La fraise de Wépion, superstar du potager

EXTRA: Les fraises de Wépion vendues dans les aubettes qui longent la chaussée de Dinant sont de première fraîcheur. Récoltées chaque matin, elles viennent directement des champs. © Frédéric Raevens pour Le Vif/L'Express
Barbara Witkowska Journaliste

Voici sa longue et savoureuse épopée de la fraise de Wépion, avant qu’elle ne devienne le produit phare et l’image de marque d’un petit village près de Namur et qu’elle n’entre au musée.

Le nom Wépion viendrait du latin Vulpilio (terre à renards). Au Moyen Age, la chaussée de Dinant n’existait pas. A la place s’étendait la forêt de Marlagne, touffue, sauvage, peuplée de renards et traversée par le courant nerveux de la Meuse. Au XVIIIe siècle, le paysage se transforme, la forêt de Marlagne cède peu à peu la place à des vergers se déployant le long du fleuve. On y cultive beaucoup de houblon (pour lequel il faut s’acquitter d’une dîme), destiné aux brasseries namuroises, fameuses à l’époque. Très hautes, les perches de houblon laissent au sol de l’espace libre.

Pour le rentabiliser, certains paysans commencent à cultiver la fraise des bois, produit de luxe, utilisé notamment dans la pharmacopée. La fraise des bois était liée à la Vierge et était le symbole du paradis terrestre. En revanche, on ne sait rien sur sa consommation. La culture s’est poursuivie jusqu’en 1860-1870. Une dizaine d’années avant l’arrivée de la « vraie » fraise.

Deux variétés américaines

Ingénieur militaire, officier du génie maritime français, mais aussi explorateur et botaniste, Amédée-François Frézier est envoyé, en 1712, par Louis XIV en Amérique du Sud. Sa mission ? Espionner les fortifications espagnoles au Chili et au Pérou. Il y restera deux ans. Comme la plupart des nobles de l’époque, Frézier se passionne pour les plantes. Avant de regagner la France, il se promène à Concepción, au Chili, où il découvre des plantations de fraises blanches, dites Blanches du Chili (Fragaria chiloensis). L’idée lui vient alors de les faire pousser dans son jardin. Il en acquiert cinq plants et en prend le plus grand soin durant la navigation qui durera trois mois ! De retour en Bretagne, il les repique dans son jardin à Plougastel.

Les fraisiers se multiplient, s’épanouissent et fleurissent, mais ne donnent aucun fruit… Frézier essaye de les croiser avec la fraise des bois, toujours sans succès. Un de ses amis, grand spécialiste des fraises, lui apprend que la Blanche du Chili est une plante monoïque, ce qui signifie que les fleurs unisexuées mâles et femelles sont portées par le même plant (c’est aussi le cas du maïs et du kiwi). Pour obtenir les fruits, il faut les croiser. Or, Frézier n’a ramené que des plants femelles ! Fort heureusement, l’ami en question cultive dans son jardin la fraise de Virginie (Fragaria virginiana). En procédant à une fécondation croisée avec des plants mâles de la fraise de Virginie, Frézier peut enfin déguster ses propres fraises. C’est la rencontre de ces deux variétés américaines à Plougastel qui a donné naissance à toutes les variétés de fraises cultivées aujourd’hui en Europe. Y compris à Wépion où elle a détrôné, plus d’un siècle plus tard, la fraise des bois.

Dans Le Vif/L’Express de cette semaine, l’intégralité de l’article. Avec :

– le début de la success story wépionnaise

– comment la production s’est structurée

– le déclin

– la résistance jusqu’à aujourd’hui

– le Musée de la fraise, à Wépion

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