Peut-on encore visiter Taïwan sans danger? Oui, mais…
Le président taïwanais Lai Ching-te s’est engagé ce jeudi à « résister à l’annexion » de l’île, que la Chine revendique comme une partie de son territoire à réunifier un jour.
« Je maintiendrai aussi l’engagement de résister à l’annexion de Taïwan ou l’empiètement de notre souveraineté », a déclaré M. Lai lors d’un discours prononcé devant le palais présidentiel de Taipei pour la fête nationale, qui marque le 113e anniversaire du renversement de la dynastie Qing et de la fondation de la République de Chine.
Pékin a intensifié sa pression militaire et politique sur Taïwan ces dernières années. Il n’a jamais renoncé à employer la force militaire pour reprendre le contrôle de l’île et a organisé trois séries de manœuvres de grande ampleur ces deux dernières années, faisant intervenir son aviation et sa marine pour encercler l’île. Pékin envoie aussi presque quotidiennement navires de guerre et avions de chasse patrouiller autour de Taïwan, gouverné de manière autonome.
Le ministère taïwanais de la Défense a indiqué ce jeudi 10 octobre que 27 avions militaires chinois et neuf bâtiments de la marine chinoise avaient été identifiés autour de l’île en l’espace de 24 heures, de mercredi à jeudi.
Mercredi, un haut responsable en matière de sécurité a indiqué à l’AFP que Taïwan se trouvait en état d’alerte en raison de manœuvres militaires chinoises à proximité ayant donné lieu à « plusieurs déploiements maritimes ». Selon un haut responsable américain interrogé mercredi, la Chine pourrait se servir des célébrations de la fête nationale taïwanaise « comme d’un prétexte » pour conduire des manœuvres militaires.
Le ton monte
De son côté, Pékin a accusé mardi le président Lai d’alimenter « les hostilités », d’après les médias d’Etat chinois, après que M. Lai eut déclaré qu’il était « impossible » que la Chine soit la « mère patrie » de Taïwan. Les relations entre Pékin et Taipei sont exécrables depuis 2016 et l’arrivée à la présidence de Taïwan de Tsai Ing-wen, puis de son successeur en mai 2024, Pékin qualifiant M. Lai de « séparatiste ».
Pour rappel, les différends entre Pékin et Taipei remontent à la longue et meurtrière guerre civile qui a opposé les combattants communistes menés par Mao Tsé-toung aux forces nationalistes de Tchang Kaï-chek. Défaits par les communistes, qui ont fondé la République populaire de Chine le 1er octobre 1949, les nationalistes de la République de Chine se sont réfugiés avec de nombreux civils à Taïwan, une des seules parties du territoire national alors non conquises par les forces de Mao Tsé-toung.
Suite à ses dernières déclarations, la Chine a condamné jeudi l' »opinion entêtée » du président taïwanais au sujet de la souveraineté de l’île, le dirigeant ayant promis de « résister à l’annexion » de la Chine. La prise de parole de M. Lai « a exposé son opinion entêtée sur l’indépendance de Taïwan et sa sinistre intention de faire escalader les tensions dans le détroit de Taïwan en raison d’intérêts personnels d’ordre politique », a déclaré la porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères Mao Ning dans son point presse habituel.
Bien préparer son périple à Taïwan
Mais qu’est-ce que cela implique pour les touristes? Avec la menace croissante d’une escalade des tensions entre la Chine et Taïwan, est-il encore sûr de la visiter?
Dans son discours, le président Lai a encore dit espérer « un dialogue et des échanges sains et pacifiques » avec Pékin, l’exhortant en outre à user de son influence pour mettre un terme aux conflits touchant le Proche-Orient et l’Ukraine. Notant un « ton adouci » par rapport au discours d’investiture de M. Lai, Fang-yu Chen, professeur assistant de sciences politiques à l’université Soochow à Taipei, estime que les références faites à l’histoire de la République de Chine lors de sa prise de parole risquent d’attirer le courroux de Pékin. « Cet accent pourrait provoquer Pékin, puisque cela suggère que Lai revendique le contrôle du récit historique », juge M. Chen.
Du côté du SPF Affaires étrangères, on note qu’il « existe à Taiwan une petite criminalité mais peu de touristes ou d’expatriés en ont été victimes ces dernières années », et on assure qu’il « n’y a pas de menace terroriste identifiée », sans faire la moindre mention d’un éventuel conflit qui pourrait éclater sur l’île. Leurs homologues français, eux, ont placé l’ensemble de l’île en « zone de vigilance normale » (la catégorie la plus safe) et pointent la « forte activité sismique », les typhons et les « agressions épisodiques d’étrangers » comme seuls dangers. La CIA, elle, ne recense aucun de ces points d’attention, se contentant d’égrener les vaccins nécessaires avant une visite de l’île.
Comprenez: malgré l’escalade (verbale) des tensions entre la Chine et Taïwan, à l’heure actuelle, aucun organisme gouvernemental ne recommande d’éviter d’atterrir à Taipei. Il s’agit toutefois de se tenir au courant de l’évolution de la situation et d’éviter d’y réserver un voyage trop longtemps à l’avance, car si la situation géopolitique actuelle nous a appris quelque chose, c’est qu’un pays peut se transformer en zone de conflit en moins de temps qu’il n’en faut pour dire « tous aux abris ». Prudence donc: un voyageur préparé en vaut deux, surtout en ce qui concerne la sécurité.
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Article rédigé en partie sur base de dépêches AFP.
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