Un local scout décoré de dessins d’Hergé classé au patrimoine, à Bruxelles
Son passage chez les scouts a beaucoup compté pour Hergé. Au début des années 1920, le futur créateur de Tintin s’y fait remarquer en exerçant son talent sur les murs du local de sa patrouille, qui est désormais classé à Bruxelles.
Pour « ses décors peints attribués à Hergé », la « totalité de l’ancien local scout de l’Institut Saint-Boniface », dans la commune bruxelloise d’Ixelles, a été classé « comme monument », selon une décision prise le 17 février par l’exécutif régional.
Nous avons classé les fresques d’Hergé. Ces fresques constituent un témoignage rare des premières oeuvres d’Hergé qui sont intimement liées au scoutisme.
Respect the past, create the future!#BrusselsForPeople pic.twitter.com/zmKJvEwNfr— Pascal Smet (@SmetPascal) February 17, 2022
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.
Les autorités ont salué « un témoignage rare » des premières oeuvres exécutées à l’âge de 15 ans par Georges Rémi, alias Hergé, qu’il était important de sauvegarder et de restaurer.
L’authentification de ces dessins au pochoir non signés –représentant des chevaliers armés, des scouts grimpant à la corde ou en train de ramper– a pris des années, ont raconté à l’AFP lors d’une visite des lieux Yves Rouyet, élu d’Ixelles, et Thierry Scaillet, archiviste à Saint-Boniface, établissement catholique réputé de la capitale belge. Tous deux ont milité pour le classement, et se félicitent d’une opération qui est le résultat d’un heureux concours de circonstances.
selon M. Scaillet, rien n’aurait été possible sans le témoignage, recueilli dans les années 1990, d’un ancien camarade scout d’Hergé ayant participé à la décoration du local soixante-dix ans plus tôt.
Ce dernier est alors persuadé que ce qui a été dessiné par Hergé (1907-1983) a disparu sous des couches de peinture. Mais dans son récit, enregistré, il livre un luxe de détails qui fera tilt au moment où les chefs scouts décideront de ranger le local de fond en comble, en 2007.
« Le local a très longtemps servi de débarras. C’est en le vidant qu’on a redécouvert les murs peints, et qu’on a pensé à cet ancien témoignage », relate l’archiviste, qui a travaillé avec Philippe Goddin, expert de l’oeuvre d’Hergé. « En écoutant ce récit, tout en regardant les murs, on nous décrivait exactement ce qu’on voyait », poursuit-il.
« Même forme, même mouvement »
Reste alors à comparer ces fresques avec d’autres productions d’Hergé à l’époque –signées celles-là– dans la revue Boy Scout. Et le tour est joué. « Les chevaux au galop sont dessinés avec exactement la même forme, le même mouvement, le même dynamisme », dit encore Thierry Scaillet.
Selon les experts, les dessins datent de 1922, à l’époque où Hergé, qui suit ses études secondaires à Saint-Boniface, commence tout juste à s’émanciper de sa famille grâce aux scouts et à découvrir de nouveaux horizons.
Dans le local, sur le mur du fond lui aussi abîmé par le temps, une carte de la Belgique a été dessinée à la main, constellée de petites tentes pour marquer les emplacements des camps. Sont aussi mentionnés, à côté, les séjours à l’étranger: « Rome en 1921, Dolomites en 1922 ».
Yves Rouyet, adjoint au maire chargé du Patrimoine à Ixelles, fils d’un célèbre critique belge de BD, explique que ces voyages ont ouvert l’esprit du jeune Georges Rémi et « développé le sens de la narration » qui lui servira tant pour raconter plus tard les aventures de Tintin, le reporter à la houppette, star mondiale de la BD.
Le coup de crayon de l’adolescent est aussi repéré à cette époque par le dirigeant de l’unité de scouts de Saint-Boniface, René Weverbergh, qui se trouve être également collaborateur du journal catholique Le Vingtième Siècle et l’y fera venir pour réaliser ses premiers dessins de presse.
« Weverbergh avait senti le potentiel artistique et il lui a mis le pied à l’étrier… Sans pouvoir imaginer le succès mondial que Hergé allait obtenir plus tard », lâche Thierry Scaillet.
En 1929, quatre ans après avoir quitté Saint-Boniface (à la fois le lycée et les scouts), Hergé publie la première aventure de Tintin dans Le Petit Vingtième, supplément hebdomadaire destiné à la jeunesse du quotidien Le Vingtième Siècle.
A l’issue de la restauration des fresques qui pourrait prendre plusieurs années, le lieu devrait être ouvert au public à certaines occasions, comme les journées du patrimoine.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici