La peau s’expose à Paris

© Getty Images/iStockphoto

Elle a la taille d’un drap de lit et pèse deux fois plus que notre cerveau: la peau est l’héroïne, à partir de mercredi, d’une exposition au Musée de l’Homme à Paris conçue comme une exploration immersive du plus grand organe humain.

La peau couvre une surface de 1,5 m2 à 2 m2 selon les individus et elle pèse entre 3kg et 5 kg chez un adulte.

« On appréhende souvent la peau par rapport à son esthétique, son apparence. On ne réalise pas toujours que c’est elle qui permet aux organes internes de fonctionner correctement, en protégeant l’intérieur de notre corps du monde extérieur », souligne Françoise Bernerd, chercheuse chez L’Oréal, le groupe de cosmétiques qui a conçu l’exposition avec le musée public.

Pour commencer la visite, il faut se faufiler dans un tunnel dont les murs reproduisent en images très précises les différentes strates de la peau. En s’enfonçant, on passe de la couche cornée à l’épiderme puis au derme avec ses fibres longues.

Toujours grâce à l’imagerie, on comprend de l’intérieur la différence entre une peau claire et une peau foncée, beaucoup plus riche en mélanine, un pigment sombre qui protège des rayons du soleil.

Le visiteur est ensuite invité à déterminer la couleur de sa propre peau, en glissant la tête dans une sphère qui illumine le visage sans faire d’ombre. Cela permet d’identifier précisément chaque nuance de peau.

Si le volet biologique a été confié aux équipes de recherche de l’industriel, l’exposition comporte des ouvertures anthropologiques, chères au musée de l’Homme.

« Pour nous, les questions de peau sont absolument essentielles car c’est ce qui discrimine les gens », explique Alain Froment, biologiste et anthropologue au musée de l’Homme.

L’homme moderne (Homo sapiens) est une espèce africaine apparue il y a près de 300.000 ans. Sa peau était de couleur foncée, la mélanine le protégeant des effets nocifs des rayons UV (brûlures, cancers), rappelle le scientifique.

UVA « insidieux »

Puis vers 100.000 ans, le départ d’Afrique d’hommes modernes vers des régions moins ensoleillées, notamment l’Europe, a favorisé l’éclaircissement progressif de leur peau. Dans ces zones, une peau foncée était de nature à faire écran aux UVB nécessaires à la synthèse de la vitamine D, elle-même indispensable pour éviter le rachitisme. Les hommes à peau plus claire avaient donc un avantage évolutif dans ces régions nordiques.

L’exposition, qui se tient jusqu’au 3 juin, souligne également que la peau est l’organe du toucher. Grâce à un dispositif interactif, le visiteur peut vérifier ce qui se passe lorsque la peau est pincée, frottée, ou confrontée au froid ou au chaud: à chaque stimulation, un récepteur sensoriel de la peau s’affiche sur un mur.

Le processus de vieillissement de la peau est illustré par une séance d’animation visuelle (« morphing ») qui montre l’évolution du visage de trois femmes (asiatique, africaine, européenne) au fil des ans, selon que la peau est protégée ou pas. Une séquence parlante surtout lorsqu’on sait que 80% des signes de vieillissement sont dus à l’exposition solaire.

Si les UVB, très puissants, sont responsables des coups de soleil, les UVA, présents en très grande quantité, sont beaucoup plus insidieux car ils sont très pénétrants et « on ne sent rien » alors qu’ils endommagent les cellules, pointe Françoise Bernerd, qui étudie ces questions au centre de recherche de L’Oréal à Aulnay-sous-Bois, près de Paris.

L’exposition se termine par un chapitre sur la reconstruction de la peau humaine, technique apparue dans les années 1970. Utilisée pour les greffes des grands brûlés, elle permet aussi d’éviter l’expérimentation sur l’animal.

Et la bio-impression 3D, qui démarre, ouvre de nouvelles perspectives, notamment grâce à sa précision.

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