Et si on badinait (un peu) avec l’amour ?

Après les cafés philo, littéraires et scientifiques… place aux cafés de l’amour. L’idée? U lieu pour partager ses réflexions sur le sentiment amoureux. On a testé pour vous cette formule parisienne à succès qui essaime aujourd’hui à Bruxelles.

cafés de l’amour. L’idée ? Un lieu pour partager ses réflexions sur le sentiment amoureux. On a testé pour vous cette formule parisienne à succès qui essaime aujourd’hui à Bruxelles.

Rendez-vous aux Salons de l’Atalaïde. Déco baroque, lumière tamisée, canapés feutrésà Le cadre cosy du bar-restaurant bruxellois s’accorde parfaitement à la conférence-débat qui se prépare dans la salle du fond. Les cafés de l’amour – qui séduisent Paris, chaque semaine, depuis cinq ans – s’installent désormais de façon mensuelle à Bruxelles, et prochainement à Charleroi. Le but du jeu ? Offrir un espace d’échanges, de réflexions et de rencontres autour de l’amour et du sentiment amoureux. À chaque fois : un sujet différent, animé par un intervenant spécialisé (psy, sexologue, coachà) qui propose une grille de lecture de la relation amoureuse.

 » Cette grille de lecture va permettre aux couples de grandir ensemble, aux célibataires de rencontrer éventuellement l’âme s£ur avec plus de succès et à ceux qui vivent déjà dans un couple qui ne fonctionne pas d’avoir quelques éclairages qui pourront leur permettre soit de progresser dans la relation, soit, au contraire, de sortir du cul-de-sac « , explique Bénédicte Ann, l’organisatrice, qui s’affaire déjà dans tous les sens. Car ce soir, comme souvent, c’est complet. Et sa tâche n’est pas simple : placer la centaine de participants de façon à ce que l’auditoire devienne homogène (homme-femme en alternance, tranche d’âge identique regroupée). Histoire que les affinités, s’il y a, puissent décoller.

Bénédicte Ann nous détaille, mon homme et moi, et nous interroge :  » Vous êtes en couple ? Bon, je vais vous placer à deux à une table de djeuns « . Dans l’assemblée, où la moyenne d’âge affiche la quarantaine bien sonnée, c’est sûr, notre trentaine passe pour juvénile. Nous nous dirigeons vers la table assignée, et interrompons visiblement une conversation :  » Finalement la question qui résume tout, c’est  » faisons-nous l’amour pour obtenir des choses ou faisons-nous des choses pour obtenir de l’amour ?  » « .

Heureusement, le thème du jour est plus soft :  » Rencontrer, séduire et (si désiré) garder la femme, l’homme de son choix !  » Le sujet m’interpelle. Quelles sont les ficelles des couples qui durent ? Réponses avec l’invité, le psychologue québécois Yvon Dallaire, auteur de neuf ouvrages dans le domaine, dont Qui sont ces couples heureux ? (Le Livre de Poche) et Guérir d’un chagrin d’amour (Jouvence éditions).

Tournez ménage

Avant de démarrer, Bénédicte Ann épingle la quasi parité dans la salle :  » Rare mais importante, puisque certains exercices seront orchestrés au fil de la soirée. Les cafés de l’amour vous assurent une  » rencontre d’authenticité  » : ici, on se dit des choses qu’on ne se dirait pas en temps normal ! D’ailleurs, beaucoup de couples se forment ici, même si ce n’est pas l’objectif premier. Le but est de se rencontrer au sens large, l’autre et soi-même, et de se poser des questions sur l’amour, ce qui est quand même essentiel ! « 

Subitement, je trouve à Bénédicte Ann une ressemblance avec l’Evelyne Leclercq de Tournez Manège. Serait-ce son passé de directrice d’agence matrimoniale qui lui donne autant d’assurance et de fierté à parler des couples formés lors des cafés de l’amour ? Pourtant, ce soir, malgré le thème, la salle est essentiellement composée de couples. Yvon Dallaire enchaîne avec une anecdote :  » Un élève d’Aristote lui demanda :  » Dois-je rester célibataire ou dois-je me marier ?  » Réponse manifeste du philosophe :  » Peu importe : tu le regretteras !  » La salle, réceptive, éclate de rire. Le psy en profite. Ensemble, nous allons établir les cinq étapes du processus de séduction.

La première question est destinée aux femmes :  » Qu’avez-vous observé lorsque les hommes veulent attirer votre attention ?  » Une courageuse lève la main :  » Ils nous regardent et nous sourient ?  » Ma voisine se manifeste :  » Ils prennent un air sérieux « . Ensuite, c’est partià Chacune est prête à donner son avis :  » Ils font beaucoup de bruit ; se font beaux, se parfument, ont l’air sûr d’euxà  » Le psy résume :  » Ils envoient le message inconscient  » tu peux te reposer sur moi, je suis quelqu’un de confiant « .  » Et qu’est-ce qui vous attire chez un homme ?  » –  » Il reste  » mâle  » « . Rires dans l’assistance.

 » Souvent, on ne sait pas ce qu’on doit faire pour attirer l’autre, explique Yvon Dallaire. Il y a un aspect biochimique qui entre en ligne de compte. » Mêmes interrogations pour les hommes. Les réponses sont plus diversifiées et vont de  » apparence agréable  » à  » elles ondulent  » ! Si les hommes envoient le message inconscient qu’on peut avoir confiance en eux, les femmes, elles, se manifestent comme  » un être de plaisir « .  » Si tu viens avec moi, tu vas avoir du fun ! « , résume le psy. Premier point du processus de séduction donc : l’aspect physique !

Les femmes au contrôle

Deuxième exercice pour l’assemblée : tenter de se souvenir, les yeux fermés, de l’émotion provoquée par le premier regard échangé. Puis, passage à l’action : nous devons  » rencontrer des yeux  » dans la salle. Curieusement, les regards papillonnent. Rares sont ceux qui osent la  » confrontation « . Moi, la première. D’autant que  » lorsqu’un regard intrusif rencontre un regard permissif, on ressent un émoi ! « , souligne le conférencier. Les pupilles se dilatent pour rendre le regard encore plus intense.

Troisième stade du processus : l’entrée en matière. Comment aborder un(e) inconnu(e) ? Je me lève, comme les autres femmes, pour aborder une personne au hasard. Je me dirige vers le premier homme que je vois, et lui demande :  » Puis-je m’asseoir ?  » Réponse cash :  » Alors, c’est vous la journaliste ?  » Bing, repérée. Cassée dans mon élan. Tant qu’à faire, j’en profite pour prendre la température : Jean-François est conteur et maître de stage en énnéagramme ( NDLR : étude de la structure de la personne humaine). Venu avec une copine, il avait peur que ce soit mondain, mais trouve la formule interactive, donc plutôt intéressante. Je quitte Jean-Françoisà Freddy, travailleur social dans un CPAS, s’installe à ma table :  » Je ne vais pas vous demander si vous habitez encore chez vos parents, ce n’est sûrement pas le casà  » –  » Après tout, qu’en savez-vous ?  » Ma réponse, qui se veut ironique, le laisse perplexe. Bide des deux côtés. Ce qui ne nous empêche pas de sympathiser. J’apprécie sa bonhomie.

Conclusion de l’exercice ? Euhà Grâce à une étude réalisée par des étudiants en psychologie qui visait à connaître le taux de réussite de phrases d’entrée en matière, on sait que la plus entendue est  » bonsoir « . Ce qui assure tout de même 60 % de chances qu’une conversation s’enclenche.  » Plus vous cherchez à être original, plus votre taux de réussite baisse ! « , sourit Yvon Dallaire. Mais il existe une phrase qui assure de dépasser, dans 82 % des cas, les 4 minutes de conversation habituelle. Laquelle ?  » Celle qui dit la vérité.  » Un simple  » Je suis un peu mal à l’aise en vous abordant, mais j’aimerais beaucoup faire votre connaissance  » peut donc faire des miracles.

