de la brasserie De Ranke, Emanuele Corazzini réussit une petite merveille marquée par des houblons alsaciens et américains. Le coup de grâce: un dry hopping conférant des notes de fleurs et d’agrumes.
2,80 euros. novabirra.com © Alexandre Bibaut
Atrium Trio.
Joli défi: une triple réalisée par des brasseurs qui, à la base, n’aiment pas ça. Le résultat? Une bière 100% céréales refusant tout ajout de sucre. Bouche onctueuse, ponctuée de notes de houblon.
3,20 euros. maltattacks.com © Alexandre Bibaut

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