La chasse et ses bienfaits

© charlotte lamby

Une fois les constellations et les lunes levées, j’aime à parcourir sans fatigue les méandres démesurés de la toile en quête de nourriture. Ma chasse est une affaire nocturne. Une fois que le monde et ses  » choses humaines  » s’effacent à l’arrière-plan, les perspectives, les lignes de fuites, se redessinent, claires. Je cherche ma came. Il m’en faut de la bonne, de la longue, de la puissante. Ma tête et mes veines l’exigent. Cela fait un bail que j’ai déserté les supermarchés et la réclame, leurs offres spéciales et leurs emballages. Tout y ressemble à des déchets. Il me faut de l’herbe haute, des ronces et des orties. Trouver un poste, guetter, patienter. L’oreille au vent. Renifler. Pister. Tant pis s’il pleut. De cette façon, j’ai attrapé l’album The Peregrine signé par Lawrence English. Une musique inspirée du roman du même nom (dont je n’ai pas encore effeuillé les lignes) de J.A. Baker. OEuvre naturaliste réputée qui dépeint le quotidien du faucon pèlerin.

Vous décrire ici ce que j’y ai entendu m’échappe. Si ce n’est une densité d’une complexité absolue. Sans lignes droites. Du ralenti en accéléré. Et l’inverse. Un piqué à 300 à l’heure. Simple conseil, n’écoutez pas ce disque sans combinaison anti-G, vos artères vous remercieront. Cette nuit-là, je me suis plongé dans The Peregrine trois fois d’affilée, frôlant l’overdose. Ensuite, le jour a logiquement pointé ses lueurs frêles. Le réveil a hululé son chant digital. Et avec lui, l’erreur humaine prête et dispose pour un nouveau massacre. Vers 9 heures du matin, de retour dans le monde du travail au goût éteint et poussiéreux, mes collègues m’ont demandé, hilares, où et avec qui j’avais passé la nuit. Dans le ciel avec un faucon, les gars. En plein ciel aux côtés d’un faucon. Vous savez, la nature… Cette héroïne pure.

Jérôme Mardaga

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content