L’Arabie forme des milliers de Saoudiens au secteur du tourisme
Sous l’oeil attentif d’un instructeur, Munira al-Rubaian apprend à changer des draps dans une fausse chambre d’hôtel à Ryad, en espérant que cette formation l’aidera à trouver un emploi dans l’industrie naissante du tourisme en Arabie saoudite.
Comme des milliers de Saoudiens, la jeune femme de 25 ans, au chômage, participe à un programme mis en place par les autorités pour former 100.000 futures recrues dans un secteur appelé à évoluer dans les années à venir.
Femmes de chambres, réceptionnistes, cuisiniers ou directeurs des ventes, les stagiaires sont initiés à différents métiers dans des centres spécialisés de la capitale saoudienne, tandis que d’autres sont envoyés à l’étranger pour suivre des cours intensifs comme aux Pays-Bas, Espagne, Suisse et en France.
Le royaume ultra-conservateur, qui a ouvert ses portes aux touristes il y seulement trois ans, compte sur ces jeunes pour séduire les visiteurs, et occuper des postes traditionnellement réservés aux étrangers.
Après avoir essayé en vain de décrocher un emploi dans un hôtel, Munira al-Rubaian attend beaucoup du programme « les pionniers du tourisme ».
« Je vais avoir l’expérience et la confiance nécessaires pour m’occuper » des touristes, affirme à l’AFP la jeune femme, vêtue d’un niqab.
L’initiative s’inscrit dans le cadre de la stratégie portée par le jeune prince héritier et dirigeant de facto du royaume, Mohammed ben Salmane, visant à diversifier l’économie du premier exportateur mondial de pétrole en misant entre autres sur le tourisme.
Le pays a commencé à accorder des visas touristiques en 2019, juste avant la pandémie du coronavirus, avec l’objectif ambitieux d’attirer 30 millions d’étrangers par an à l’horizon 2030, contre seulement quatre millions l’an dernier.
En incluant le tourisme saoudien, le royaume vise 100 millions de visiteurs par an en 2030, et la création d’un million de nouveaux emplois.
Le secteur emploie aujourd’hui quelque 850.000 personnes, dont seulement 26% de Saoudiens, selon les chiffres officiels. Le plan « Vision 2030 » promet de porter cette proportion à 70%.
« Saoudiser le secteur »
Lancé en juin, le programme « Pionniers du tourisme » est doté d’un budget de 100 millions de dollars, avec des formations couvrant 52 emplois, allant de l’accueil à la direction.
« Nous devons développer les connaissances, les aptitudes et les compétences des Saoudiens », affirme Mohammed Bushnag, ministre adjoint du tourisme chargé du développement du capital humain.
L’objectif n’est pas seulement de favoriser l’embauche d’une main d’œuvre locale, mais de « saoudiser le secteur » tout en fournissant un service de qualité.
Pour les jeunes enrôlés, les stages à l’étranger sont particulièrement instructifs.
En Suisse où il a passé une semaine, Al-Waleed al-Zaid, directeur des ventes dans un hôtel affilié à une chaîne internationale, a rencontré une clientèle très différente des voyageurs d’affaires auxquels il est habitué à Ryad.
Au lieu de répondre à des questions sur le nettoyage à sec de vêtements ou les tarifs des appels internationaux, il était interrogé sur les attractions à visiter et la disponibilité des transports publics.
Cela « m’a permis de mieux comprendre les attentes des touristes en termes d’activités, de nourriture et de lieux à visiter », explique-t-il.
Outre les pèlerinages dans les lieux les plus saints de l’islam, La Mecque et à Médine, l’Arabie saoudite développe de nouvelles attractions, comme un projet culturel près des tombes nabatéennes d’Al Ula ou un centre balnéaire sur la mer Rouge, pour attirer une clientèle internationale et locale.
Les autorités ont assoupli certaines règles, autorisant par exemple les cinémas et les concerts mixtes, mais l’alcool reste interdit dans le pays.
Pour espérer rivaliser avec les Emirats arabes unis, la principale destination dans la région, le ministère du tourisme a annoncé la semaine dernière que les résidents des pays voisins du Golfe pourront désormais demander des visas touristiques électroniques, comme les ressortissants des 49 pays, essentiellement en Europe et en Amérique du nord, déjà autorisés à le faire.
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