Quatrième étape : le premier contact physique. Dans 75 % des cas, c’est la femme qui l’initie en touchant d’une façon spontanée mais tout à fait délibérée l’avant-bras de l’homme ou le dessus de sa main. Le message inconscient ?  » Continue bonhomme, tu m’intéresses « , s’amuse le psy. Conclusion sans appel : ce sont les femmes qui contrôlent le processus de séduction !  » Messieurs, vous ne pouvez pas séduire une femme qui ne désire pas l’être !  » Paf, dans les dents. Les femmes affichent soudain un air de contentement.

Et de cinq ? La danse de l’amour. Qui se manifeste par un certain mimétisme dans les gestes. Les tourtereaux adoptent un comportement en miroir, en écho.  » Chez les singes, on appelle cela l’épouillage « , précise le psy. Tout le monde est d’accord.

Last but not least : son conjoint, comment faire pour le garder ? Enfin, la partie qui m’intéresse. Séduire vient du latin seducere qui signifie  » amener à l’écart pour obtenir des faveurs « . Yvon Dallaire est catégorique :  » Il est plus facile de séduire quelqu’un et de  » tomber en amour  » que de construire à long terme. Pour cela, il faut beaucoup plus que de l’amour et de la bonne foi « . Aïe. Pas de recette miracle. Et les statistiques sont effrayantes : pour un premier mariage, on obtient 50 % de divorce. Pour un second, 75 % et pour un troisième 85 % ! Pourquoi ? Parce qu’on répète les mêmes erreurs ! Mais noooon.

Love is in the flair

Dernière question essentielle posée à l’assemblée :  » Comment dépasser cette crise ?  » Les réponses fusent : grâce à la complicité, au respect, au partage, en supportant les défauts de l’autre, en restant fidèle à soi-même, en communiquantà  » Tout est très vrai, s’enthousiasme le psy. Mais tout peu se résumer en un mot : l’admiration.  » L’amour est comme un triangle. Il se compose de trois bases : le physique, l’admiration et les projets communs.  » On ne peut pas aimer quelqu’un que l’on n’admire pas, c’est impossible !, conclut Yvon Dallaire. Tant que vous avez des projets communs et que vous en parlez, vous entretenez, vous construisez votre couple. « 

Le secret des couples heureux ? Souvent, ils n’en savent rien. Mais ils ont tous une base commune : ils échangent 5 à 10 fois plus de compliments que de critiques. Tandis que les couples malheureux usent de mépris, d’attitudes défensives et de comportements de fuite.  » Ce n’est pas le  » tu  » qui tue la communication, c’est ce qui suit le  » tu « à Dire  » tu es magnifique, merveilleux, intelligent « , n’a pas le même impact que  » tu es idiot, tu le fais exprès ?  » En manquant de respect à son partenaire, on se manque de respect à soi-même. « 

Pas simple visiblement de réussir le pari du couple. Je déprime. Et ne suis visiblement pas la seuleà Une femme ose demander, pendant le dernier quart d’heure imparti aux questions-réponses, si les couples heureux à long terme existent vraiment ?  » Oui madame, assure Yvon Dallaire. Mais ils ne sont que 15 à 20 %. À l’amour et à la bonne foi, il faut ajouter deux choses. Primo, connaître les différences entre homme et femme (et donc être conscient des efforts à fournir). Secundo, savoir que le couple ne rend pas heureux. Il est un creuset qui génère des crises. Mais si celles-ci sont gérées correctement, elles peuvent devenir des sources de connaissance et aider à nous élever en amour. « 

Voilà, maintenant, je dispose des ingrédients pour la potion magique  » et ils vécurent heureux « . Ne reste plus qu’à déployer mes talents de cuisi-sorcière. N’empêche, je repars encore plus amoureuseà Totalement admirative de mon joli crapaud : il n’a pas bâillé une seule fois !

Valentine Van Gestel

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